Arrêté à son domicile en septembre 2020, Olivier Bibou Nissack est jeté à la prison centrale de Kondengui où il purge 7 ans de prison avec d’autres de ses camarades du MRC. Ils sont condamnés par un tribunal militaire pour « révolution, rébellion, attroupement en coaction et en complicité ». Le porte-parole de Maurice Kamto nouvellement marié fut alors contraint d’abandonner sa femme enceinte.
C’est ainsi que Bibou Nissack n’assistera pas à la naissance de sa fille. Cet évènement important dans la vie de tout père, le cadre du MRC ne l’as pas connu. Et pourtant il garde un lien fort avec sa fille. Jeudi, lors de l’audience en appel à la cour d’appel du Centre, la famille Nissack s’est à nouveau réunie, le temps des salutations. La petite fille toute heureuse de retrouver son père s’amusait avec celui-ci dans la salle d’audience, toute innocente. La scène immortalisée fait le tour des réseaux sociaux et fend le cœur de plusieurs internautes qui demandent la libération de Bibou Nissack qui comme le pr Alain Fogue n’avait pas participé à la marche projetée par le MRC.
CamerounWeb vous propose l’intégralité de la lettre de l’épouse de Bibou Nissack
Monsieur Bibou Nissack Olivier U. mon époux, est désormais illégalement et abusivement condamné à une peine politique de 7 ans de prison ferme par le Tribunal Militaire de Yaoundé. Cette décision, nullement justifiée en droit et au plan judiciaire, est venue clôturer une série inique entamée par l’arrestation et la détention arbitraires de mon mari plus d'un an avant.
Monsieur Bibou Nissack mon époux a en effet été enlevé de notre domicile familial de façon extrajudiciaire, aucun mandat ne lui ayant été brandi, et sous mes yeux alors que j’étais enceinte, le 22 Septembre 2020 en début d’après-midi. Il sera conduit sous bonne escorte par le Commissaire divisionnaire de Police Mendouga et ses hommes, pour soi-disant une rencontre ordonnée instamment par M. Martin Mbarga Nguélé, Délégué Général à la Sûreté Nationale(DGSN) du Cameroun, patron d’un service directement rattaché à la Présidence de la République camerounaise.
Contrairement à ce annoncé de façon mensongère par le Commissaire divisionnaire Mendouga, mon mari ne sera pas conduit au DGSN, mais va d’abord séjourner durant 03 jours dans une cellule infecte et surpeuplée de la Division Régionale de la Police Judiciaire du Centre (DRPJ-C), avant d’être transféré au Service Central de Recherches Judiciaire (SCRJ) du Secrétariat d'État à la Défense (SED) en charge de la Gendarmerie Nationale. Dans ce dernier lieu, il sera détenu à l’isolement total et complet en cellule du 24 septembre au 3 novembre 2020. En prime il sera strictement et systématiquement privé de lecture, de moyens d’information, et même du simple nécessaire pour écrire.
À l'occasion, les reproches faits à mon mari et qui vont motiver les abus extrajudiciaires nombreux et incessants dont il est la cible depuis lors, sont principalement sa loyauté infaillible à son leader politique et le refus obstiné de trahir ce dernier envers et contre tout. Accessoirement, il est reproché à mon mari sa sincère détermination dans la cause nationale défendue et la trop grande efficacité de son travail en la matière. Le crime de la compétence et du talent donc ! Faut-il qu’au Cameroun seule prospère la médiocrité ?? Mon mari est le symbole indiscutable d’une certaine excellence Camerounaise ! Un Label, une marque de fabrique, un sceau de celle-ci en soi. Ailleurs dans le monde il serait plutôt un objet de protection, voire de promotion et de sauvegarde. Il est honteux, pour notre Pays bien-aimé le Cameroun, que nous renvoyions au monde un tel spectacle du piétinement de notre génie lorsqu’il se manifeste au travers de personnes comme Bibou Nissack mon époux.
Il est de toutes les façons particulièrement grotesque, totalement illégal, injuste et arbitraire, de faire condamner quelqu’un à 7 ans d’emprisonnement ferme sur le motif qu’il a exprimé ses opinions et voulu user de ses droits et libertés tels que garantis par la Constitution Camerounaise, en vue de masquer grossièrement un règlement de compte politique.
Le caractère illégal de son injuste peine de prison s’illustre encore avec plus de clarté dans le fait que les Libertés et Droits exercés par mon époux, ayant supposément motivé le jugement militaire, sont de surcroît inscrits dans nombre d’instruments du Droit international dont l’État Camerounais est partie prenante. Tout comme l’impossibilité pour un civil, qui plus est un opérateur politique notoire agissant comme tel, d’être jugé par un Tribunal Militaire est elle aussi consacrée par la législation et la Constitution camerounaises, de même que nombre de conventions Internationales ratifiées dûment par le Cameroun.
