Ministre d’Etat, Secrétaire général de la présidence de la République depuis 2011, (un record dans l’histoire de ce poste), il est l’homme de confiance du Chef de l’Etat. Parfois insaisissable, très discret mais omniprésent dans la prise des grandes décisions par son sphinx de patron, le natif de la Haute-Sanaga s’affiche désormais comme un pare-balle face aux attaques et aux batailles fratricides dans la course vers la succession au trône. La nouvelle a eu l’effet d’une bombe dans le sérail comme au sein de l’opinion publique.
La décision du président de la République de décerner des médailles à 44 camerounais représentant diverses administrations dans les équipes chargées de piloter au quotidien la préparation et le déroulement de la Coupe d’Afrique féminine en 2016, la Can 2021 ainsi que la gestion de l'épidémie du Covid-19.
Entre médailles de l'Ordre national de la valeur et de l'Ordre du mérite camerounais, Ferdinand Ngoh Ngoh qui en a reçu l’instruction du Chef de l’Etat, s’est exécuté au cours d’une cérémonie le 06 octobre dernier. Si les images et les vidéos de cette brève cérémonie ont provoqué l’ire de certains camerounais et même de quelques pontes du régime, il reste vrai que la symbolique de cet acte s’inscrit dans la volonté de Paul Biya, de saluer les efforts consentis par ces hommes et femmes qui ont « relevé les défis innombrables auxquels notre pays était confronté (…) malgré les critiques et les calomnies », pour reprendre Ngoh Ngoh dans son discours de circonstance. Loin de la résonnance et des interprétations diverses collées à cette sortie qu’on sait rare du Minetat/Sgpr, ce nouvel épisode est venu remettre au gout du jour, les interrogations autour de la place et du rôle que joue celui qu’on surnomme le « vice-dieu » dans la galaxie Biya.
BLOCAGES ET GOULOT D’ETRANGLEMENT
Désigné en octobre 2021 par le président de la République, régulièrement informé des remises en cause permanentes de la capacité du Cameroun à organiser la Can, le ministre d’Etat/Sgpr, avait reçu pour instructions de tordre le cou aux goulots d’étranglements, aux blocages à n’en plus finir et les conflits d’intérêt nés dans la plupart des chantiers de construction des infrastructures sportives. En mission donc pour « s’assurer que les infrastructures construites répondaient au cahier de charge défini par la Confédération africaine de football (Caf) ; rassurer les autorités de la Caf, de la Fédération internationale de football association (Fifa), la communauté nationale et internationale, de la disponibilité effective de toutes les infrastructures retenues pour la Can 2021 », l’homme avait réussi à désamorcer la bombe liées aux décisions tardives, aux déblocages financiers retardés, aux contrats offerts de gré à gré aux entrepreneurs sans aucune compétence ou sans présence locale avérée. C’est d’ailleurs aux fameuses Task force dont la gestion lui a été confiée, qu’on doit, apprend-on, le succès retentissant des Can mais aussi la maitrise de la gestion de la crise à Covid-19 au Cameroun.
Ngoh Ngoh qui occupe depuis fin 2011 le fauteuil de Secrétaire général de la présidence, n’est-il pas victime d’une certaine chronique qui fait répandre depuis ces dernières années sur les réseaux sociaux, une volonté́ de puissance de ce proche collaborateur du chef de l’Etat qui développerait des élans pouvoiristes avec une ambition supposée de mettre en minorité́ l’homme lion ? C’est en tout cas ce que certains apparatchiks du régime soutiennent depuis que la course effrénée vers la succession à Etoudi se fait ressentir dans le sérail. Accusé d’utiliser l’expression « sous hautes instructions du Chef de l’Etat », pour assouvir une idée de conquête du pouvoir suprême et d’isolation de l’actuel titulaire du poste, l’homme qu’on dit pourtant sans ambition pour le trône, est au centre de toutes les batailles ourdies contre le Chef de l’Etat.
DEVENIR IMPOPULAIRE POUR PROTEGER BIYA
Dans son entourage, il se susurre qu’« il a choisi de devenir impopulaire pour servir et protéger Paul Biya. Surtout en cette période où le Chef de l'Etat au regard de son âge et de sa stature, ne peut plus faire certaines choses. Ngoh Ngoh est une sorte de pare-balle ». Mieux, contrairement à ses prédécesseurs à ce poste (face auxquels Biya avait de la méfiance), Ngoh Ngoh jouirait aujourd’hui de toute la confiance du Prince.
Les cas Marafa et Atangana Mebara font école. De cadre au ministère des Relations extérieures avant d’être détaché au Cabinet civil de la présidence de la République du Cameroun de 1997 à 1998, en passant par la Mission permanente du Cameroun auprès des Nations Unies de 2002 à 2006, puis Secrétaire général du Minrex, le parcours de celui qu’on surnomme « l’homme à la punk » est, à en croire certains caciques, un exemple de trajectoire politique. « Il est d’une grande intelligence opérationnelle », dit de lui un ancien ministre délégué à la présidence de la République. Sa désignation comme Sgpr en 2011, renseigne notre source, était le souhait du président, car elle obéissait à une stratégie consistant à rajeunir l’entourage du chef de l’Etat afin de rendre plus dynamique les services de la présidence.
Depuis lors, « l’homme clé de Biya prend des coups et se mouille pour protéger son mentor ». En témoigne par exemple la guerre froide entre le Minetat/Sgpr et le ministre Directeur du Cabinet civil de la présidence de la République que certaines officines ont voulu brandir au sein de l’opinion, pour justifier un certain malaise à Etoudi. Plusieurs fois accusé de malversations financières ayant entourées la gestion des fonds pharaoniques alloués à certaines affaires de souveraineté qui ont secoué le landernau politique, Ngoh Ngoh, est jusque-là, resté imperturbable, malgré la clameur populaire et les manœuvres dans l’ombre de certains candidats cagoulés qui rêvent de diriger le pays après-Biya. Quid du remaniement ministériel longtemps annoncé et attendu ? De sources concordantes renseignent que l’homme est dans l’attente tout comme les autres membres du gouvernement en poste. Seul Biya, maitre des horloges, connait le jour et l’heure !