Concours de la Police: Mbarga Nguélé supprime un candidat des admis pour une raison surprenante

Mbarga Nguele, le DG de la Police nationale

Thu, 7 Oct 2021 Source: La Nouvelle Expression

Ahmadou Tidjani, jeune Mboro de 18 ans a présenté et réussit brillamment le concours de là police comme «élève gardien de la paix». Lors de la convocation des admis à Douala, pour être envoyé au centre d’instruction et d’application de la police de Mutenguene, son nom a disparu de la liste. Il n’a reçu aucune note officielle. Certains cadres de la police disent qu’il serait considéré comme un réfugié.

«Sont déclarés définitivement admis au concours direct du 5 Août 2017, pour le recrutement de 4886 élèves-gardiens de la paix, les candidats dont les noms suivent, classés par ordre de mérite…». C’est en ces termes qu’un communiqué presse signé du délégué général à la Sûreté nationale le 31 Août 2018 proclamait les résultats du concours de la police.

Ahmadou Tidjani dont le nom est classé à la 3835e place sur cette liste avait provoqué une grande joie dans son village Wouro-Yobi où il est né. Un village situé dans la région de l’Adamaoua qui a vu naître aussi son père, sa mère et ses grands-parents.

La suite du communiqué précisait que les admis sont invités à se présenter au groupement mobile d’intervention-(Gmi) du Littoral à Douala, à partir du 18 Octobre 2018 à 7 h 30 pour leur mise en route au centre d’instruction et d’application de la police de Mutenguene.

C’est au mois d’Octobre de la même année, lorsque Ahmadou Tidjani prend congé de sa famille pour se rendre à Douala qu’il apprend sur place, que son nom ne figure plus sur la liste des admis. Les autorités de la police ne lui donnent aucune information

complémentaire. Tidjani tente de se défendre en présentant la liste officielle où est inscrit son nom, toutes les pièces justificatives utilisées pour composer lors des examens écrits et pratiques à Yaoundé, ainsi que ses pièces personnelles, carte nationale d’identité et acte de naissance. Mais le commandant du Gmi de Douala n’y accorde aucune importance. Ce dernier indique que la décision vient de Yaoundé.

«Officiellement on ne m’a fait aucune notification. Je suis donc rentré à Mayo-Darlé auprès de mes parents au village Wouro Yobi. Toute ma famille est allée rencontrer le commissaire divisionnaire qui dirige le commissariat spécial de la ville de Mayo-Darlé, le chef-lieu de l’arrondissement.

Il nous a reçus. Il a ensuite écrit directement au délégué général à la Sûreté nationale. «Deux semaines plus tard. La délégation de la Sûreté ^nationale a répondu en disant que je ne suis pas un Camerounais, que je suis un réfugié, et c’est pour cette raison que j’ai été suspendu de la liste» mentionne Ahmadou Tidjani.

Surpris par cette réponse de la police, le jeune Tidjani dont la nationalité camerounaise est établie, inscrite sur sa carte nationale d’identité et sur son acte de naissance, se demande pourquoi il n’avait pas été recalé lors de la constitution des dossiers de candidatures ?

Pourquoi lors de l’examen il n’a pas été repéré après tous les contrôles auxquels sont soumis les candidats? Ses dossiers étaient conformes, et il a composé dans les mêmes conditions que tous les autres candidats et a réussi le concours. Rien, sur le plan de la procédure, n’explique son exclusion. Pour lui, sa réussite a été volée.

Pourquoi la famille réagit si tard ?

A la délégation générale à la Sûreté nationale à Yaoundé ce 4 Octobre 2021, la cellule de communication recommande au candidat d’écrire une lettre au délégué général à la Sûreté nationale, Martin Mbarga Nguele, pour lui expliquer tout le problème.

Là, il va ordonner une enquête en interne pour trouver une solution. Car plus de deux ans après les faits, il est préférable de trouver une solution définitive qui arrange toutes les parties afin d’éviter les frustrations.

Les autorités se demandent pourquoi depuis deux ans les parents du jeune Tidjani n’ont pas fait le déplacement à Yaoundé pour rencontrer le délégué général à la Sûreté nationale en personne. Cette famille s’est juste contentée de collaborer uniquement avec les autorités de police de la ville de Mayo-Darlé.

Peut-être ont-ils eu peur d’aller au contact de l’exécutif à Yaoundé pour revendiquer leurs droits? Pourtant les Mbororos, bien que minoritaires, sont protégés par la loi. Mais ces derniers, généralement victimes d’abus, , n’ont pas toujours le réflexe de se défendre.

Exclusion ethnique

Aliou Mohamadou est le chef du village Wouro Yobi. Il indique que ce village est peuplé en majorité de Mbordros. Ils représentent une force sur le plan politique au point d’avoir l’un des adjoints au maire de la commune de Mayo-Darlé, Mohammed Issa qui est Mbororo. Avec toute cette représentativité, Aliou Mohamadou se demande comment on peut qualifier tous ces citoyens de réfugiés? Ce sont bel et bien des Camerounais.

«La police sait très bien que Tidjani est Mbororo. C’est à cause de sa race et de son ethnie qu’il est écarté de la police. Pour certains les Mbororos étant minoritaires, c’est très facile de les mépriser comme ils le font en ce moment.

Ce qui se passe c’est tout simplement de la marginalisation. Or, la loi défend cela. La police qui doit être le premier défenseur du droit des minorités se retrouve être au contraire la première à violer les droits de ces peuples-là. Nous sommes ahuris et mécontents» a affirmé une autorité de cet arrondissement Pour une enquête approfondie

Pour plusieurs avocats à l’instar de Me Fabien Kengne, Ahmadou Tidjani devrait rassembler tous les éléments de preuves et se faire accompagner par un cabinet d’avocats dans sa réclamation. «Dans l’actualité, ces derniers jours plusieurs policiers ont été jetés en prison pour des torts commis dans l’exercice de leur fonction contre des civils.

Il faut pousser l’enquête plus loin. S’il y a des éléments véreux au sein de la police qui auraient fait usage de manœuvres basses pour faire disparaître le nom de Tidjani, ils doivent être poursuivis et sanctionnés conformément à la loi» expliquent les avocats.

Par ailleurs, refuser d’admettre qu’un Mbororo est un Camerounais au point de l’exclure d’un concours est une violation de l’article 3 de la charte africaine des droits de l’homme et des peuples, qui rappelle que toutes personnes bénéficient d’une totale égalité devant la loi sans distinction de race ou d’ethnie, de couleur, de langue… Autant d’arguments qui donnent un sens à la revendication d’Ahmadou Tidjani.

Source: La Nouvelle Expression