Cameroun : une histore revelatrice sur les peuples Binam au moment du contact avec les allemands

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Tue, 30 Aug 2022 Source: www.camerounweb.com

Nous sommes probablement en 1904. Les Allemands ont fait du palais Bangang une escale permanente sur la route vers Foumban, et somment les rois de la région de s'y présenter en signification de leur soumission. Comment réagit le roi Fomekong Malondzeu de Batcham ?

Au lieu de se rendre à Bangang, il choisit plutôt d'y placer des espions dont la mission est de l'alerter dès qu'une colonne allemande s'ébranlait vers Batcham, ce qui lui permettait d'aviser les populations qui alors se dispersaient en brousse. Dans cette lancée, nombre de cases furent détruites et reconstruites dans les bas-fonds, pour mieux faciliter le repli dans les raphias en cas de besoin. C'est ce que j'appelle "stratégie de l'espionnage et du repli en brousse".

La réaction des Allemands ? A chacun de leur passage à Batcham, ils incendiaient les cases et tiraient sur tout ce qui bougeait. Les pertes étaient importantes. C'est pourquoi le roi demanda aux populations de regagner les cases et de les accueillir désormais au lieu de s'enfuir. Puis, ayant décidé de se "faire remplacer", il convoqua son neveu Fouodji qui parlait le Mengaka [langue des traducteurs locaux des Allemands à cette époque] et lui ordonna de se présenter désormais aux Allemands comme le roi des Batcham. C'est-à-dire que chaque fois que les Allemands étaient présents, ou tant qu'il était question de traiter avec eux, où qu'ils fussent, c'est Fouodji qui faisait office du roi des Batcham. C'est ce que j'appelle "parade Fouodji".

Mais des Batcham ligueurs avertirent les Allemands de la supercherie, de sorte que bien qu'ayant accepté que Fouodji parle au nom des Batcham et s'occupe de la main-d’œuvre et des impôts, les Allemands n'en continuèrent pas moins de réclamer le vrai roi chaque fois qu'ils arrivaient à Batcham. Ainsi, après avoir sauvé peuple et village de l'holocauste, Fomekong dut inventer une nouvelle astuce pour préserver sa propre tête.

Grand géomancien qu'il était, il se raconte que chaque fois que les Allemands le réclamaient, il se mettait immédiatement à pourrir, se couvrant d'asticots et d'odeurs nauséabondes. Et lorsqu'on le leur amenait transporté telle une loque humaine dans le tissu batik, ils le renvoyaient à distance, dégoutés. C'est ce que j'appelle la stratégie de la "pourriture".

Il semble qu'en réalité, le roi ne faisait que s'enroulait dans une peau de chèvre qu'on laissait à cet effet pourrir au palais, de sorte que les asticots n'étaient que cousus sur son vêtement. Mais magie ou supercherie, c'est ce qui préserva sa tête.

L'histoire des peuples Grassfieds durant la période coloniale est pleine d'épisodes du genre, généralement inconnues du grand public mais révélatrices de la sagacité et du niveau de conscience politique de nos dirigeants d'alors.

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