Cameroun : fin de course pour un faux avocat après 15 ans d'exercice

Le cabinet est scellé

Thu, 29 Jun 2023 Source: Le Messager du 29-06-2023

Selon les déclarations de Me Mbah Eric Mbah, sieur Sohaing Neim Sylvestre Brazza se passait pour un avocat depuis plus d’une quinzaine d’années.

Cet après-midi du jeudi 22 juin 2023, au deuxième étage de l’immeuble Kassap à Douala-Akwa, le document qui matérialise la pose des scellés sur le bureau du sieur Sohaing Neim porte le sceau et la mention : « Gendarmerie nationale, Groupement de gendarmerie territoriale de Douala… Bureau scellé… référence : Mandat de perquisition et de saisie de monsieur le Procureur de la République près le tribunal de première instance de DoualaBonanjo N° 327 du 22/06/2023 » , signé le Commandant de Groupement.

A l’évidence, le barreau après vérification a requis et obtenu du tribunal de première instance de Douala-Bonanjo la fermeture du bureau où était installé le sieur Sohaing Neim, accusé d’exercice illégal de la profession d’avocat. Sur ordre de l’autorité judiciaire, le groupement de gendarmerie a prêté main forte au Barreau. Cet acte intervient après le communiqué du 14 juin 2023 signé du bâtonnier Mbah Eric Mbah, qui portait « à la connaissance de la corporation, du grand public et des autorités publiques concernées, qu’en violation flagrante de la loi régissant la profession d’avocat au Cameroun, le sieur Sohaing Neim Sylvestre Brazza exerce comme avocat dans l’illégalité totale, et est installé dans la ville de Douala quartier Akwa, résidence Kassap » . Ceci faisait suite à une plainte déposée le 07 juin 2023 devant le procureur de la République près le tribunal de première instance de Douala-Bonanjo, pour « exercice illégal de la profession d’avocat, usurpation de fonction et usurpation de titre » .

Interrogé par les journalistes sur le processus qui a conduit à acte, le Bâtonnier explique que l’assainissement du barreau faisait partie de ses promesses de campagne lorsqu’il accédait à la présidence du Conseil de l’Ordre. Me Mbah Eric Mbah avait promis de faire le nettoyage et Dieu seul sait combien le barreau regorgerait des intrus et des brebis galeuses en son sein, tout comme dans bien d’autres corps de métier. Au cours d’un conseil de discipline, les membres de bureau du conseil de l’ordre ont entrepris de faire des descentes dans certains cabinets, et c’est ainsi qu’à Douala des rapports leur sont parvenus sur un cas qui se trouverait à l’immeuble Kassap à Akwa. Ils se sont transportés sur les lieux. C’est ainsi qu’ils se rendent compte que le sieur Sohaing Neim exerce comme avocat depuis 2006 suivant la date de son inscription au tableau de l’ordre qui plus est, tombe un samedi, chosequi attise davantagela curiosité des membres du conseil.

Revendications

Les membres du conseil avant de s’y rendrepour une seconde fois pour la fermeture proprement dite du cabinet, le sieur Sohaing informé n’a pas cru devoir se présenter. Aussitôt, les scellés sont apposés sur la porte de son bureau. Lebâtonnier déclare ne pas s’arrêter en si bon chemin, et que les investigations se poursuivent afin que les responsabilités soient établies, sur la question de savoir si d’aventure cet individu n’avait pas bénéficié de la complicité de certains personnes au seindu Conseil de l’ordre, pour y être admis au point où son nom figure sur le tableau de l’ordre. Pour ce qui adviendrait du dossier de ses clients, le bâtonnier ademandéà ces derniers de saisir le conseil de l’ordre au cas où ils auraient des revendications ou des griefs à faire valoir, et que des avocats seront commis pour la défense de leurs dossiers.

