Cavaye Yeguie Djibril et la cure de jouvence

Cavaye Yeguie Djibril et la cure de jouvence

Sat, 8 Jan 2022 Source: Le Messager

Depuis l’avènement de la 10ème Législature suite aux élections du 9 février 2020, l’institution a connu une métamorphose au point où on parle de l’Assemblée de 2ème géné- ration. Evocation.

Cette législature se distingue essentiellement par la méthode, le process de la conduite des affaires au sein de la Chambre. Si avant mars 2020, les députés pouvaient se tourner les pouces au cours des sessions, Cavaye Yeguie Djibril a sifflé la fin de la récréation depuis lors. Une session de l’Assemblée vaut désormais 30 jours d’intenses activités où même les dimanches sont parfois sollicités. A côté de cette plénitude de la programmation de travail, vient se greffer cette volonté indéniable de faire vivre une synergie entre le gouvernement et l’institution qu’il préside. En gardant ses missions premières de vote des lois et de contrôle de l’action gouvernementale, l’Assemblée nationale a créé des mécanismes nouveaux qui lui permettent d’être au plus près de ce que fait le gouvernement. Il existe de ce fait, à minima deux instruments nouveaux dont s’est appropriée la Représentation nationale pour être plus efficace et plus près de la Nation. Il y a d’abord cette obligation faite désormais à toutes les Commissions de l’Assemblée nationale d’avoir une séance de travail au moins par session, appelée « Séances d’informations et d’échanges avec les Commissions ». La chambre choisit des thématiques d’actualité et d’intérêt national et sollicite dans un cadre restreint des entretiens avec le membre du gouvernement ou une personnalité avisée sur la question. Rétrospectivement, on peut retenir que tous ceux qui ont été invités ont répondu à l’appel en dehors du couac de calendrier avec le ministre des Relations extérieures il y a quelques temps. On peut retenir entre autres au cours de l’année législative 2020-2021 : la rencontre entre la Commission de la Défense et de la sécurité avec le ministre de la Défense nationale, Joseph Beti Assomo sur la justice militaire, le 16 juin 2021 tout comme le 22 novembre sur le statut et contribution du Génie militaire aux objectifs de développement.

Accord cadre Can 2021

Le ministre du travail quant à lui, a été reçu le 17 juin 2021 par la Commission des Affaires culturelles et ils ont échangé sur les questions de prévoyance et de sécurité sociale ; le 5 juillet de l’année dernière, le ministre de la justice était en face de la Commission des lois constitutionnelles, pour parler des cadres juridiques de promotion et de protection des droits de l’homme au Cameroun. Le 22 juillet 2021, il y a eu une séance d’informations et d’échanges entre les députés membres de la Commission des Lois constitutionnelles et la Commission nationale des droits de l’homme et des libertés. Le 18 novembre 2021, la même Commission échangeait sur les tenants et les aboutissants de l’AccordCadre d’organisation de la Can 2021 Total Energies avec le ministre des Sports et de l’éducation physique. Devant la Commission de l’Education, les ministres de l’Education de base et son homologue des Enseignements secondaires étaient invités pour échanger sur le statut, fonctionnement et contrôle des associations des parents d’élèves. Pour finir sur ce chapitre, le 24 novembre, la Commission de la production et des échanges avait une séance d’informations et d’échanges sur le cadre législatif et réglementaire des normes en rapport avec l’environnement contemporain et leurs applications avec le ministre des Mines et du développement technologique.

Les séances plénières spéciales

Elles sont de toute évidence le moment le plus redouté par les membres du gouvernement et participent tout de même à créer un climat serein de bonne marche ou entente entre l’exécutif et le législatif. Elles sont spéciales parce que le débat ou les échanges portent sur des thématiques précises, avec des questions posées à chaud aux ministres. Elles se distinguent des questions orales classiques parce que les membres du gouvernement ne sont pas au fait des questions posées. C’est l’instantanéité. Au cours de 2021, la séance plénière spéciale du 23 novembre portant sur le plan présidentiel de Reconstruction et de développement du Nord-Ouest, SudOuest et de l’Extrême-Nord, le ministre délégué au ministre de l’Economie, de la planification et de l’aménagement du territoire, aura vécu mieux que quiconque l’impact de telles séances.

Au menu, plus de 50 questions à lui posées par les députés pendant trois heures d’horloge. Par la suite, il fallait répondre. C’est dire que l’Assemblée nationale, en recourant à ce mécanisme salvateur, recueille à la base les doléances des populations et les soumet en débat avec le gouvernement.

Lutte contre la corruption

Dans un tel contexte, parce qu’il n’y a pas de vote, donc la discipline des partis politiques est reléguée au second rang, les députés parlent au nom du peuple et non du parti en priorité. Par exemple, le 5 juillet 2021, la séance plénière spéciale portant sur la gestion et la réforme foncière : aspects juridiques, économiques, sociaux et politiques a fait également couler beaucoup d’encre et de salive et indique qu’il s’agit là d’un point central sur lequel le gouvernement est appelé à légiférer. L’autre particularité des séances plénières spéciales est qu’elles se terminent toujours avec des recommandations. En plus des deux citées, l’Assemblée nationale a connu 6 séances spéciales entre 2020-2021. On peut retenir entre autres, les séances plénières spéciales portant sur les points suivants : la valorisation et la contribution de la médecine traditionnelle à l’offre de santé (25 juin2020) ; Cérémonie officielle de la présentation édition de de l’Anthologie des discours du Pan (9 décembre 2020) ; la sécurité et la prévention routière au Cameroun (23 mars 2021) ; la présentation des avancées de la lutte contre la corruption au Cameroun et des attentes de la Conac aux députés (6 avril 2021) ; le projet de couverture santé universelle et la vaccination contre le Covid-19 (23 juin 2021). Comme on le voit, Cavaye Yeguie Djibril, surprend grandmonde depuis le début de la 10ème législature.

Lui qui est au perchoir depuis 1992, donc 30 ans sans discontinuer, a donné un coup de neuf à la vie de l’Assemblée nationale. L’institution parlementaire roule si bien que certains parlent d’Assemblée nationale de 2ème génération en parfaite rupture avec l’esprit de la traditionnellede « Chambre d’enregistrement ». Tout ceci, le Pan n’y est pas étranger car l’homme puise dans son inépuisable expérience pour faire du neuf. Il convient en réalité de parler de l’expérience ancrée dans le patriotisme, l’amour de son pays. Depuis plus de 10 ans, Cavaye Yeguie Djibril ne passe pas les vacances hors du pays, mais à Mada dans son village natal où il est par ailleurs chef traditionnel. La polémique née ces derniers jours de la création d’une antenne de l’Assemblée nationale à Maroua, qu’elle soit fondée ou pas, témoigne pardessus tout de la volonté de cet homme d’Etat d’être en immersion avec l’institution quand bien même il serait dans le septentrion. Une volonté salvatrice de ne pas être déconnecté de ce qui se passe dans la maison de son cœur, même en vacances.

Source: Le Messager