Puisque la vengeance politique ne peut prendre la société camerounaise entière en otage, et la conduire vers la consécration des dérives arbitraires d’une justice qui dysfonctionne en créant des iniquités au lieu de les réparer, nous devons mutuellement faire entendre raison aux esprits et aux consciences des uns et des autres. D’où la présente initiative.
Alors que mon mari ne s’est montré l'auteur d’aucun crime ni d’aucun délit ou contravention, il est totalement inacceptable que le digne époux et père de famille qu’il est soit soustrait à ses enfants et à moi son épouse du simple fait de la vengeance et de la rivalité politiques. D'ailleurs quelles valeurs au jute défendent ceux qui pour faire taire un rival ou un adversaire politique décident de tenter déconstruire sa base familiale ? Quand on sait ce que symbolise la famille dans la société camerounaise et ses valeurs profondes sinon ancestrales, que dire d’une telle immorale petitesse et sournoise bassesse politicienne ?
Quelle journée que celle du 22 Septembre 2020 ! Notre domicile encerclé par des nuées de policiers, notre rue bouclée par les mêmes. Des véhicules de la police partout parmi lesquels un véhicule blindé de couleur bleue. En renforts de ce dispositif déjà inutilement impressionnant, la présence d'environ une quinzaine de policiers antiémeutes munis de tout leur équipement. C’est d’ailleurs d’une partie de leur matériel antiémeute, boucliers, casques lourds noirs et matraques, dont ils vont se servir pour dresser une barricade obstruant l’accès de la rue en impasse menant à notre domicile. L’arrivée de celui qui dirigeait cette ‘’opération’’ de police, le Commissaire divisionnaire Mendouga qui va en premier lieu verbalement notifier à mon mari sa mise en résidence surveillée et son interdiction de sortir.
Mon mari avait donc raison de dormir littéralement habillé normalement durant ces jours de septembre 2020. Il m’avait justifié son accoutrement en me disant qu'il ne fallait pas qu’au moment de son arrestation, qu'on le trouve en petite tenue, car cela pourrait être un spectacle dégradant et indigne pour nos enfants.
Nos enfants ! Les premiers, y compris avant moi, avec qui il a discuté de la ‘’certitude'' de son arrestation durant une réunion improvisée avec eux des jours avant que cette arrestation n’intervienne. Mon mari ayant résisté à toutes les pressions imaginables pour quitter son bord politique et lâcher son leader ; mon mari ayant refusé net les offres financières, celles matérielles et promotionnelles ou professionnelles les plus alléchantes proposées en vue de motiver cette trahison absolument inimaginable pour lui, il était clair dans l'esprit de mon mari que la seule option encore entre les mains de ceux qui tentaient en vain de le retourner était son arrestation voire son emprisonnement. Aussi expliqua-t-il aux enfants le fait que le pouvoir ne supportant pas que la liberté d’expression se traduise en faits et gestes pacifistes concrets pouvant montrer aux yeux du monde son impopularité, sa seule réaction prévisible serait bêtement la répression aveugle y compris par des arrestations de personnes comme lui leur papa. Cette précaution prise avec les enfants est pour beaucoup dans le courage et la force admirables dont ils font montre depuis l’arrestation et l’emprisonnement injustes de leur père. Ils y ont été préparés, et leur maman que je suis davantage encore.
Bibou Nissack mon mari a donc eu raison, et de toutes les façons, les ultimes intimidations ou pressions et invitations à se mettre à l’abri, ou à dealer enfin avec le pouvoir n’y auront rien fait ! Il me dira un jour ‘’chérie je ne vais pas vivre en clandestinité dans mon propre Pays parce que j’envisage de marcher pacifiquement ! Je ne me cacherai pas, je n’abandonnerai pas mon domicile. Ce n’est pas un crime que de vouloir marcher en paix''.
J’ai toujours su que mon mari représentait une menace pour ceux qui oppriment les citoyens Camerounais. Cependant je ne me doutais pas qu’il inspirait à ces personnes, en outre des adversaires politiques, une telle terreur ! Au point pour ceux-ci, de mettre sur pieds une véritable armada en vue de procéder à son enlèvement illégal à domicile. Mais après réflexion, je me dois de dire que ce dispositif m’était déjà familier d’une certaine façon, car similaire à celui déployé, sans succès, pour empêcher que mon époux et moi puissions nous marier quelques semaines déjà avant.
