Le Pr Jean Tabi Manga dans sa leçon inaugurale, a fustigé ce désamour paradoxal qu’ont les francophones de l’Occident pour la langue française, et s’est demandé pourquoi, la Francophonie, n’est qu’une histoire des Africains. Les travaux s’achèvent jeudi prochain.
« Problématique de l’apprentissage et de l’enseignement du français dans un contexte de crise », est le thème qui depuis ce 16 novembre 2015, préside aux assises du 9è Congrès de l’Association des professeurs de français d’Afrique et de l’Océan indien (Apfa-Oi).S’inscrivant d’après les organisateurs dans un contexte où la langue française est plus que jamais menacée dans son organisation structurale, le conclave de la capitale camerounaise entend impulser une dynamique nouvelle au français, par un apprentissage et un enseignement répondant aux standards édictés par les experts.
Prenant la parole pour la notion inaugurale qui aborde la crise du français, le Pr Jean Tabi Manga, recteur des universités, enseignant de français à l’université de Yaoundé I, a décrié le déficit d’enseignants de français au Cameroun. « Comment, s’interroge-t-il, peut –on en faire un francophone sans manuel scolaire ? » Pour lui, la crise de l’édition scolaire au pays, est un danger pour le français. Plus précisément, il s’agit d’un manque de capacité éditoriale endogène.
« J’ai bien peur que les jeunes optent pour d’autres espaces géolinguistiques », s’inquiète Tabi Manga, qui ne comprend pas pourquoi les francophones occidentaux ont un grand désamour ce jour pour le français. « Comment comprendre que les soutenances, les colloques, et autres communications dans les universités francophones du Nord, se tiennent en anglais. Le français est mal aimé. Il ne bénéficie pas de l’engouement de ses fils du Nord au Sud.
Puisqu’au Nord, le français est juste perçu comme faisant partie de l’Histoire, et non comme un outil de développement. Comment, les Africains qui fréquentent les universités occidentales francophones, peuvent-ils donc croire en l’efficience du français !? », s’indigne le Pr Jean Tabi Manga qui demande enfin pourquoi on fait de la Francophonie, une affaire exclusivement africaine.
De l’insécurité linguistique de français et sa fiabilité sur le marché du travail
Volets quoiqu’abordés sommairement à cette entame de 9è Congrès de l’Afpa-Oi, la tribune de Jean Tabi Manga qui s’est réclamé pragmatique, veut qu’aujourd’hui, soit posée la question de si, la langue française, permet à un jeune de se faire recruter dans une multinationale. Parce que selon lui, l’économie porte la langue. Raison pour laquelle, aux Etats-Unis d’Amérique, l’anglais est menacé par l’espagnol.
« L’espagnol procure aujourd’hui beaucoup d’emplois aux Américains. La menace est si grande que le gouvernement des Etats-Unis envisage la mise en place d’une législation en vue de protéger l’anglais », a renchéri M. Tabi Manga qui a aussi lié la langue (la culture) à l’émergence, justifiant pour quoi, il a institué l’apprentissage du Mandarin à l’université de Yaoundé II à Soa, du temps où il y était recteur.
Pour ce qui est de l’insécurité linguistique, le Pr Guy André Nsihinyabashira, qui enseigne au département de langue et littérature françaises de l’université d’Etat du Burundi, affirme que c’est un problème qui interpelle et les enseignants de français, et les apprenants, et les Etats, au niveau de la macro politique de la langue française. Les travaux de Yaoundé se poursuivent jusqu’au 19 novembre, avec plusieurs exposés qui devront voir au final les grands maîtres du français, dégager des propositions à la fois techniques, et politiques à même de conserver intactes l’avenir radieux du français dont on pense qu’il ferait 750 millions de locuteurs en 2050, contre 274 aujourd’hui.