L'abbé Abel Ana a rejoint la terre de ses ancêtres ce 19 octobre 2024. Le défunt curé de la paroisse Notre-Dame de la Paix à Djougoumda a été inhumé au cimetière catholique de la cathédrale Sainte-Anne de Yagoua. Plus d’un mois après son décès tragique. Dans son homélie inspirée de l'évangile de Saint Luc (chapitre 12, versets 35 à 40), Mgr Barthélémy Yaouda Hourgo, évêque du diocèse de Yagoua, a attiré l’attention de la communauté sur la résurgence des actes de violence qui gangrènent le département du Mayo-Danay depuis 2009. «Nous traversons une période de violence dans notre département.
Depuis 2009, lorsque l'on a réveillé le diable couché en brousse loin des gens, avec l’initiation, le désordre est entré dans notre département. Tout le monde est excité, tout le monde veut se battre. Nous, chrétiens, disons non à cela. Depuis cette initiation, de nombreuses agressions ont eu lieu ; un petit groupe ne peut plus se rassembler sans être troublé par ceux qui se prétendent initiés », a-t-il dénoncé.
«Cela ne correspond pas à la paix que nous désirons. J'adresse donc un appel pressant, en tant que gardien de la foi catholique dans le diocèse de Yagoua, aux hommes politiques et aux chefs traditionnels, afin qu'ils veillent sur les initiations», a imploré Mgr Barthélémy Yaouda. Revenant sur le décès du curé le 5 septembre dernier, l’évêque a indiqué que «l'abbé Abel Ana a été surpris dans son ministère par cette mort soudaine et injuste. Il sortait à peine de son lit, encore fatigué».
L’homme est décédé à la suite d'une rixe survenue à l'entrée du quartier Kaskao à Yagoua. Fils d'un père polygame, ce prêtre a été assassiné par son demi-frère lors d'un litige familial. Sollicité pour une rencontre avec ses frères, le curé n'imaginait pas qu'il se dirigeait vers sa fin tragique. Constatant la dégradation de l'atmosphère, il s'était rendu au commissariat de sécurité publique pour alerter les autorités, avant de retourner sur les lieux. Malheureusement, Le temps que les policiers débarquent, l’irréparable est arrivé et c’est le constat d’une scène de crime qu’ils découvrent. Le révérend père Abel Ana a été mortellement poignardé à la suite d'une altercation avec son demi-frère.
Lui qui essayait de s’interposer dans la bagarre, a reçu un coup fatal. Ce dernier a, à son tour, été tué par l'un de ses frères, entraînant deux décès au sein de la même famille. Quelques jours auparavant, le prêtre avait organisé les obsèques de sa mère et portait encore les marques de la fatigue occasionnée par cet événement douloureux.
Mais l’évêque de Yagoua n’a pas stigmatisé que l’initiation. L’homme dénonce également l'agressivité des jeunes, qu'il attribue au chômage : «Les jeunes deviennent agressifs ; cela est compréhensible, car ils ont des diplômes mais sont privés d'emploi. On les amène en brousse pour leur enseigner quoi ? Nous disons non ; éduquons nos enfants et offronsleur une bonne instruction. Si l'éducation en brousse était adéquate, tout le tumulte auquel nous assistons aujourd'hui n'aurait pas lieu», a-t-il conseillé. DEUX PRÊTRES ASSASSINÉS Ordonné prêtre le 13 décembre 2014 à Yagoua, l’abbé Abel Ana décède à 40 ans.
Lors de la messe d'inhumation présidée par l'évêque, entouré de nombreuses délégations venues du Tchad et des diocèses voisins, ainsi que des autorités administratives et des forces de défense et de sécurité, une atmosphère de sérénité a été préservée au sein de l'aire sacrée de la cathédrale Sainte-Anne. En évoquant le contexte de la mort de l'abbé Abel Ana, survenue le 5 septembre à Yagoua, ainsi que celle de l'abbé Christophe Komla Badjougou, curé de la paroisse de Zouzoui, assassiné le 7 octobre dernier à Yaoundé, Mgr Barthélémy Yaouda a rappelé que se tenir prêt, c'est aussi vivre en réconciliation, quel que soit le conflit.
«Il est essentiel pour notre paix intérieure de cultiver la réconciliation avec notre entourage, de s'ouvrir au pardon, tant au niveau personnel que familial et communautaire», a-til enseigné. L’abbé Abel Ana rejoint la terre de ses ancêtres dans l’intimité, en présence de ses confrères prêtres et une partie de la famille. C’est dans une ambiance de tristesse que le corps de l'abbé Abel Ana a été élevé du catafalque par ses confrères pour sa dernière demeure. Selon certaines informations, son demi-frère, auteur de cette tragédie, sera également inhumé dans la localité de Marao, à 5 km au nord de Yagoua, le mardi 22 octobre prochain