L’ancien directeur général de la CRTV n’a pas été extrait de la prison pour comparaitre le 20 juin au tribunal de grande instance du Mfoundi. Il a introduit dans cette juridiction une demande de libération immédiate.
Difficile de dire avec exactitude les raisons ayant empêché l’extraction d’Amadou Vamoulké de la prison centrale de Kondengui pour le tribunal de grande instance du Mfoundi le 20 juin 2023. Pourtant l’ancien directeur général de la Crtv écroué à la prison centrale de Yaoundé depuis juillet 2016, était attendu avec ses conseils pour une audience d’habeas corpus. Ces avocats contactés au téléphone ne savent non plus pourquoi leur client n’était pas au tribunal. Ils se fondent sur le prétexte de cette audience pour imaginer ce qui aurait été à l’origine de cette atteinte grave aux droits fondamentaux de leur client : « Monsieur Vamoulké était attendu au TGI dans le cadre de sa procédure de libération immédiate qui a été introduite par ses conseils compte tenu de nombreuses violations observées dans le cadre de sa procédure judiciaire. Nous avons été surpris de constater qu’il n’est pas arrivé au tribunal. Cette situation intervient quelques jours après une lettre de notre client adressée au président de la République Paul Biya. Notre client est privé depuis des années de son droit d’être jugé par un procès équitable. Il fait l’objet d’un acharnement judiciaire pour les raisons qui nous échappent », explique un avocat de Vamoulké.
Condamné le 20 décembre 2022 à 12 ans de prison pour détournement des deniers publics par le Tribunal criminel spécial, Amadou Vamoulké a décidé le 7 juin dernier d’interpeler le président de la République sur sa situation carcérale à travers une correspondance. Dans cette correspondance, l’ancien directeur général de la CRTV a interpellé le président de la République de faire usage de ses pouvoirs que lui offre la Constitution camerounaise pour que les juges du tribunal de grande instance du Mfoundi disent le droit au sujet de son affaire. Amadou Vamoulké s’appuie sur les conclusions formulées par un Groupe de travail des Nations unies sur la Détention arbitraire, ledit groupe avait recommandé aux autorités camerounaises de procéder à sa libération immédiate compte tenu des irrégularités notées dans sa procédure judiciaire. Ces experts onusiens ont recommandé aux autorités camerounaises de libérer immédiatement Amadou Vamoulké.
Depuis 2019 que ce Groupe de Travail s’est penché sur le cas de Vamoulké, les autorités camerounaises l’ont maintenu en prison. Sur l’aspect juridique, il n’est pas question que les recommandations formulées par les experts des Nations unies sur la détention arbitraire de Vamoulké ne soient pas respectées par les autorités camerounaises étant donné que le Cameroun est membre de l’Onu et les recommandations formulées par l’Onu doivent être respectées par tous les Etats membres.
Si Amadou Vamoulké a décidé d’interpeller le président de la République sur sa situation carcérale, c’est parce que le procureur de la République a fait ses réquisitions lors d’une audience devant le tribunal de grande Instance du Mfoundi dans lesquelles il évoque le « caractère prétendument politique » des conclusions formulées par le Groupe de Travail des experts onusiens sur les questions des droits de l’homme. Avec cette position prise par le ministère public, Amadou Vamoulké s’inquiète du sort qui sera réservé à sa demande et c’est pour cette raison qu’il a été interpellé le chef de l’Etat. Ce n’est pas la première fois que l’ancien Dg de la CRTV interpelle les autorités camerounaises sur sa situation carcérale.
En 2021, il avait rédigé une lettre au ministre d’Etat, ministre de la Justice, Garde des Sceaux pour dénoncer la cabale judiciaire dont il fait l’objet. L’ancien directeur affirme qu’il avait été inculpé dans le cadre de deux affaires à la suite des pressions faites aux magistrats, malgré le fait qu’aucune preuve matérielle de détournement n’avait été présentée contre lui. Plusieurs autres associations de défense des droits de l’homme ne cessent d’exiger la libération de ce journaliste considéré comme un « otage ».