Durant son séjour au SED en particulier, tous les moyens furent mis à profit pour me dissuader de venir apporter mon assistance et mon réconfort à Bibou Nissack mon mari. Ce fût un échec, car rien au monde ne pouvait m’empêcher de le faire. Comment oublier la bataille quotidienne qu’a été la remise quotidienne de ses repas et les visites trop brèves ? Les inexplicables longues attentes systématiques debout, pour une femme enceinte, à l’entrée de ce camp militaire devant des gendarmes en faction insensibles, avant d’être autorisée à entrer pour ne voir mon époux qu'une poignée de minutes seulement. Comment comprendre que mon statut de femme enceinte ne soit pas pris en compte dans un service public, alors que le principe veut en la matière que les personnes âgées, celles handicapées, et les femmes enceintes soient prioritaires ?
Un jour où je visitais mon mari au camp militaire du SED, nous avions eu droit en tout et pour tout à 9 minutes chrono accordées pour la durée de la visite. Les autres fois encore, les communications entre mon mari et moi durant ma visite quotidienne au SED se faisaient entourées d’une cohorte de gendarmes, alors que le site est suffisamment truffé de caméras de surveillance. Certains parmi ces hommes avaient même parfois l’indécence de se mêler à notre conversation conjugale sans la moindre gêne. Bref tout a été fait pour que mon mari se retrouve esseulé et que je sois découragée de lui apporter mon réconfort et ma présence durant un temps de communication injustement bref. J’ai fait échouer ce projet.
Je repense à cette visite au Camp militaire du SED, en compagnie de notre fils, durant laquelle cet innocent enfant inoffensif et adorable fit l’objet d'une fouille sur le corps avec palpations de ses parties intimes par un adulte. C’est la fois et le geste qui poussèrent mon mari à la décision de tenir dorénavant éloignés de cet endroit malsain du SED nos enfants. Cette routine de la ‘’fouille’’ fût instaurée après des ‘’lettres ouvertes’’ publiées par mon mari. Cette fouille des personnes en visite et des objets entrants ou sortants, avait pour but soi-disant de s’assurer, comme le dit un jour à mon mari un gendarme en charge de ce travail honteux, qu’aucun 《objet compromettant du genre stylo ou papier》 ne soit transmis à mon époux. Il est vrai que d’une certaine façon l’encre et le papier sont en réalité de véritables armes de défense des opprimés entre les mains de mon époux. Je pense aussi à cette fois où en fouillant le linge usagé de mon époux que je devais ramener chez nous, des petits bouts de papier retrouvés dans ses poches suscitèrent une soudaine et incroyable agitation chez les gendarmes en charge de la fouille. Ils se précipitèrent aussitôt dans le bureau du chef d’escadron Bialo, le commandant du Service Central afin de lui montrer leur précieuse trouvaille. Tout ça était à la réalité parfaitement ridicule.
Il importe en toute honnêteté de dire malgré tout que durant le séjour illégal et arbitraire de mon époux au SED, des patriotes en service en ce lieu ont aussi trouvé de rares fois l’occasion de faciliter le déroulement de mes visites et donné occasionnellement figure humaine à mes séjours en ce lieu de privation de liberté mais aussi de certains Droits fondamentaux.
Plus tard, lorsque mon mari aura été placé en détention provisoire par le Tribunal Militaire à la Prison Centrale de Kondengui à Yaoundé, le Camp militaire dans l’enceinte duquel est situé le Tribunal va se substituer à celui du SED. Je devais y aller, toujours enceinte, pour d’incessantes allées et venues, afin de me voir délivrer mensuellement, non sans tracasseries, un permis de communiquer avec mon mari. Sans jamais comprendre pourquoi il n’était pas possible d’en obtenir un seul qui corresponde à la durée moyenne de la détention provisoire, à savoir 6 mois.
Si j’ai pris le temps de lever une petite partie du voile recouvrant les événements décris plus haut, c’est pour que les uns et les autres sachent quelle illégale machine à broyer dénuée d’humanisme et d’humanité opère en toute impunité au Cameroun, et ceci au cœur même d’institutions pourtant chargées de sauvegarder la loi et l’ordre. On ne sait donc plus très bien si il faut rire ou pleurer quand on voit sur les plateaux médiatiques certaines indignes personnes, partisanes de l’arbitraire aveugle, vouloir justifier tout et n’importe quoi pour satisfaire les pulsions sadiques de leurs commanditaires.
L’arbitraire n’a ni ami, ni épouse, ni sœur, ni frère, ni père, ni mère, que chacun le sache. Ceux et celles qui défendent cet arbitraire aujourd’hui pourraient figurer demain en bonne place sur son menu du jour. L'arbitraire doit donc être dénoncé et combattu partout où il se manifeste, indépendamment du bord politique de celui qui en est la cible. D’où la campagne présentement initiée par la mise sur pieds de ‘’Free Bibou Nissack Movement/Mouvement Libérez Bibou Nissack
#FreeAllPrisonersOfConscience #LibérezTousLesPrisonniersDeConscience''. Il faut dire que pas plus que dans les services de la police, ou ceux de la gendarmerie comme je l’ai expérimenté de mes propres yeux et parfois sur ma personne même, la haine et la méchanceté contre un individu ou un groupe ne peuvent pas être les seuls ingrédients qui constituent la sauce de la justice.
