Les populations expropriées lors de la construction du grand barrage hydroélectrique de Lom Pangar, à plus de 400 km de Yaoundé, attendent toujours d’être indemnisées. Pour l’heure, elles sont confrontées à la précarité, la misère et la faim.
Dans ces villages, le providentiel projet du barrage hydroélectrique s’est transformé en cauchemar.
“Lom Pangar new look” est le nom d’un nouveau village de la région de l’Est du Cameroun.
Créé en 2012, il abrite les populations expropriées lors de la construction du barrage hydroélectrique de Lom Pangar.
Les habitants expropriés étaient pour la plupart des chasseurs, des orpailleurs ou des pêcheurs.
Dans leur nouveau village, perché sur une colline, il n’y a ni électricité, ni route praticable, encore moins de l’eau potable.
“C’est comme vous voyez là, on vit dans les ténèbres, on est abandonné comme ça et les gens sont en train de partir, le village est en train de mourir”, se lamente Justine, mère d’une famille résidente de ce village.
Une dizaine de décès ont été enregistrés dans les 57 ménages qui constituent le village, affirment les populations.
Certains résidents du village Lom-Pangar new look ont bradé leurs maisons de relocalisation.
“Les gens n’entrent pas ici. Pour vendre nos vivres, il faut les porter sur la tête, jusqu’à Ndedeng. On dirait que nous sommes des animaux, qu’on a pris et qu’on est venu jeter comme ça là. C’est comme ça qu’on vit maintenant”, raconte Justine qui, elle, dit être restée ici par dépit.
Ouami est un autre village de la région de l’Est. 48 chefs de famille ont été installés ici, après leur expropriation au pied de la rivière Lom-Pangar, pour cause d’utilité publique.
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“Je fais partie d’un campement qui a été déplacé. C’était prévu qu’on devait nous recaser et nous indemniser. Finalement, on nous emmène ici, on nous abandonne. Pas de paiement, pas de recasement, c’est chacun pour soi, Dieu pour tous”, explique à VOA Afrique Marcel Tassara, l’un de ces chefs de famille. Il a six enfants à charge. Tous vivent dans la précarité.
L’évocation du processus d’indemnisation au village Ouami fait couler beaucoup de salive. Chacun égrène son lot de frustration.
“Parmi les 48 personnes, ils ont sollicité 13 personnes à qui ils ont donné une somme comme vous voyez. Ça, c’est le bordereau de paiement. On ne sait sur quelle base on les a payées et pas nous”, se plaint Marcel Tassara.
“J’attendais qu’on me paye 14 millions, cet argent a été détourné. Je me suis retrouvé avec 2 millions. Mes 12 millions sont bloqués”, ajoute Martin Sedako, un autre résident du village Ouami.
“Pourquoi on a bloqué mon argent ? “, s’enquiert Martin Sedako, vieil homme qui fond en larmes et marmotte quelques autres mots incompréhensibles par souffrance.
“Quelle que soit la manière dont nous vivons, voici l’eau du barrage qui est déjà à côté de nous. Pas un moindre bout de terrain pour cultiver, c’est dangereux”.
Les habitants des villages de Lom 1, Ndeng Ndeng, Ouami ou Kambo- kassi, tous créés par la société Electricity Development Corporation (EDC) en charge de la construction du barrage hydroélectrique de Lom- Pangar, parlent tous, des promesses non tenues de l’Etat.
Néanmoins, quelques infrastructures à l’actif d’EDC existent dans ces 4 villages. Des salles de classe, des cases de santé, quelques rares maisons modernes, ou encore des hangars pour le marché.
La direction générale d’EDC a annoncé, en mai dernier, un plan de développement local du projet hydroélectrique de Lom Pangar.
Elle a promis que 164 infrastructures seront opérationnelles d’ici la fin de l’année 2018 dans les cinq arrondissements de la région de l’Est.