Art de tromper : voici le maître de Paul Biya

Biya aura puisé l'art de la dissimulation et la ruse en politique chez Corneille. Corneille jouait et régnait sur la scène française. Biya est le héros central de la dramaturgie politique camerounaise. L'auteur du Cid (1636), d'Horace (1640), de Cinna (1642), de Rodogune (1644) est l'un des maîtres de la comédie française, et celui de la mise en scène et des costumes.

C'est lui qui permet à Biya de dissimuler son ambition de 1962 à 1982. En trompant ses collègues de la scène politique, Corneille reste le maître de Biya dans l'art de tromper les autres sans se tromper soi-même. C'est en jouant une fiction de Corneille que Biya a feint de se désintéresser du pouvoir et d'être le dernier à vouloir succéder à Ahidjo.

Dans la tragédie cornélienne, on retrouve sans arrêt l'embarras des personnages soumis à des choix certes régaliens, mais très souvent au-dessus de leur entendement. Corneille soumet l'homme au dilemme. Biya sait choisir, vite, s'il le faut. Cependant, il sait aussi hésiter comme le héros cornélien. Corneille, élève des jésuites, se présente tout au long de son cursus académique comme un élève zélé et un étudiant brillant.

Auteur souvent insaisissable, il a permis la mystification de ses personnages. La soif de gloire qu'on identifie aux personnages de Pierre Corneille apparaît chez Biya peut-être avec plus de nuance. Cependant au contraire de l'exaltation de la gloire, la réussite politique pour Biya est réaliste et pragmatique.

Enfin, Biya doit à Pierre Corneille l'art de la rhétorique et de l'éloquence verbale. A ce titre Biya est classé parmi les successeurs de l'auteur de Nicodème (1651) que sont Ritrou (1601-1650) et Quinault (635-1688). Biya parle peu mais parle bien. A la nation comme en privé, il n'est pas prolixe, mais veut parler utile.