Selon les informations de Jeune Afrique relayées par le courrier du Cameroun, pour avoir fait écrire dans Cameroon Tribune que Paul Biya avait « signé la fin » du conflit opposant la Fédération camerounaise de football au ministère des Sports, la directrice de publication du quotidien a été sommée d’expliquer ce choix et se retrouve dans le collimateur de Ferdinand Ngoh Ngoh. Elle risque un licenciement pour faute lourde.
Et si Marie-Claire Nnana était remplacée ? L’actuelle directrice générale de la Société de presse et d’éditions du Cameroun (Sopecam), l’entité éditrice du quotidien à capitaux publics Cameroon Tribune, est dans le collimateur du secrétaire général de la présidence, Ferdinand Ngoh Ngoh. En effet, un conseil d’administration extraordinaire serait en préparation au secrétariat général de la présidence avec, à l’ordre du jour, le limogeage et le remplacement de la journaliste formée à l’École supérieure de journalisme de Lille, en France, et qui dirige l’entreprise depuis plus de vingt ans. Contacté par Jeune Afrique, Joseph Lé, président du Conseil d’administration et, par ailleurs, ministre de la Fonction publique, dit n’avoir pas encore été saisi d’un tel projet.
Au ministère de la Communication – tutelle administrative de l’entreprise –, son collègue René Emmanuel Sadi admet avoir entendu des rumeurs mais dit ne pas en savoir plus. Dans la pratique administrative camerounaise, les conseils d’administration des entreprises publiques sont convoqués par le secrétariat général de la présidence la veille pour le lendemain et les administrateurs sont chargés de promouvoir un candidat dont le nom leur est communiqué séance tenante par courrier.
Deux remplaçants déjà évoqués
Dans cette perspective, deux noms sont évoqués au palais d’Etoudi pour succéder à la journaliste en disgrâce. Le premier postulant est Félix Zogo, inspecteur général au ministère de la Communication, enseignant à l’École des Sciences et techniques de la Communication de Yaoundé (Esstic). Le second est Christophe Mien Zok, un ancien journaliste de Cameroon Tribune devenu directeur des organes de presse du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC, au pouvoir). Il édite un journal, L’Action, dont l’éditorial du 29 mai a été très remarqué. Mien Zock y estimait que l’affaire opposant Samuel Eto’o au ministère des Sports méritait « un traitement politique d’extrême urgence », au même titre que la crise anglophone ou le saccage des ambassades du Cameroun en Europe…
Le conflit autour du staff technique des Lions indomptables semble aussi être à l’origine de l’emballement qui pourrait rapidement mener à l’éviction de MarieClaire Nnana, fautive d’avoir publié dans Cameroon Tribune, le 31 mai, un dossier faisant état de l’arbitrage du président Paul Biya en vue de mettre un terme au bras de fer entre la Fédération camerounaise de football (Fecafoot) et le gouvernement et le ministère des Sports. La directrice de publication, par ailleurs proche du directeur du cabinet civil de Paul Biya, Samuel Mvondo Ayolo, a été sommée de révéler la provenance de la « haute instruction » à l’origine de cette publication, le seul habilité à user de cette formule étant Ferdinand Ngoh Ngoh, unique détenteur d’un décret portant délégation de signature du président de la République. Cette procédure ira-t-elle jusqu’à son limogeage ? Une « note blanche » adressée à Paul Biya, et dont Jeune Afrique a obtenu copie, évoque en tout cas ouvertement cette hypothèse.