Cameroun : la grève à double vitesse des enseignants

Ce que cache la grève des enseignants

Tue, 8 Mar 2022 Source: L'Oeil du Shahel N°1623

Depuis le 21 février 2022, les enseignants du secondaire affichent leur ras-le-bol à travers l’opération qu’ils appellent « On a Trop Supporté » en abrégé OTS. Sur le terrain, elle se manifeste à travers ce que les seigneurs de la craie appellent « craie morte », c'est-àdire se présenter dans les établissements et se regrouper sous les arbres jusqu’à la fin de la journée sans toutefois mettre pieds en salle de classe.

Des rencontres ont été annoncées et ont eu lieu à la Primature pour désamorcer la bombe. La dernière en date s’est tenue le 1er mars 2022 à l’effet d’examiner les préoccupations soulevées par les collectifs des enseignants du secondaire. Du côté de l’administration, y ont pris part à la rencontre de mardi dernier, les ministres de l’Enseignement secondaire, du Travail et de la sécurité sociale, le secrétaire général adjoint des Services du premier ministre ainsi que quelques proches collaborateurs des ministres présents. Côté enseignants, outre les représentants du collectif des enseignants, les différents syndicats des enseignants étaient présents. Pendant que les enseignants restés sur le terrain attendaient des résolutions concrètes, leurs représentants sont sortis de l’Immeuble étoile avec des « mots ».

Ainsi, à la fin des échanges à la Primature, le gouvernement s’est engagé à poursuivre avec les syndicats et collectifs les travaux entamés, afin de régler les problèmes clairement posés. «Par ordre de priorité, nous avons arrêté de manière consensuelle le règlement des compléments de salaire, le paiement des arriérés dus aux enseignants mobilisés dans le cadre de la correction des examens officiels organisés par l’Office du Baccalauréat du Cameroun (OBC) au titre des sessions de juin 2020 et juin 2021. Le gouvernement s’est aussi engagé à la régularisation des avancements, de la prise en compte des primes de non logement, ainsi que du paiement des allocations familiales, et du règlement des indemnités de sujétions», égraine un enseignant membre du collectif OTS. Quant aux autres problèmes relatifs à la carrière des enseignants et à leur statut particulier, ils feront objet de concertations ultérieures selon un calendrier arrêté d’accord parties. Les syndicats et collectifs ont pris acte de cet agenda. Aussi, les représentants du collectif OTS ont accepté d’inviter leurs membres à arrêter l’opération « craie morte » et à suspendre le mot d’ordre de grève au sortir de cette rencontre du 1er mars 2022.

RÉSISTANCE

t des avis divergents. Pendant que certains estiment qu’il faut laisser place au dialogue, d’autres pensent que c’est le moment ou jamais de faire preuve de fermeté. «Ça c’est pour eux là-bas à Yaoundé. Nos plaintes n’ont pas commencé aujourd’hui, le gouvernement est au courant de cette situation depuis des années. C’est quel dialogue qu’ils veulent engager maintenant ? C’est trop de mépris vis-à-vis du corps enseignant. Chez nous, c’est même maintenant que la grève commence», fulmine un groupe d’enseignants rencontrés sous un arbre jeudi dernier dans un établissement de la ville de Ngaoundéré. «Je suis tout à fait d’accord avec les revendications formulées par des collègues.

Je pense que nous avons choisi le chemin du dialogue au départ et, comme le dialogue a débuté, accordons-leur le bénéfice du doute. Vous m’avez trouvé en salle tout simplement c’est parce que nous sommes en pleine semaine d’évaluation, il fallait que les enfants composent », justifie un enseignant qui a choisi de faire « vivre » sa craie. En réalité, dans ce mouvement « On a Trop Supporté », il se pose un véritable problème de leadership. Nombreux sont ceux qui ne se reconnaissent pas dans les représentent qui mènent les concertations à Yaoundé. « Il faudrait que les gens sachent que nous n’avons mandaté personne pour représenter le mouvement OTS. Ceux qui disent parler au nom de OTS ont décidé d’aller à Yaoundé, et c’est leur problème. En tout cas, il faut que les gens se souviennent que la situation actuelle du Nord-Ouest et du Sud-Ouest avait commencé ainsi, et, aujourd’hui elle est incontrôlable. Pour le moment nous sommes encore calmes, et il ne faudrait pas que les gens nous poussent à bout », prévient un enseignant.

Source: L'Oeil du Shahel N°1623