Le gouvernement camerounais vient d'interdire tout débat public sur l'état de santé du président Paul Biya, âgé de 91 ans. Cette décision intervient dans un contexte de spéculations croissantes sur la condition physique du chef de l'État, absent de la scène publique depuis plus d'un mois. C'est ce que Jeune Afrique analyse dans une chronique.
Le 10 octobre, le ministre de l'Administration territoriale, Paul Atanga Nji, a publié un communiqué stipulant que "tout débat sur l'état de santé du président est désormais formellement interdit". Le ministre justifie cette mesure en invoquant des raisons de "sécurité nationale", une décision qui soulève des questions sur la liberté d'expression dans le pays.
La dernière apparition publique de Paul Biya remonte au Forum de coopération Chine-Afrique (Focac), qui s'est tenu du 4 au 6 septembre. Depuis, le président a brillé par son absence à plusieurs événements internationaux majeurs, notamment la 79e Assemblée générale des Nations unies et le sommet de la Francophonie. Cette absence prolongée a alimenté les rumeurs sur son état de santé.
Face aux spéculations grandissantes, le gouvernement camerounais a d'abord tenté de rassurer l'opinion publique. Le cabinet de la présidence a affirmé que l'état de santé du chef de l'État était "excellent" et qu'il travaillait depuis Genève. Cependant, l'interdiction récente de tout débat sur le sujet semble contredire ces assurances initiales.
Paradoxalement, cette tentative de museler le débat pourrait avoir l'effet inverse de celui escompté. Comme le souligne la chronique de Jeune Afrique, "le ministre semble ignorer que son coup de menton alimente davantage les rumeurs". En effet, l'absence d'informations officielles crédibles ne fait qu'accroître les spéculations.
Au-delà de la santé du président, c'est la question de sa succession qui se profile. Dans un pays où l'espérance de vie moyenne ne dépasse pas 60 ans, l'âge avancé du président (91 ans) soulève naturellement des interrogations sur l'avenir politique du Cameroun. Deux scénarios sont évoqués : une élection anticipée qui pourrait ouvrir le jeu politique, ou un possible positionnement de Franck Biya, le fils du président.
Cette affaire soulève des questions fondamentales sur le droit des citoyens à être informés de l'état de santé de leurs dirigeants. Si la protection de la vie privée et la sécurité nationale sont des considérations légitimes, elles doivent être mises en balance avec le droit du public à l'information, particulièrement dans un contexte démocratique.
L'avenir politique du Cameroun reste incertain. Paul Biya, au pouvoir depuis 42 ans, avait indiqué il y a deux ans qu'il informerait les Camerounais, le moment venu, de sa décision de se présenter ou non à l'élection présidentielle de 2025. En attendant, le silence officiel et l'interdiction des débats ne font qu'accentuer les tensions et les spéculations dans le pays.