Interrogée sur la signification de l’acte que vient de poser le barreau, la secrétaire général du Barreau, Me Ngo Miyogog Anne Yolande répond en ces termes : « cette une mesure prise à titre conservatoire qui a pour objectif d’empêcher la poursuite de l’exercice illégal de la profession d’Avocat par monsieur Sohaing, en attendant la décision finale du tribunal» . Pour mémoire, le dossier d’intégration au barreau de sieur Sohaing Neim a été rejeté par deux fois de suite, respectivement en 1999 et en 2005. Ce dernier brandissait un diplôme d’avocat obtenu au Niger, diplôme dont l’authentification n’a pas été établie. De plus il n’avait pas apporté la preuve de son inscription au barreau du Niger, suivant ses allégations. Seulement, l’on ne sait par quelle alchimie son nom s’est retrouvé inscrit au tableau de l’ordre. Certainement qu’il aurait bénéficié de la complicité de certains membres du barreau. En tout état de cause, les enquêtes se poursuivent afin d’établir les responsabilités.

Il faut dire que le barreau n’est pas à sa première prise. Récemment encore, un individu a été interpelé au tribunal de Mfou, se présentant comme étant avocat. Pour la secrétaire générale du Barreau, Me Anne Yolande Ngo Miyogog, c’est un travail d’assainissement qui se poursuivra car dit-elle, « la protection du périmètre de la profession d’avocat contre les usurpateurs, les fraudeurs et les pratiques concurrentielles déloyales est une option prioritaire de l’ordre dont le contrôle se situe à l’entrée et pendant l’exercice de la profession » . Aussi ajoute-t-elle : « c’est un important chantier qui fait partie du plan d’action de monsieur le bâtonnier, Me Mbah Eric Mbah, à la mise en œuvre duquel le Conseil de l’ordre veille au quotidien… qu’il s’agisse notamment de l’attribution des matricules… la mise en circulation de la nouvelle carte professionnelle avec un système d’identification sécurisé… des visites d’inspection des cabinets, entre autres» .

La face cachée de l’Iceberg

Me Sohaing Neim que nous avons approché afin d’avoir sa version des faits, évoque pour se défendre une affaire de plus de 6 milliards de nos francs qu’il aurait gagné à la cour suprême contre un membre du conseil de l’ordre ;une affaire qui aura duré 15 ans durant, et que c’est cette affaire qui est la cause de la machination et diffamation ourdies à son encontre. Pour tout dire selon Me Sohaing, ce que le barreau appelle radiation n’en est pas une. « Je vais me battre jusqu’à la dernière énergie pour être rétabli dans mes droits » , promet-il. Au fait selon lui, la diffamation ourdie à son encontre n’est que « la face cachée de l’iceberg » , et qu’il y a bien plus autre chose à voir derrière cette affaire. Sur la question de son diplôme obtenu au Niger, lequel diplôme n’a pas être authentifié, son dossier rejeté à deux reprises au barreau, et sur la question qui l’a inscrit au barreau….ce dernier n’a pas daigné s’exprimer sur ces questions, se contentant d’alléguer l’acharnement ourdi à son encontre. Il croit dur comme fer que son insertion au barreau a été faite de façon régulière, et qu’il se battra pour être rétabli dans ses droits.

Sur son inscription un samedi au tableau de l’ordre, Me Sohaing Neim argue que le conseil de l’ordre tient ses réunions tous les jours de la semaine y compris le samedi, et qu’il ne comprend pas qu’il soit le seul avocat à être indexé parmi tant d’autres inscrits le même jour. Me Sohaing va plus loin, évoquant le nom d’une dame huissier de justice qui a intervenu dans cette affaire, et qui suite à cette affaire a été contrainte au silence au point d’être convoquée à Yaoundé pour cela. « ils veulent éviter la loi et avancer dans le chaos, mais ça ne pourra pas prospérer… ils sont en train de mâcher de l’eau » , selon Me Sohaing Neim.

Source: Le Messager du 29-06-2023