Argent public : Dion Ngute au cœur d'une situation étrange

PM Dion Ngute Premier ministre

Mon, 1 Dec 2025 Source: L’Indépendant n°985

Le Premier ministre a jeté un pavé dans la marre, lors de l’examen du rapport détaillé de la loi de règlement 2024. L’analyse rétrospective des dépenses budgétaires qui en résultent, donne des frissons. Des disparités flagrantes sont observées dans les différentes allocations aux régions, où le septentrion s’en trouve fortement défavorisé d’année en année.

C’est un Dion Ngute percutant devant la Commission des Finances à l’hémicycle. Observant l’augmentation continue du seuil de pauvreté, le chef du gouvernement ressort des écarts énormes dans l’allocation des ressources aux régions. Les régions septentrionales apparaissent comme les grandes exclues. En dépit de leur défit criard en infrastructures de base, d’année en année, tout le septentrion s’en tire avec des portions congrues.

Le PM s’exerce à quelques comparaisons qui glacent le sang face à l’ampleur de la prévarication : « Revisitons très honorable président, quelques secteurs pour soutenir mes propos. Je serai désolé de citer quelques unités administratives, qui malheureusement, figurent dans les annexes et c’est la réalité, en 2024. Prenons le Minddevel. Au profit d’un découpage administratif du Cameroun, a octroyé à l’Adamaoua, 4 milliards 100 millions de Fcfa. Au Nord 4 milliards 200 millions de Fcfa, à l’Extrême-Nord 7 milliards 600 millions, contre 3 milliards et demi au seul profit d’un département du Centre. Prenons l’Education de base, qui a octroyé à l’Adamaoua 1,8 milliards de Fcfa, au Nord 1,8 milliards de Fcfa, à l’Extrême-Nord 7,6 milliards de Fcfa, contre 1 milliard 300 millions, à un département du Sud, et 1 milliard 100 millions de Fcfa, à un autre département du Centre. La Commune de Djohong (située dans la région de l’Adamaoua et dans le département du Mbéré) d’où je viens, reçoit 267 millions de Fcfa par an pour son développement. Soit trois fois moins qu’une seule école témoin construite dans une ville du Centre, dont le coût est estimé à 750 millions de Fcfa. Pourtant, les régions de l’Adamaoua, du Nord, de l’Est, de l’Extrême-Nord, sont considérées comme zones d’éducation prioritaire. Le secondaire, l’Adamaoua reçoit 251 millions de Fcfa, le Nord, 349 millions de Fcfa pour le Bip, contre 2 milliards 100 millions de Fcfa au Centre. Le Bip des infrastructures montre l’Adamaoua reçoit 4 fois moins que la région du Sud et du Centre. Il y est intégré dans l’Adamaoua, la route Ngaoundéré – Garoua, et n’est concernée que par 48 kilomètres sur 278 kilomètres ».

Cette sortie de Dion Ngute a surpris plus d’un. Après l’audit du fonds routier, le PM est dans une posture volontariste de lutte contre la gabegie organisée. Ces allocations destinées aux régions, révèlent au grand jour, des distorsions flagrantes dans la répartition des fruits de la croissance. Le Grand-Nord dont une partie est aujourd’hui sinistrée par la secte Boko Haram et les catastrophes naturelles, reçoit des allocations pour le moins insultantes au regard des fonds allouées à certaines localités du Centre et du Sud sur des logiques nombrilistes.

Forfaiture suprême, ces fonds redistribués à la tête du client, ne sont pas suivis d’investissements papables. D’où cette pauvreté toujours rampante sous les coups de boutoir du tribalisme d’une corruption échevelée, de l’affairisme et du népotisme. Une minorité de prédateurs ont sombré armes et bagages dans l’accumulation compulsive au détriment de la majorité qui croupit dans une misère abyssale.

Le Budget d’investissement public (BIP) continue d’être croqué à qui mieux mieux. Ils rivalisent dans la crapulerie et tous ces crimes impunis. Le PM exprime un ras-le-bol et un besoin de justice sociale. Mais ne prêche-t-il pas dans le désert ?

Source: L’Indépendant n°985