Au Sénégal, la prochaine rentrée scolaire d'octobre pourrait marquer une avancée majeure dans l'éducation nationale : la mise à l’échelle de l’introduction des langues nationales dans le système éducatif formel.
L'éducation est un élément clé dans le développement d'un pays, mais il est souvent difficile de trouver le juste équilibre entre l'utilisation des langues nationales et celle des langues étrangères dans les systèmes éducatifs en Afrique.
Sur le continent, de nombreux systèmes éducatifs utilisent des langues étrangères, telles que l'anglais, le français, le portugais ou l'espagnol, comme langue d'enseignement, ce qui peut rendre difficile pour les élèves de comprendre les concepts et de communiquer avec leurs enseignants ; ce qui déteint négativement sur la qualité de l’éducation.
« Le Sénégal a fait des expérimentations, plus d'une dizaine, qui ont permis d'utiliser les six premières langues codifiées dans le système éducatif » nous rappelle le Pr Mbacké Diagne, Inspecteur général de l’éducation et de la formation en charge des langues nationales au ministère de l’Education nationale.
Sur les 25 langues maternelles officiellement reconnues dans le pays, 22 sont codifiées. Cela veut dire qu’elles disposent d'un ensemble de règles officielles pour l’écriture, la grammaire, l’orthographe, la prononciation, la syntaxe et le lexique.
Actuellement, le processus d’introduction des langues nationales à l’école élémentaire est en phase de transition vers une mise à l’échelle qui pourrait débuter dès la rentrée scolaire prochaine.
Une déclaration qu’il a faite lors de la célébration de la journée internationale de la langue maternelle le 21 février dernier à Kaffrine, une région située au centre du pays.
Cependant, pour que toutes les langues maternelles soient bien prises en compte dans la prochaine réforme curriculaire, il faut des préalables.
L’Etat a capitalisé les bonnes pratiques sur des expériences d’introduction des langues nationales à l’école élémentaire pour élaborer un modèle harmonisé d’enseignement bilingue au Sénégal.
« Le modèle a été vraiment conçu par des Sénégalais, des universitaires sénégalais, des techniciens de l'éducation, des ingénieurs de la formation, des inspecteurs de l'éducation, des enseignants », renseigne l’inspecteur Mbacké Diagne.
Ce modèle préconise pour les deux premières années d’apprentissage, 80% du temps dédié à la langue nationale et 20% seulement au Français.
Pour les étapes suivantes, au CE1 et au CE2, les deux langues vont avoir le même temps d’enseignement. « Mais toutes les deux vont être moyens d'enseignement et objets d'enseignement. Donc les matières se font d'abord dans la langue nationale et ensuite en français afin de permettre à l'enfant de ne pas perdre tous les acquis qu'il a eus avant de venir à l'école », précise l’inspecteur Diagne, « et ça permet aussi d'ouvrir l'école au milieu, et de ne pas couper l'école du milieu de l'enfant. »
D’autre part, les langues nationales sont un élément important de la culture et de la tradition africaines, et leur utilisation dans l'enseignement peut aider à les préserver et à les transmettre aux générations futures.
Lorsque les élèves apprennent dans leur langue maternelle, ils sont également exposés à la culture et aux traditions associées à cette langue, ce qui peut renforcer leur identité culturelle.
Toutefois, il est important de souligner que l'introduction des langues nationales dans l'enseignement formel ne doit pas conduire à une marginalisation des langues étrangères.
La maîtrise de langues étrangères est devenue indispensable dans un monde de plus en plus globalisé, où les échanges internationaux sont nombreux et les compétences linguistiques sont valorisées.
Enfin, la question du coût de cette réforme doit être prise en compte. Les moyens financiers nécessaires pour former les enseignants et produire des supports pédagogiques validés peuvent être conséquents.