Ils expliquent les mobiles qui les ont poussés à dévaliser le nouvel immeuble abritant les services centraux de la direction générale des Impôts.
On sait maintenant la manière avec laquelle le nouvel immeuble-siège de la direction générale des Impôts (DGI) avait été cambriolé dans la nuit du 7 au 8 juin 2021, moins de huit mois après son inauguration. C’est grâce au «téléphone oublié à la charge» dans un bureau par l’un des bandits, le nommé M. Mengue Franky José, 30 ans, qui a permis d’interpeller tout le gang.
Le procès intenté contre les mis en cause, au nombre de quatre, s’est ouvert devant la Tribunal de grande instance (TGI) du Mfoundi le 31 août 2022. Aux côtés de M. Mengue déjà cité, M. Adamou Bello, 25 ans, M. Belibi Mballa Jean Marie, 32 ans, et M. Kana Alex, 31 ans, passent en jugement pour s’expliquer sur le cambriolage décrié. Alors que le tribunal avait programmé l’ouverture des débats pour cette audience, il a finalement repoussé le rendez-vous au 13 septembre. Mais l’acte d’accusation dressé à l’issue de l’information judiciaire que nous avons consulté résume les arguments des parties au procès.
Le témoignage fait par l’accusé Mengue devant le juge d’instruction permet en effet de reconstituer le filme du cambriolage. Ce dernier raconte que dans la journée du 7 juin 2022, alors qu’il passait non loin du siège de la DGI, il a remarqué qu’une porte du premier étage était entrouverte. Lorsqu’il est revenu sur les lieux vers 19h, rien avait changé «mais aussi il n’y avait aucun occupant». Ce qui l’a poussé à visiter le bâtiment plus tard avec l’espoir de trouver l’argent dans les bureaux. C’est à bord de la moto de son ami Adamou Bello qu’il s’est rendu sur les lieux du crime aux environs de 3h.
Pour accéder dans l’enceinte de la DGI, M. Mengue raconte qu’il avait escaladé «le mur en prenant appui sur un véhicule garé sous le balcon du bureau ciblé en journée». Tout s’est passé sans aucune difficulté, d’ailleurs «sur place, affirme-t-il, il a constaté que les policiers et vigiles de faction étaient endormis». Une fois à l’intérieur, après avoir passé un coup de fil à son ami Bello qui montait la garde pour lui faire part de la situation, il a mis son téléphone en charge dans un «bureau défoncé à coup de pieds» parce qu’il «menaçait de s’éteindre».
M. Mengue déclare avoir passé au peigne fin une dizaine de bureaux, en fouillant «méthodiquement» les tiroirs. Il a emporté la somme totale de 390 mille francs et deux disques durs externes d’ordinateurs. Alors que l’opération se déroulait sans heurts, mais vers 4h un agent d’entretien attiré par des «bruits suspects» a attiré l’attention des gardiens de l’immeuble. Paniqué, il a fait signe à M. Adamou Bello de s’éloigner des lieux, et lui-même s’est en fuit à travers une porte de secours en oubliant son téléphone portable à la charge. Pendant le partage du butin dans sa maison au quartier Nkolmbong, il a fait croire à M. Adamou Bello qu’il n’a volé que 40 mille francs. Il lui a remis le quart de ladite somme et un disque dur d’ordinateur.
Interrogé à son tour, M. Adamou Bello a nié pendant l’information judiciaire s’être retrouvé sur les lieux du crime avec M. Mengue. Il reconnait avoir reçu de son acolyte un disque dur d’ordinateur sans facture afin de le vendre pour se faire un peu d’argent de poche. Le disque dur allégué a été vendu à Alex Kana. Ce dernier avoue avoir acheté le bien querellé mais clame son innocence en disant qu’il ne savait qu’il provenait d’un vol.
Choc psychologique
Le cas de l’accusé Belibi Mbala est quelque peu intriguant. C’est lui qui dit avoir dénoncé son coaccusé Mengue à la brigade de Melen, après que ce dernier lui ait revelé avoir oublié son téléphone à la charge à la DGI. Ce qui a permis l’arrestation de ses compagnons d’infortune. Mais le juge d’instruction l’a renvoyé en jugement expliquant que sa démarche résulte simplement de la mésentente au moment du partage du «butin qu’il croyait très important».
En dehors de la DGI, une dizaine de ses agents se sont eux-aussi constitués partie civile (victime) dans le procès. Ces derniers déplorent la disparition des sommes d’argent allant de 10 à 450 mille francs qu’ils disent avoir gardées sinon sécurisées dans leurs bureaux respectifs. La disparition d’aucun autre bien n’est déplorée.
Entre autres, Eugène Gabriel Donfoue Tessop, chef service d’ordre à la DGI au moment des faits, se plaint de la disparition de 350 mille francs mise à sa disposition par sa hiérarchie, et destinée à l’achat du carburant, la manutention, le transport et la distribution du Code des impôts dans les services opérationnels des impôts de Yaoundé. Même si matériellement il n’a rien perdu du moment où les fonds emportés par les malfrats appartiennent à la DGI, M. Donfoue Tessop s’est quand même constitué. Il compte demander réparation pour le «choc psychologique enduré» après le cambriolage. Pour sa part, Mme Etoundi Mbia Marguerite épouse Evouna, assistante à la cellule des relations fiscales internationales signale quant à elle la disparition de 450 mille francs gardé dans son bureau du 6e étage.
Tous les accusés sont placés en détention provisoires à la prison centrale de Yaoundé. Ils n’attendent plus que l’ouverture des débats autour de leur procès pour s’expliquer sur les faits qualifiés de détournement de biens publics, de vol aggravé et de détention de cannabis. S’ils sont déclarés coupables, ils risquent une peine pouvant aller jusqu’en l’emprisonnement à vie.