Bibou Nissack mon époux est la cible d’une injustice et de l’arbitraire, ainsi en est-il d’ailleurs de toutes les personnes condamnées en même temps que lui, voire antérieurement ou ultérieurement. Le présent mouvement est le fruit d'une initiative personnelle privée, voire familiale. Cette initiative est complémentaire et vise à élargir au plan social le formidable travail partisan déjà entrepris par d’autres de façon générale.
‘’Free Bibou Nissack Movement'' n’a donc pas vocation à entrer en concurrence avec les initiatives antérieurement existantes, mais vient plutôt les compléter. Ces initiatives déjà existantes, sont pour l’essentiel marquées par une prédominance de la dimension politique du noble engagement partisan de mon époux. Cependant, au-delà de son engagement politique, mon époux est avant tout et d’abord, un père attentionné, un mari aimant, un entrepreneur, un voisin, un employeur, un citoyen exemplaire, en bref une personnalité pluridimensionnelle. Par conséquent, l'emprisonnement injustifié en droit dont mon mari fait l'objet porte également préjudice à de nombreuses personnes non engagées avec lui sur le plan politique, mais ayant pourtant en commun avec lui l’une des dimensions évoquées plus haut. Cette initiative est donc celle de tous ceux et celles qui choqués par la décision rendue par le tribunal militaire de Yaoundé à l’encontre de mon époux, sont désireux de se manifester en solidarité et en soutien durant ces temps troublés.
Le présent mouvement comme moyens d’actions privilégie le lobbying, le plaidoyer, des actions de communication, et la mise en relation de ceux et celles désireux de partager leur considération à l’égard de mon époux, voire de toute autre personne détenue dans des circonstances similaires à celles de mon époux. Le cas de mon époux ne doit en effet pas occulter le sort identique subit par de nombreux autres de ses camarades et compagnons de parti politique ou non, tous eux aussi objets de l’arbitraire. Formons dès à présent cette communauté qui se donne du courage et se motive mutuellement durant le temps que dure cette épreuve injuste tout en œuvrant avec détermination à son interruption.
Bibou Nissack, cet homme unique et sans égal, dont le regard seul me met encore et toujours dans un émoi sans pareil. Cet homme que j’aime à en devenir folle. Ce symbole de courage, de bravoure, de dignité et de don de soi. Cet aventurier sans cesse en lutte contre l’injustice, l’oppression, et leurs manifestations multiples. Ce serviteur véritable de l’intérêt général, qui malgré un emprisonnement injuste garde entière une exceptionnelle détermination. Lui l’habituelle et traditionnelle voix des sans voix, soyons pour cette fois-ci les propres Bibou Nissack de Bibou Nissack ! Oui soyons sa voix ! Et pour tous ceux dans sa situation, soyons leurs voix ! Qu’il en soit ainsi, car cette campagne au-delà de la seule personne de monsieur Bibou Nissack mon époux, vaut aussi en réalité pour tous ceux et celles qui se retrouvent aujourd’hui éloignés arbitrairement de leurs familles et de leurs proches, et ainsi prisonniers de conscience emprisonnés pour leur engagement politique ou pour avoir librement eexprimé des opinions jugées dissidentes.
Témoignez votre solidarité et amplifiez-en la résonnance en œuvrant ici avec nous, ou dans le cadre des initiatives déjà existantes, voire œuvrez à leur accroissement. Nous ne serons jamais de trop à porter cette cause, et toutes les initiatives œuvrant dans ce sens sont les bienvenues. Aussi cette plate-forme se veut-elle aussi un espace de partage d’expériences et d’enseignements issus de ces situations injustes rencontrées par mon époux ou tout autre détenu d'opinion Camerounais, qu’elles proviennent des proches ou de personnes anonymes. Elle est aussi une zone d’expression de l’affection et de l’attachement via des messages conçus et diffusés sur la page Facebook dédiée.
Contribuez d’ores et déjà à cette campagne par l’utilisation systématique sur vos publications en réseaux sociaux des hashtag #FreeBibouNissackMovement, #FBNM, #MouvementLibérezBibouNissack, #MLBN, #FreeAllPrisonersOfConscience, #LibérezTousLesPrisonniersDeConscience.
Rejoignez également notre communauté en vous abonnant à notre page Facebook https://www.facebook.com/111243288100995/posts/114183121140345/ ou en écrivant à l’adresse Email freebibounissackmovement2022@gmail.com ou encore sur WhatsApp au numéro (+237) 6 94 22 76 76.