Mgr Jean-Marie Benoît Bala est mort d'une « mort suspecte ». C’est ce qu’indique un communiqué du procureur général près la Cour d’appel du Centre. Depuis cette sortie du procureur général, plusieurs interprètations sont faites par rapport à la notion de "mort suspecte". Pour avoir l'avis d'un spécialiste, nous nous sommes approchés de Me Nestor Mbia, avocat au Barreau du Cameroun. Ce dernier revient en détail sur cette notion qui fait grand bruit dans l'opinion.
Mort suspecte : qu'est-ce que c'est?
Il y a mort suspecte dans deux types de situation. La première, c’est quand les causes ou circonstances du décès ne sont pas clairement et sûrement déterminées. La seconde, c’est quand le décès survient dans des conditions qui laissent craindre des causes non naturelles. On parle de « mort suspecte » lorsqu’il y a possibilité d’intervention d’un tiers et, par conséquent, lorsque la mort peut relever d’une infraction. Il arrive dans certains cas que la mort survienne contre toute attente et qu’aucun élément ne permette de l’expliquer lors de l’examen du corps. Le rôle du médecin légiste est, dans ce cas-là, très compliqué puisqu’il doit établir si la mort est naturelle ou non. Afin de répondre avec certitude à cette question, il doit déterminer la cause exacte de la mort.
Quel (s) élément(s) la justice met-elle en avant pour qualifier une mort de «suspecte » ?
Il y a surtout les causes non naturelles. Parmi celles-ci, on peut citer un accident dont les responsabilités nécessitent d'être établies, un suicide ou un meurtre. Il est à relever que parfois, pour qualifier une mort de « suspecte », la justice se base sur la personnalité du défunt. Il y aussi l’absence de lésion permettant d’affirmer la mort violente ou si les lésions ne permettent pas d’expliquer le décès (blessures anodines ou blessures post-mortem). Bref, lorsque le corps du défunt est sans trace de plaies, sans témoin, sans antécédents.
On suppose dans ce cas que l’intervention d’un médecin- légiste est nécessaire...
Absolument ! Il intervient classiquement pour faire parler les corps morts. C’est lui qui comprend mieux le langage des défunts pour le dire simplement. Vous savez, c’est le parquet qui centralise et dirige les investigations policières, mais la loi fait primer l'efficacité. C’est à ce titre qu’un médecin-légiste intervient. Dès lors que la mort est suspecte ou violente, une enquête est confiée à la Police judiciaire. L'autorité judiciaire peut alors décider de transférer le corps dans un institut médico-légal pour pratiquer une autopsie. Un médecin, agrémenté par la police judiciaire, établit le certificat de décès. C’est lui qui est chargé de déterminer la ou les causes de lésions d’une victime, et en particulier les causes de décès suspect. Il doit dans le cadre d’une enquête, constater et étudier les faits criminels ou délictueux ; apprécier des dommages causés à un individu par une violence accidentelle ou criminelle ; rédiger des rapports détaillés pour le magistrat. Et pour éviter d’éventuelles erreurs, il effectue un examen clinique de la victime (évaluation des lésions cutanées, examen des organes) ; il peut être amené à faire une recherche de toxique, des analyses biologiques, ou encore utiliser des techniques d’imageries médicales.
Pour livrer sa copie à la justice, cela devrait lui prendre combien de temps ?
La loi camerounaise ne fournit aucune précision à ce sujet. Elle donne tout simplement au médecin-légiste le pouvoir d’examiner un corps mort dans un intervalle de temps propice à confirmer ou à infirmer telle ou telle hypothèse.