Certains au sein de l’opinion publique parlent déjà de deux poids, deux mesures dans le verdict rendu cet après midi du jeudi 3 septembre 2015 au Tribunal criminel spécial dans l’affaire Etat du Cameroun contre Iya Mohammed. Ce dernier et ses co-accusés répondent depuis deux ans, des faits de détournement de derniers publics, d’un montant estimé à environ onze milliards de FCFA.
Joint au téléphone, une source qui a assisté à l’ultime audience de ce jeudi, a fait savoir que l’ex Directeur général de la Sodecoton, incarcéré depuis deux ans à la prison de Kondengui à Yaoundé, a été condamné à 15 ans d’emprisonnement ferme. Le Français Henri Clavier, ex Directeur général adjoint de la Sodécoton, a été acquitté. Et pourtant, le 1er juillet 2015, le ministère public avait requis la culpabilité de tous les accusés, y compris Henri Clavier que la justice a laissé filer en France il y a huit mois alors qu’il était un potentiel prisonnier.
«Le ministère public dans ses réquisitions a fait savoir que tous les accusés sont coupables des faits qui leur sont reprochés. Ceci malgré le fait qu’ils aient tous plaidé non-coupables dès l’entame du procès. Tous les chefs d’accusation ont été passés au peigne fin. C’est ainsi que, concernant les avantages salariaux que se serait attribué Iya Mohammed courant 2005 à 2010 et évalués à 51,694 millions de F par exemple, l’avocat général a fait savoir que cette augmentation illégale était une sorte de violation aux statuts de la Sodécoton. Selon lui, c’est le conseil d’administration qui devait valider cette hausse de salaire. Il en est de même pour le financement des activités de Coton Sport et de la construction du complexe sportif évalué à 4,733 milliards de F parce que les dépenses effectuées n’avaient aucun lien social avec l’entreprise. Dans le cadre du volet des déperditions de stocks d’huile, de tourteaux et de ristournes évaluées à 6,094 milliards de F, le ministère public a indiqué qu’elles proviennent des sorties des produits non-autorisées et que la non interpellation de contrôleurs et l’absence de suivi efficient de stocks sont des éléments de preuve de la culpabilité de l’ex-Dg en coaction avec Pierre Kaptene, Mahamat Karagama, Lucien Fotso, Henri Clavier et Mbaiougam Christophe. Idem pour les dépenses engagées d’un montant de 350 millions de F, sans l’accord du Conseil d’administration au profit du CAC, cabinet de Jérôme Minlend» rapportaient le 2 juillet 2015, nos confrères de Cameroon Tribune.
Bien avant, le 1er novembre 2014, Henri Clavier avait fait des déclarations fracassantes devant la barre pour dédouaner son supérieur hiérarchique. «En ce qui concerne les actes courants de gestion, il y a à mon entendement une erreur d'appréciation car, les enquêteurs ont assimilé la Sodécoton à une entreprise publique relevant de la loi de 1999. Or, la Sodécoton est une entreprise d'économie mixte à participation majoritaire de l'Etat et avec conseil d'administration. Les statuts de la Sodécoton sont en conformité avec le statut des entreprises commerciales relevant de l'espace Ohada.
La législation Ohada est supra nationale. Dans ses statuts, il est précisé que le directeur général dispose des pouvoirs les plus étendus hormis ceux qui relèvent du conseil d’administration. [...] Toutes les actions de gestion courante de l'entreprise [...] relèvent de la responsabilité du directeur général. Pour ce qui est du financement des activités sportives, il intervient dans le cadre du financement des actions sociales approuvées par le conseil d'administration. Et cela, bien avant la période du contrôle de 2005 à 2010… Les ventes d'huile et de tourteaux sont de la responsabilité de la direction des ventes.
Sauf à apporter la preuve que monsieur Iya ait ordonné directement ces ventes pour sorties, ce qui ne semble pas être le cas. Je n'ai pas le pouvoir de juger. Mes propos consistent à dire qu'en ce qui concerne les actes de gestion courante de la Sodécoton, ils n'ont fait l'objet d'aucune observation des commissaires aux comptes, ni du conseil d'administration qui contrôle la gestion de la Sodécoton. [...] en ce qui concerne les sorties sans contrepartie financière des huiles et des tourteaux, il y a une discordance totale entre les chiffres avancés par le Consupe et ceux de la direction comptable. Mais quoiqu'il en soit, M. Iya ne peut être tenu pour directement comptable de ces sorties tant qu’il n'y a pas eu la preuve qu'il les a ordonnées» Un plaidoyer rapporté dans les journaux qui a finalement laissé de marbre le juge.
Selon notre source, les co-accusés Mahamat Karagama, ex directeur des ventes et Christophe Mbaiougam tous deux en fuite, s’en tirent avec une peine de condamnation à vie. Lucien Fotso le comptable et Jérôme Minlend le PDG du Cabinet Cameoun audit conseil ont été acquittés.