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Après la ligne 94, un autre projet d'infrastructures en passe de créer le scandale au Cameroun

Sans le dire ainsi, le ministère des Travaux publics est en mission de sauvetage

Mar., 5 Juil. 2022 Source: Le Jour

Les 55 ouvrages métalliques, financés sur fonds extérieurs, devaient être livrés en 2019. Face au retard accusé, le gouvernement a perdu le crédit bancaire et s’est engagé à construire 9 ponts dès cette année.

Sans le dire ainsi, le ministère des Travaux publics est en mission de sauvetage. Il faut sauver le projet d’installation des 55 ponts en sections préfabriquées modulaires en acier. Ces ouvrages sont à réaliser sur l’ensemble du territoire national pour désenclaver les bassins de production agricole.

Les biens et les personnes pourraient circuler vers les marchés. Avec des ponts qui relient des routes, la vie deviendrait meilleure dans les contrées souvent si proches et pourtant difficiles d’accès. Voilà pour ce qui est dit dans les documents.

Le projet, qui avait charrié tant d’espoirs, piétine depuis bientôt 6 ans. Lancé en octobre 2016 pour une durée de 30 mois, il devait être terminé en 2019. A ce jour, un seul pont a été installé. L’infrastructure traverse la rivière Bella sur l’itinéraire Elogbatindi- Memel 2, dans la région du Sud. Le financement que l’Etat du Cameroun avait obtenu auprès de la banque Société Générale France est aujourd’hui forclos.

La réalisation des ponts a connu un retard tel que les fonds n’ont pas été utilisés dans les délais prescrits par le Credit Agreement (Convention de crédit financier). Au mois de juin 2019, les dates d’utilisation des crédits sont arrivées à terme ; ce qui a entraîné les arrêts des travaux sur le terrain à partir d’août 2019, explique-t-on au ministère des Travaux publics (Mintp).

L’exécution des travaux avait été confiée à deux entreprises. L’Américaine Acrow Corporation Usa avait hérité d’une enveloppe de 37 272 571 dollars (environ 23,44 milliards F.Cfa), pour la fabrication de 2 096 ml (mètre linéaire) de tabliers métalliques et leur acheminement des Etats- Unis d’Amérique pour le port de Douala.

La société Ellipse Projects Sas France avait, pour sa part, gagné un marché de 34 369 012 euros (quelque 22,54 milliards F.Cfa) pour les études techniques et environnementales, la construction des accès aux ouvrages et leur raccordement, au réseau routier existant, enfin l’installation des ponts (construire les fondations et les appuis, monter et installer les tabliers, etc).

Les études techniques et d’impacts environnemental et social avaient démarré le 10 octobre 2016 et devaient durer 6 mois. Elles avaient été réalisées pour 50 ouvrages. Les cinq restants sont localisés dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest où la guerre empêche la conduite des travaux.

Par ailleurs, les études avaient révélé que les– deux financements de départ sont insuffisants pour la réalisation des 55 ponts métalliques. L’enveloppe de 37 272 541 dollars attribuée à la société Acrow Corporation ne pouvait que lui permettre de fournir des tabliers pour 44 ouvrages. Elle avait assuré cette livraison qui est aujourd’hui stockée dans les locaux du Matgenie à Douala.

Quant à l’entreprise Ellipse Projects Sas, le budget de 34 369 012 euros n’était suffisant que pourries travaux de 19 ponts. Au moment de la clôture des crédits en juin 2019, les travaux avaient commencé dans huit régions ; le Nord-Ouest et le Sud-Ouest étant en proie à la guerre. Au finish, un seul pont a été installé sur la rivière Bella sur la route Elogbatindi-Memel 2, dans la région du Sud.

Demandes de prolongation

Alors que les travaux sont à l’arrêt depuis 2019, le gouvernement est engagé dans des procédures de prolongation du délai de financement auprès de ses partenaires, à savoir la Société Générale Paris qui prête l’argent, la Société Générale Etats-Unis qui joue le rôle de facilitateur.

La liste est complétée par US Eximbank. La première procédure avait permis au Cameroun d’obtenir un avenant arrivé malheureusement un mois avant la fin de la convention de crédit le 31 décembre 2020. Le ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire (Miriépat) a formulé une nouvelle demande de prolongation pour un financement sur 18 mois supplémentaires. Au Minepat comme au Mintp, personne ne souhaite se prononcer sur l’aboutissement de la procédure en cours.

En attendant, le gouvernement du Cameroun s’est engagé à financer l’installation de 9 ponts. Il est d’ailleurs dans le Budget d’investissement public des ressources de 8,1 milliards F.Cfa pour la construction de ces ouvrages et la correction du premier achevé. Le 19 juin dernier, le ministre des Travaux publics, Emmanuel Nganou Djoumessi, a donc lancé un appel d’offres en 9 lots. Les ponts seront construits dans cinq régions : Adamaoua, Est, Centre, Sud et Ouest.

L’appel d’offres est adressé aux Pme locales, avec la possibilité pour elles de recourir à la sous-traitance, notamment pour les travaux complexes. Il s’agit par exemple du forage des pieux et du montage des tabliers. Dans tous les cas, les neuf prochains ouvrages devront être installés dans des délais variant entre 8 et 12 mois. Dès 2023, l’ensemble du projet devra reprendre vie dans le cadre des dépenses à moyen terme sur la période 2023-2025. Voilà un autre engagement pris par le gouvernement.

Liquidation

Ce 30 juin, le ministère des Travaux publics a tenu une réunion d’information avec les 11 entreprises retenues au Cameroun pour les projets de construction et de réhabilitation d’ouvrages d’art en 2022. Elles sont donc habilitées à soumissionner à l’appel d’offres du 19 juin. Le 7 mai déjà, le ministre Nganou Djoumessi avait au préalable résilié le marché passé en septembre 2016 avec Ellipse Projects Sas. Le directeur général des travaux d’infrastructures au Mintp reconnaît que l’entreprise a rencontré des contraintes dans l’exécution des travaux.

« Il est arrivé que sur certains sites de travaux, alors que, de prime abord, il était envisagé des fondations superficielles, les études géotechniques révèlent un sol incapable de supporter la charge du pont. Il devenait alors nécessaire de faire des fondations profondes. Il fallait donc du temps pour mettre à jour les dossiers pour que l’exécution des travaux se fasse conformément à la réalité du terrain. Mais le financement, qui lui n’attendait pas, est arrivé à échéance et a été désactivé », explique Benoît Parfait Mbole Mbole.

Le Dg des travaux d’infrastructures entend rassurer les entreprises locales qui étaient des sous-traitants Ellipse Projects dont le marché a été résilié. « On ne peut pas dire qu’Ellipse est partie. Elle avait une relation contractuelle avec le ministère des Travaux publics. Cette relation contractuelle a été interrompue. Tel que le prévoit les règles en la matière, la résiliation qui a été prononcée va faire l’objet d’une liquidation qui intégrera bel et bien le passif avec les différentes entités, notamment les décomptes à payer à Ellipse.

Cette entreprise a forcément des relations avec les banques. Il y a des garanties qui ont été produites par Ellipse. Celles-ci vont être exploitées pour permettre aux différents sous-traitants de rentrer dans leurs droits. La question est en train d’être gérée ; qu’ils prennent simplement leur mai en patience », explique Benoît Parfait Mbole Mbole.

Source: Le Jour
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