Amina, une gamine de 10 ans qui nourrit toute la famille

La mendicité

Wed, 29 Nov 2023 Source: Intégration n°585 du lundi 27 novembre 2023

Le 20 novembre dernier, le Cameroun s’est joint à la communauté internationale pour commémorer la 34e édition de la journée dédiée à l’enfance dans le monde. Thème : « pour chaque enfant tous ses droits ». La célébration intervient dans un contexte fortement marqué par le travail des enfants. C’est ce que laisse entendre les statistiques fournies par la section camerounaise de l’ONG Plans international.

À l’en croire, près de 60 millions d’enfants de 5 à 17 ans sont toujours astreints au travail au Cameroun. Par « travail des enfants », entendez ensemble des activités qui privent les enfants de leur enfance, de leur potentiel et de leur dignité, et nuisent à leur scolarité, santé, développement physique et mental. Des cas sont légions. Vécu. Âgée d’à peine dix ans, Amina est déjà une grande femme, comparativement aux enfants de son âge.

Son challenge quotidien est de ramener suffisamment d’argent pour la ration alimentaire de sa famille. Contrairement à plusieurs autres rencontrées dans la ville de Yaoundé, la petite ne propose ni produits, ni services. Son argent, elle l’obtient en faisant la manche auprès des âmes de bonne volonté aux encablures de la sous-préfecture de Tsinga (Yaoundé II).

Pour y parvenir, son crédo vis-à-vis des passants et automobilistes à cet endroit est le même. « S’il te plait (tonton ou tantine, ndlr) donne quelque chose pour moi », lance-t-elle d’une petite voix. Dans ses petites mains pleines d’innocence, se trouve une petite assiette de couleur verte en matière plastique. Laquelle, complètement vide, témoigne de sa misère ambiante. Comme si elle n’a jamais perçu le moindre centime de toute sa vie.

Rendu à presque 14 heures, Amina a déjà pourtant reçu près de 3000 FCFA, nous confie-t-elle. Question: où se trouve cet argent ? Aucune réponse. Seul son petit sourire renseigne sur le caractère confidentiel de l’information. Sa méfiance cache des mauvaises expériences. En tout cas, « j’ai déjà suffisamment d’argent pour rentrer », dixit la petite Amina.

Mais elle ne cracherait pas sur un don de plus. D’ailleurs, elle n’est pas près de décrocher, après plusieurs heures passées sur les lieux. « Parfois, je gagne moins que cet argent en une journée. Et c’est parce que nous sommes nombreux ici à demander la même chose. Parfois, pour avoir de l’argent, il faut bagarrer. Parce que les plus âgés nous menacent », dixit Amina.

Même si elle sait compter les pièces et billets d’argent qu’elle reçoit au quotidien, la fillette aurait voulu aller à l’école comme la plupart des enfants de son âge. Mais si elle y va, elle ne pourra plus contribuer au bien financier de sa famille nombreuse à l’africaine. La petite ne perd pas son sourire pour autant.

Elle croit dur comme fer qu’Allah lui permettra de devenir « une grande personne », faisant allusion à ceux qui réussissent dans la société. Pour cela, elle a encore du chemin. En la regardant, le piètre des devins verraient certainement dans quelle misère vit la petite fille qui ne connaît même plus le nom de son village. Toutefois, son accent linguistique, son accoutrement révèlent son appartenance au septentrion du Cameroun.

Source: Intégration n°585 du lundi 27 novembre 2023