Annoncées en 2017, les reformes visant la régulation des transports sur les routes et axes camerounais semblent en berne. Le taux d’accidents progresse et, dans le même temps, les responsabilités paraissent tronquées. Selon les experts, les transporteurs non homologués occasionnent la mort de milliers de personnes sur nos routes, plus que les agences de transports souvent mis à l’index.
Enquête dans un secteur où les commis de l’Etat font prospérer la mort et le déni de la loi. Malgré les nombreuses lois et textes réglementaires, pas moins de cinq mille accidents sont vécus sur les routes du Cameroun chaque année.
La mesure gouvernementale est annoncée depuis le mois de septembre 2017. Il s’agit pour le ministère des transports, en collaboration avec les municipalités, les syndicats professionnels des transports routiers ainsi que les forces de Police et de Gendarmerie de «mettre en place des mesures appropriées pour le retour à plus de sérénité sur nos routes.»
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Un engagement qui tient du souci, en amont du phénomène d’accidents sur les routes camerounaises d’assainir le circuit de délivrance du permis de conduire et renforcer la formation des candidats à l’examen d’obtention de ce document.
Cette réforme annoncée par le gouvernement qui est officiellement entrée en vigueur le 1er septembre 2017 comprend plus d’une dizaine de points.
Informatisation des fichiers des auto-écoles, suivi de la formation des apprenants, sécurisation et informatisation du circuit des examens en vue de l’obtention du permis de conduire, production d’un permis de conduire sécurisé, introduction d’un formulaire réglementaire d’établissement du permis de conduire garanti par le Système de sécurisation des documents de transport (Ssdt) et l’institution d’un nouvel outil de renforcement du contrôle du permis de conduire. En permanence, le projet présenté en 2017 prend en compte le fonctionnement des acteurs des transports routiers.
Lors d’une conférence de presse conjointe avec des cadres de l’administration,-représentants les ministres de l’administration territoriale et de la décentralisation, le ministre des transports, le ministre des travaux publics, le Secrétaire d’Etat à la défense chargé de la Gendarmerie, le Délégué général à la sûreté nationale ainsi que des experts Le ministre de la communication, Issa Tchiroma Bakary annonçait une multitude de mesures visant s’assurer des conditions de voyage sur les routes. «Il y a par ailleurs la multiplication des contrôles permanents et inopinés dans les points d’embarquement et de débarquement des passagers dans les points de ramassage.» Un préalable que le porte-parole du gouvernement, lors de sa sortie du 6 septembre 2017 impliquait formellement le ministère des transports, les municipalités, les syndicats de transports routiers et les forces de l’ordre.
Il s’agirait alors d’intensifier les contrôles sur les principaux axes routiers «à l’effet de constater et de réprimer les cas de violation de la réglementation sur le transport routier». Des infractions parmi lesquelles étaient principalement citées les surcharges, les excès de vitesse. Il s’agit aussi d’intensifier les contrôles sur l’état technique des véhicules empruntant les routes camerounaises. Une opération que le gouvernement et les professionnels des transports routiers annonçaient aussi dans les centres de visite technique.
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Le dossier que Le Messager vous propose cette semaine se veut une observation de la réalité de ces mesures sur nos routes ainsi que leur impact sur la réduction de la tendance accidentogène sur les principaux axes routiers camerounais. Certainement avec des données exclusives- au regard de la disponibilité de certains acteurs clé à fournir les informations sollicitées-, nous prenons néanmoins l’initiative de convier à un débat ouvert sur la réalité dans l’activité des transports et la problématique de nos axes routiers dont les conséquences multiples impactent sur toutes les composantes sociales. En dehors de la surveillance des tronçons accidentogènes qui suscite toujours des débats, qu’en est-il du respect de la réglementation des heures autorisées de pour la circulation des différents types de véhicules les gros porteurs en particulier-, un questionnement inspiré des nombreuses interdictions énoncées dans ce sens-malheureusement sans incidence réelle. En dehors des nombreuses interdictions de voyages nocturnes, pourquoi la mesure reste sans effet sur certains axes? Il en est de l’enlèvement «systématique» des véhicules en détresse, mal stationnés ou en stationnement prolongé.
Dans le même sillage, comment expliquer la multiplication des carcasses aux abords des routes et axes à forte activité alors même que l’état de la chaussée pose déjà, lui-même, un problème. Le débat que nous ouvrons implique en grande partie la responsabilité humaine dans les tragédies que connaissent nos routes. Installés dans l’habitude du malheur-, pour emprunter à une énonciation littéraire-, la consommation permanente de l’alcool et d’autres substances illicites viennent conforter l’idée de la mentalité quasi généralisée des conducteurs et autres usagers de la route au
Cameroun. Un espace où les responsabilités sont d’abord attribuées aux tiers.
L’élément humain, dans l’expérience que nous vous suggérons semble, en grande partie, la somme des petites inattentions et des complicités souvent favorisés par les personnels commis à la sécurisation routière et à la régulation du secteur des transports routiers en amont. Une perception qui pourrait aller à l’encontre des constats traditionnels faits par les experts de la sécurité routière qui attribuent la responsabilité première aux conducteurs automobile.
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Une appréciation certes soutenue mais qui ne peut exemptée la forme et la qualité des contrôles sur nos routes. Dans ce contexte de recrudescence des accidents sur nos axes routiers, nous entendons faire du mieux pour évacuer la dose de subjectivité qui a souvent tendance à dominer le jugement lorsque l’on est acteur et observateur dans ce type de contexte. Il reste néanmoins que la forte tendance à la répression,-d’ailleurs appliquée à choix variable sur certains fautifs plus que sur d’autres-, ne dispense pas l’observation des causes infrastructurelles. Selon le gouvernement, il est envisagé d’imposer des limitations de vitesse plafonnée à 100 kilomètres par heures sur tous les axes camerounais.
Seulement, la signalisation sur les routes camerounaises n’est pas le dispositif le plus perceptible. En outre, le cantonnage saisonnier et parfois à la hussarde ne contribue pas toujours à la visibilité tant souhaitée sur les axes camerounais. Tout comme les routes dont 90 pour cent,-selon les chiffres officiels-, en terre ne bénéficient pas toujours des commodités exigées par certaines saisons.
Dans ce débat où les responsabilités sont souvent discutées, le gouvernement soutient que «en termes de pourcentage des différentes causes ainsi relevées et tout au moins pour la période particulièrement mortelle du mois d’août 2017, les enquêtes révèlent que 70% des accidents sont dus à des causes humaines, 20% à des causes infrastructurelles et 10% à des causes techniques.» Expert en sécurité routière, Franklin Kamtche explique que «Dans de nombreuses recherches, les facteurs humains sont mis en avant dans plus de 90% des cas d’accidents.
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Ils sont même la cause exclusive de 65% de ceux-ci.» Certes, la réalité n’est pas exclusivement camerounaise mais l’expert en service au cabinet White Dove fait néanmoins remarquer que «Pour sensibiliser ou sanctionner, il faut connaitre les points d’achoppement, ou les points sensibles de l’insécurité routière.»
Une perception partagée par de nombreux rapports sur la sécurité routière et la diminution des accidents sur les routes camerounaises. Des approches qui mettent en relief la prise en compte des mentalités qui motivent les comportements risqués. Reste que, quoiqu’il en soit, la situation reste préoccupante.