C'est ainsi que riverains, autochtones et autres moto taximen appellent désormais le lien de la macabre découverte qui fit pleurer tant de monde, au matin du 22 janvier dernier.
Le village Ebogo 3, situé à quelques de Soa, était jusque-là un petit coin paisible, qui attendait d'entrer dans la plénitude du processus d'urbanisation, lié à l'explosion démographique et aux tentacules d'une cité capitale qui sans cesse repousse ses frontières. Mais il a fallu que le corps de Martinez Zogo y soit déposé pour que la vie de ses habitants s'en retrouve transformée « maintenant, les gens qui viennent faire leurs champs chez nous parlent de venir à "Elig-Zogo", il n'est plus question d'Ebogo. Les moto-taximen et même certains de nos frères se prêtent à cet horrible jeu » déclare Mbida Ambassa, autochtone de la zone avant de poursuivre « en langue Beti le terme "Elig" renvoie à tout ce qu'on peut retrouver à un endroit précis et qui appartenait à un défunt. Ceci englobe famille, maisons, plantations et toutes sortes de biens. Admettons que le corps de Martinez Zogo ait été retrouvé ici, est-ce que c'est une raison suffisante pour rebaptiser notre village "Elig-Zogo" ? Je ne pense pas, puisque Martinez n'était pas d'ici, c'était un Manguissa » , proteste-t-il. Ce qu'oublie cependant cet autochtone, est que plusieurs localités ont été rebaptisées de la sorte, à l'instar d'un village situé aux environs de Nkol-Afamba, dans le département de la mefou et Afamba. En effet, un hélicoptère y était tombé avec à son bord plusieurs passagers qui, malheureusement, avaient tous rendu l'âme. Les villageois les avaient alors enterrés sur place, non loin des décombres de l'hélicoptère. Sur leur tombe, ils y avaient posé l'hélice de l'appareil et, du coup, le village fut rebaptise "hélice-avion'" "hélice-avion".
Voyant arriver à grandes enjambées le processus d'urbanisation, plusieurs propriétaires ont procédé au défrichage, à l'abattage des arbres, et au morcellement de leurs parcelles en vue d'une éventuelle vente. Mais certains d'entre eux déclarent éprouver d'énormes difficultés à trouver des acheteurs, « avec la dépouille de Martinez Zogo qu'on est venu déposer chez nous, cela ne nous attire plus tellement des investisseurs. Et puis on peut encore voir à l'heure actuelle le ruban de sécurité laissé par les forces de maintien de l'ordre, et, surtout tous les objets utilisés par les chefs de la Lékié qui étaient venus faire des rites à cet endroit, dont le fameux tissu rouge, des bouteilles, et des briquettes vides de vin rouge. Vraiment, nous ne savons pas quoi faire, nous avons même rencontré le chef de village pour qu'il nous aide à faire venir un prêtre ici pour sanctifier cet endroit... En tout cas, dès que les assassins de Martinez seront définitivement démasqués, nous déposerons à notre tour une plainte contre eux, car ils sont venus souiller et profaner notre terrain avec un cadavre qui ne nous concerne pas. Ce n'est pas un cimetière ici que je sache» , confie l'un d'eux.
Dans le sillage des activités liées à immortaliser l'œuvre de Martinez Zogo, les jeunes de l'arrondissement de Yaoundé 5eme, et notamment ceux vivant aux alentours de l'école annexe d'Essos, ont décidé de rebaptiser le tournoi de vacances qui se déroule chaque année sur la cour de ladite école "Super Coupe Martinez Zogo", en mémoire d'un aîné du quartier qui a su faire de son micro, bien plus qu'un outil de travail, une arme fatale. Ses jeunes frères du quartier Essos projettent ainsi de lui rendre une série d'hommages dignes de son rang « dès que les coupables seront écroués » précisent-ils.