Crime : celui qui a donné l'ordre de couper Internet pendant que Martinez Zogo se faisait tuer

Coupure d'Internet

Fri, 5 Jan 2024 Source: www.camerounweb.com

Pour mieux comprendre ce qui s’est passé, ces explications de Boris Bertolt sont très instructives. Beaucoup de personnes seraient mouillées à des degrés variés dans cette affaire d’assassinat du journaliste. Lecture !

Le DG de l’Antic, la DG de Camtel, la DG de MTN et la DG Orange seront entendus au tribunal militaire. Hier je vous révélais qu’Iinternet avait été coupé sur les téléphones d’une partie des membres du commando pendant l’opération d’enlèvement et de torture de Martinez Zogo. Pour rappel, ce groupe, qualifié de premier commando, était constitué de Justin Danwe, Ebo’o Clément Jules, Nzockmeping Mital, Lenoir Dawa Bosco, Bakaïwe Sylvain, Tongue Nana Stéphane, Daouda, Lamfu Johnson et Nkoto Jean Leonard. Tous sont actuellement aux arrêts. Ils communiquaient via un groupe WhatsApp appelé « SOA ».

Ce 1er commando est divisé en deux équipes : Une première équipe comprenant Tongue Nana et Daouda qui assure le guet et la filature de la « cible ». Et une deuxième équipe constituée de Ebo’o Clément Jules, Nzockmeping Mital, Lenoir Dawa Bosco, Bakaïwe Sylvain, Lamfu Johnson et Nkoto Jean Leonard qui a procédé à l’enlèvement et la torture de Martinez Zogo.

Justin Danwe coordonnait depuis le Mess des officiers à Yaoundé, les opérations. À 21 h, Internet est brusquement désactivé sur tous les téléphones des membres du commando qui ne peuvent plus donc communiquer via leur groupe WhatsApp. Les voilà contraints de basculer sur le GSM, être à découverts et donc sous contrôle. Tous les agents de la DGRE arrêtés dans cette affaire, et qui ont déjà mené de nombreuses opérations de terrain ont reconnu n’avoir jamais été confrontés à une telle situation dans leurs carrières.

Qui a ordonné la coupure d’internet sur les téléphones des membres du commando ?

Saisie par les enquêteurs de la commission mixte mise sur pieds par Paul Biya, l'Agence nationale des technologies de l'information et de la communication (Antic) fait savoir que l’initiative ne venait pas d’elle. Ebot Ebot Enaw, DG de l’Antic qui s’exerce aussi à faire de l’espionnage pour le compte de la présidence de la République, refuse jusqu’à ce jour de dire qui lui a donné cette instruction qui, dit-il, a été répercutée aux opérateurs.

Aussi, les responsables de MTN, Orange et Camtel ont été empêchés par une instruction de la présidence, d’être entendus. Les enquêteurs voulaient avoir confirmation de la nature des instructions de l’Antic et si les opérateurs de téléphonie mobile ont agi de concert ou chacun dans son coin ou plus intéressant, si les coupures ont été faites à leur insu.

Comment l’opération de la coupure d’Internet des membres du commando a été possible sans affecter les autres utilisateurs d’internet dans le même rayon ?

Pour répondre à cette question, il faut remonter à 2018. Peu avant la présidentielle, le Cameroun a acquis par le biais du secrétariat général de la présidence de la République un système de coupure d’internet qui peut être ciblé ou généralisé.

Des dispositifs de ce système ont été placés sur des installations techniques des opérateurs Orange, Camtel et MTN. En résumé, Camtel, MTN et Orange peuvent décider de couper Internet sur toute l’étendue du territoire national, sur une région ou sur des téléphones portables de particuliers sans aucun effet sur son voisin. Ce dispositif de contrôle de l’Internet a conduit des Camerounais avisés à recourir de plus en plus à des numéros étrangers pour leurs communications WhatsApp, s’assurant ainsi une petite marge de manœuvre.

Ce dispositif a été acheté auprès de l’entreprise Israélienne, NSO Group sur instruction du secrétaire général de la présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh avec l’appui de son fidèle allié, le patron du BIR, l’israélien Eran Moas.

Au départ, le Cameroun avait acquis le logiciel Pegasus qui a servi à des tentatives d’espionnage de plusieurs personnalités et acteurs politiques parmi lesquels le ministre de la Défense Joseph Beti Assomo, le patron de la DGSN Martin Mbarga Nguélé ; le ministre des Finances Louis-Paul Motaze, Cabral Libii, Maurice Kamto. Ou encore le banquier Paul Fokam Kamogne.

Cependant, Pegasus s’est avéré inefficace. Les cibles changeant en permanence de numéros. Ferdinand Ngoh Ngoh, prétexte alors auprès du chef de l’État des troubles dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest pour obtenir son accord pour l’acquisition auprès de NSO Group d’un dispositif à large rayons d’actions. C’est donc cette technologie israélienne qui sera installée à Camtel, à MTN et à Orange. Désormais ils peuvent sur instruction, désactiver qui ils veulent quand ils veulent, quel village, quelle ville ou quelle région.

L’analyse des numéros WhatsApp du commando dont la connexion internet a été coupée a permis d’établir qu’ils utilisaient des numéros Camtel, Orange et Mtn pendant l’opération d’enlèvement et de torture de Martinez Zogo. Raison pour laquelle il revient aux responsables de Camtel, Orange et MTN d’éclairer l’enquête sur le donneur d’ordre de la suspension d’internet sur les téléphones d’agents de la DGRE.

Source: www.camerounweb.com