Actualités

Sport

Business

Culture

TV / Radio

Afrique

Opinions

Pays

06 avril 1984 : ‘cette affaire ne nous a pas encore dépassé, il ne faut pas que la France intervienne’

Il fait des révélations sur les attitudes des généraux pendant les opérations

Wed, 6 Apr 2022 Source: www.camerounweb.com

• Benoît Asso'o Emane a contacté Paris au moment de l’attaque

• Il a demandé aux Français de ne pas intervenir dans les opérations en cours

• Il fait des révélations sur les attitudes des généraux pendant les opérations


Commandant du Quartier général, le feu général Benoît Asso'o Emane (colonel à l'époque) était celui qui a décidé de prendre le commandement des opérations le 06 avril 1984 pour faire échec à la tentative de coup d'Etat. Il rappelle dans une interview accordée aux Cahiers de Mutations comment les généraux avaient refusé de prendre leur responsabilité. Bien qu'encerclé par les mutins, Benoît Asso's avait appelé l'ambassade du Cameroun en France pour demander à Paris de ne pas intervenir dans les opérations en cours.

« ... Après Bafoussam, j'appelle un commissaire en service à l'ambassade du Cameroun en France et je lui dis ceci : "Cette affaire ne nous a pas encore dépassé, il ne faut pas que nos amis français interviennent. Nous-même on va résoudre le problème à notre niveau". Et c'est là que je prends le commandement », confie-t-il.

Les révélations du général Benoît Asso’s contrastent avec les récits du Général Pierre Semengue qui prétend pourtant avoir joué un rôle déterminant dans la mise en déroute des assaillants. « Ce que je dis, c'est qu'il faut que la vérité se sache : jusqu'à la libération du chef de l'Etat, aucun général n'a pris le commandement des opérations. Le seul commandant des opérations, c'était moi », martèlait Benoit Asso’s.

Dans son récit, on apprend comment les forces mystiques ont influencé la reconquête du pouvoir.



Quand je rentre dans ma chambre, je vois deux blindés qui se dirigeaient vers ma maison: un venant du côté du domicile du Général Semengue, l'autre venant du domicile du président de l'Assemblée nationale. Quand les deux chars s'arrêtent, ils pointent leurs canons vers ma maison et je dis à ma femme "Nous sommes morts!"

Les gars savaient que je me trouvais dans cette chambre là. Ils savaient que c'était là qu'il fallait absolument frapper. Ils ont donc commencé à tirer sur la maison. Ma femme et moi nous sommes réfugiés dans des coins différents de la chambre que j'ai appelée par la suite "la chambre de Dieu". Pendant une heure, ma maison a été bombardée. J'ai demandé à ma famille de ne pas dire où je me trouve parce que c'est moi qu'on cherche. Car si on me tuait, le pouvoir aller tomber. Je suis donc rentré dans les douches. Et Dieu seul sait que moi, je suis originaire d'une zone de pygmées. J'ai été obligé d'employer des méthodes qu'on nous apprend au village et qu me rendent invisible.

Lors que les gars sont arrivés, la première question qu'ils ont posée était :" Où est le colonel?" Mon fils Bernard leur leur a dit que je n'étais pas là, que j'étais déjà avec eux sur le terrain. Ils ont ensuite dit : " Debout!" Mon frère ainé qui devait être évacué en France pour se faire opérer leur a répondu : "Moi je suis malade". Puis j'ai entendu :"Mettez-vous sur la route" J'ai dit "ça y est ils vont les tuer!"/ Ace moment-là je me suis couché dans la douche. J'ai dit à Dieu : "C'est toi qui a donné le pouvoir au président Biya, Ahidjo n'a éré qu'un relais, maintenant que nous devons mourir entre tes mains, Dieu je te remets mon destin!". Ils ont tiré sur la maison et comme par miracle rin n'est tombé sur moi, aucune caillasse. Les débris tombaient entre mes genoux. Après une heure de tirs, le froid du ciment m'a endormi. J'ai été projeté dans mon village. J'ai trouvé ma mère, décédée en 1973, débout sur la tombe de mon père. Elle m'a dit : " Mon fils, tu vas gagner ce combat". Lorsque je me suis réveillé, il faisait une chaleur de tonnerre ce jour-là. Je n'ai plus entendu de bruit.

Je suis sorti et j'ai mis une cartouche dans mon pistolet. Je vous signaler qu'il ne me restait que neuf cartouches. Je suis descendu pour aller reconquérir le quartier général. Je tombe sur mon frère cadet qui revenait, sur mes instructions, de Sangmélima où on lui avait remis 36 grenades. Quand il m'a vu, il s'est mis à pleurer. Je lui ai dit : "ce n'est pas le moment de pleurer, je suis liber et à partir de maintenant" je commence la guerre.

Source: www.camerounweb.com