Ce 13 février marque le 90e anniversaire de l’actuel président camerounais, Paul Biya. Il a passé près de la moitié de sa vie à la tête du pays, soit 41 ans au pouvoir.
M. Biya fait partie des cinq chef d’Etat africains qui ont dépassé le seuil des 40 années au pouvoir. Il est le deuxième chef d’Etat vivant qui a passé le plus de temps à la tête de son pays, juste derrière le président équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema.
Ayant accédé au fauteuil présidentiel à la suite de la démission de son prédécesseur Ahmadou Ahidjo, Paul Biya a régné sans discontinué à la tête du Cameroun depuis 1982.
La BBC s’est entretenue avec plusieurs personnalités dont des acteurs de la scène politique camerounaise afin de mieux comprendre les raisons de ce long magistère.
L'UPC dont l'un des leaders les plus charismatique est Ruben Um Nyobé, est un partie créé en 1948 pour obtenir l'indépendance du Cameroun. L'Union des Populations du Cameroun est entré dans la clandestinité parce qu'elle a été interdite en 1955 par le pouvoir colonial. Le parti a continué à s'opposer au régime du président Ahidjo qu'il soupçonnait d'être acquis à la France que l'UPC combattait.
Selon le professeur Stéphane Akoa, « c'est d'ailleurs la raison pour laquelle l’expression ‘Cameroun, havre de paix’ est revenu très souvent dans ses discours lors des dix, quinze premières années. »
« La longévité de monsieur Biya tient principalement à ce mode d'élection taillé à sa mesure depuis 1992 pour sa perpétuité au pouvoir» estime l’opposant camerounais Cabral Libii.
Malgré les propositions de réforme du code électoral, le système est resté inchangé.
Dans un système à deux tours, « une majorité relative, généralement se dégage et donc les autres partis ont la possibilité de s'allier, de faire alliance et ça donne plus de chances », analyse le journaliste Georges Alain Boyomo.
Une analyse que partage M. Adji qui pense que « le scrutin majoritaire à un tour est une démocratie bancale, sauf si nous sommes dans un système bipartisan comme aux Etats Unis. »
« C'est difficile d'imaginer l'opposition derrière un candidat. C'est faux de penser que tous les partis politiques qui ne sont pas le parti au pouvoir sont des partis d'opposition. Il y a plusieurs partis politiques qui sont, soit liés au parti au pouvoir, soit créés, éventuellement, pour la cause du pouvoir », explique M. Libii.
Des arguments que partagent M. Adji : « logiquement, des partis politiques qui ont des programmes divergents ne peuvent se regrouper que quand ils trahissent leur idéologie de départ. »
Cependant, selon le professeur Akoa, il manque à l’opposition « un projet politique qui aurait pour objectif de convaincre la classe moyenne. »
Cette classe moyenne a besoin selon lui d'un discours qui sécurise ses intérêts, présente des possibilités de changement. Des réformes et modifications dans la gouvernance mais qui ne touchent pas de manière frontale et complète à ce qu'ils ont réussi à accumuler au cours de ces années.
Cette connaissance a, selon certains observateurs, permis à M. Biya de mieux cerner, non seulement son électorat, mais également les hommes politiques.
Le journaliste Georges Alain Boyomo, définit pour sa part les équilibres régionaux comme une « discrimination positive qui permet que toutes les composantes sociologiques puissent être représentées. »
« Il a su gouverner avec des ministres ou des représentants, notamment de la société civile, qui allaient au contact des populations, rassurer les mécontents et ainsi limiter la portée des crises en évitant des débordements », analyse le Pr Akoa.
« Biya, lui, se présente comme étant celui qui a su choisir dans les groupes et les communautés autour du système central des représentants de qualité », poursuit-il
Cependant, ce mode de gestion commence à montrer ses limites comme en témoigne le conflit actuel dans les régions anglophones du pays.
« Aujourd'hui, c'est un équilibre, je dirais brinquebalant qui ne tient plus à grand-chose parce que très souvent on nomme des personnes, issues certes des différentes régions mais qui ne sont pas assez représentatives », déclare M. Boyomo à la BBC.