Ils semblent avoir pris leurs distances avec la chose typiquement politique. Pourtant, dans la région de l’Adamaoua, ils étaient les figures de proue de la campagne des candidats en course pour l’élection du 07 octobre 2018. Six ans plus tard, et à l’approche de l’élection présidentielle de 2025, ces leaders de partis politiques dans l’Adamaoua connaissent des fortunes diverses, avec des états d’esprit tout aussi ondoyants. Sorti du Sénat, Aboubakar Siroma était au front pour son candidat en 2018, Joshua Osih. Entre temps, l’ancien sénateur a vu le Social democratic Front (SDF) se désintégrer particulièrement dans l’Adamaoua, voire dans le GrandNord. Raison de sa petite prise de distance politique ? On ne saurait le dire absolument. Mais l’ancien sénateur Aboubakar Siroma a engagé un ensemble de combats. D’abord celui des droits des anciens sénateurs du Cameroun, qui plus est, les premiers que le pays a connus dans son histoire, et qui ont quitté la Chambre haute sans certaines indemnités. C’était une nouvelle vie de navettes entre Ngaoundéré et Yaoundé, après la législature 2013-2018 ; pour des résultats pas toujours satisfaisants. Mais l’ex sénateur du SDF a appris à ses dépens les conséquences de ses batailles sociales. C’est bien lui qui a engagé la croisade pour la sécurisation des cimetières de la ville de Ngaoundéré, outrancièrement profanés et en voie de disparition. Pour avoir dit que les autorités de la ville de Ngaoundéré ont échoué sur cet aspect, il a été interpellé en 2022 et auditionné pendant neuf heures dans les services de la police à Ngaoundéré. Consacré désormais à la gestion de ses petites affaires, Aboubakar Siroma garde son mot à dire sur la gestion des affaires du Cameroun à travers quelques sorties médiatiques, mais plus en très bonne intelligence avec SDF.
Il en est pourtant un militant de la première heure dans l’Adamaoua. Il n’a jamais quitté ce parti, après acquisition de sa carte de militant le 24 mars 1994 à Douala au quartier Congo-Makeya. En 2018, Cabral Libii se porte candidat à l’élection présidentielle, sous la coupole du parti Univers. Dans la foulée, Prosper Nkou Mvondo devient capitaine de l’Univers de Cabral dans l’Adamaoua. Il y conduit les équipes de campagne. Tout à côté, il y avait « Monsieur 11 millions du Château » : Karamoko Souleyman. C’est lui qui coordonnait le Mouvement 11 millions de citoyens inscrits lancé par Cabral Libii ; il conduit par la suite les affaires du Pcrn dans l’Adamaoua.
Il s’est donné à fond avec ses camarades. Mais, des années après, il a d’abord demandé, pour des raisons personnelles, à être déchargé de ses fonctions de coordonnateur du parti dans l’Adamaoua. Simple militant désormais, Karamoko Souleyman a choisi de défendre plus âprement certaines causes sociales. «Sans calculs politiques», il décide de conduire le collectif des riverains du projet d’exploitation de la bauxite de Minim et Martap. Il fallait bien se rassurer que ces riverains soient logés à bonne enseigne et voient plus clair avant la signature récente de la convention minière. Mais Karamoko Souleyman a aussi préféré se consacrer à étoffer son profil personnel, en poursuivant des études en science politique et en peaufinant ses initiatives agricoles. Il est comme en retrait au sujet des affaires politiques. Pendant ce temps, Prosper Nkou Mvondo, juriste, professeur titulaire des universités, a récemment annoncé les couleurs pour l’élection présidentielle de 2025 : Univers a choisi Me Akéré Tabeng Muna. On attend la suite… PORTÉS DISPARUS ? Me Kassiya, célèbre avocat, bien connu comme le «roi des prétoires», était en 2018 le porteflambeau du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) dans l’Adamaoua. A ce jour, Me Kassiya a définitivement mis sous le boisseau les activités politiques et se consacre exclusivement à ses plaidoiries dans les tribunaux, ses enseignements à l’université et ses études. Il a quitté le MRC aussitôt après 2018. Ce n’est pas le cas de Brigitte Ndjiba, enseignante, qui a adhéré au MRC en 2017, et qui semble jusqu’à présent dire : «Maurice Kamto jusqu’à la gare !». Fidèle à sa logique de «marketing de proximité» dans l’Adamaoua, elle est restée active sur les questions de mobilisation de la population pour les inscriptions sur les listes électorales et l’adhésion aux idéaux de son parti. Doukou Darman, lui, a de nouveau sombré dans les couloirs de l’incognito comme acteur politique dans l’Adamaoua. Coordonnateur national du Front populaire pour le Développement (FPD), son parti a investi Akéré Tabeng Muna comme candidat à l’élection présidentielle de 2018. C’est par «la magie des réseaux sociaux» que ce parti de propositions et non parti d’opposition nouait le lien avec Me Akéré Muna, avait confié Doukou Darman. Sa notoriété personnelle et celle de son parti créé le 16 mars 2010 n’auront donc manifestement tenu que le temps de la campagne en 2018. Doukou Darman a disparu des radars. Le siège du parti érigé dans un immeuble au quartier Tongo à Ngaoundéré, a d’ailleurs disparu aussitôt après la présidentielle de 2018. Pas sûr qu’avec ces nouveaux profils et trajectoires, tous ces acteurs animateurs de la scène politique régionale en 2018, pourront encore croiser le verbe pour la présidentielle de 2025. Tout reste encore possible en politique, évidemment