Détournement, déclaration erronée : Amougou Belinga livré au juge

Les accusés font de graves révélations

Mon, 12 Dec 2022 Source: Le Jour du 12-12-2022

Affaire Amougou Belinga contre cadres de la DGI. La charge d’une accusée à l’audience de vendredi dernier, dans le procès intenté par le Pdg du groupe de médias contre huit inspecteurs de la Direction générale des impôts. Prochaine audience le 23 décembre.

C’est la punchline de l’audience du Tribunal de première instance de Yaoundé centre administratif, vendredi 9 décembre dernier, dans l’affaire Jean-Pierre Amougou Belinga contre huit cadres de l’administration publique respectivement inspecteurs des impôts et inspecteurs des régies financières à la Direction générale des impôts. Tous accusés, par le patron du groupe de médias, de concussion, de corruption et de trafic d’influence, des infractions présumées commises en mars 2022. Au milieu de la déposition de Pierre Sida, conseil fiscal de Vision 4 et témoin de l’accusation, Éméline Mvogo, inspecteur principal des impôts lâche, dans un vent de stupeur, « Vision 4 a reçu du Trésor publics des payements de 36 milliards FCfa entre 2017-

2020 ».

Représenté par ses avocats, Jean-Pierre Amougou Belinga n’est pas présent à l’audience. Des journalistes présents dans la salle d’audience s’empressent avec frénésie de prendre des notes. Quelques murmures fusent de la salle, vite tus toutefois par la suite de la déposition du témoin, qui dure quasiment cinq heures de temps, de 11h à environ 16h, sous la présidence du juge Onambele. Déterminée à laver son honneur qu’elle juge bafoué et aussi celui de ses collègues, Mme Mvogo, chef de centre régional des impôts du Centre l, placée sous mandat de détention provisoire à la prison centrale de Kondengui à Yaoundé du 19 mai 2022 au 10 juin 2022 dans le cadre de cette affaire, bat en brèche l’accusation selon laquelle les inspecteurs des impôts ont mal fait le travail de redressement fiscal de l’entreprise Vision 4, pour des desseins inavoués.

Elle évoque un rapport de l’Agence nationale d’investigations financières (Anif) comme base de l’émission des impositions faites à l’entreprise de Monsieur Jean-Pierre Amougou Belinga. Et rappelle les « difficultés de productions documentaires par vision 4 », malgré les relances restées infructueuses, des inspecteurs des impôts, souligne-t-

elle.

La punchline de Mme Mvogo n’est pas une simple phrase choc à l’emporte-pièce, pour faire sensation. Son avocat, Me Pierre-Alexis Bayebec en précise le sens et l’intérêt : « Démonter l’infraction de concussion pour prouver que l’impôt réclamé est dû ». En filigrane aussi, pointe une déclaration erronée d’impôts. « L’ensemble des marchés réalisés par Vision 4 sur la période 2017-2020 a-t-il été déclaré ? », insiste Mme Mvogo, visant Pierre Sida, dans le box des témoins. Mme Marguerite Ngono, inspecteur principal des impôts accusée elle aussi dans cette affaire va plus loin, brandissant la sanction prévue en cas de fausse déclaration :

« La comptabilité servie à l’administration fiscale ne donne pas une image fidèle, sincère du fonctionnement de Vision 4, ce qui l’expose aux sanctions de l’article 111 de l’acte uniforme Ohada », agite-t-elle, notant par ailleurs que Vision 4 a « pris la décision de présenter des écritures comptables inexactes.» Dans cette ambiance, Me Bayebec lance à Pierre Sida : « Ne pensez-vous pas que c’est pour avoir redressé Vision 4 que les inspecteurs ont subi les foudres du Pdg ? » Non, répond le conseil fiscal. Mitraillé de questions, ce témoin multiplie les esquives et semble perdre de sa superbe.

Des questions se bousculent, répétitives, traduction de l’insatisfaction des accusés et de leurs avocats Mes Mandeng, Achet, Bassong... Le conseil du témoin, l’ancien Bâtonnier Charles Tchoungang se voit même un moment obligé de bondir de son siège, pour mettre en garde : « harcèlement à l’audience du témoin ». Mais rien n’y fait, la pression ne retombe pas sur son client dont le témoignage est scruté. Il a été présenté comme le témoin clé du Pdg Jean-Pierre Amougou Belinga. Une pièce maîtresse de l’accusation, visiblement en déroute.

Dans le fond, sur l’inexactitude des écritures comptables présumées présentées au fisc par Vision 4, Pierre Sida s’abrite derrière la législation comptable et fiscale de la Cemac, « le nouveau règlement interdit aux conseils fiscaux d’exercer et de pratiquer les métiers comptables de même il est interdit aux experts comptables d’exercer les métiers fiscaux ». Il ne souhaite plus parler du contentieux, selon lui vidé par le comité de recours du ministère des Finances, répète-t-il. « Je ne réponds plus aux questions relatives au contentieux fiscal.

La lettre du ministre a clôturé la procédure contentieuse », peine-t-il. Gérard Amia, inspecteur principal des régies financières, du box des accusés, avec malice, lui assène : « Êtes- vous d’accord avec moi que vous avez donné des éléments erronés au ministre des Finances ? ». Allusion au fond du dossier du dégrèvement de près de 9 milliards FCfa, sur un redressement de 11 milliards, concédé par le ministère des Finances à Vision 4.

Sur la corruption présumée des agents du fisc dans l’anti-chambre du cabinet de Jean- Pierre Amougou Belinga, Pierre Sida a été amené à admettre qu’il n’a personnellement rien vu de la transaction alléguée. Ajoutant au sujet de quelque preuve en images : « Je n’ai jamais évoqué les questions de vidéo surveillance.» Avant de suspendre l’audience vers 16h, le président a appelé dans le box dédié, le deuxième témoin de l’accusation, Rose Olgane, Directeur des affaires financières et comptables du groupe l’Anecdote. Rendez-vous a été pris le 23 décembre pour sa déposition.

Source: Le Jour du 12-12-2022