Détournement de 5 milliards: le TCS pourrait amener de force la ministre Ketcha Courtes si...

Célestine Ketcha Courtes

Sun, 19 Feb 2023 Source: LA NOUVELLE N° 689

Attrait par devant le Tribunal criminel spécial (TCS) suite à une plainte de Conrad Dieudonné Bébé Ndi, le ministre de l’Habitat et du Développement urbain (Minhdu), Célestine Ketcha Courtès devrait s’expliquer sur des dénonciations de détournement de fonds publics par surfacturation et le non-respect du cahier de charges dans le cadre du programme C2D urbain « Capitales régionales ». Pourtant, si le Minhdu a là une bonne occasion pour se défendre, elle semble plutôt jouer dans l’intimidation, la fuite en avant et des pleurnicheries d’une femme cocufiée.

Dans son dossier de la semaine, votre journal, après avoir servi une demande d’informations restée sans suite à la concernée dans la journée du 14 février dernier, la plainte de Conrad Dieudonné Bébé Ndi explique le Programme C2D Capitales régionales non sans faire un détour sur l’embarras de l’Afd, financier du programme, qui a également été saisie par le même plaignant.

C’est depuis Londres où il séjourne que Conrad Dieudonné Bébé Ndi a saisi, le 28 janvier 2023, le procureur général près leTribunal criminel spécial (Tcs), d’une plainte dans laquelle il accuse le ministre de l’Habitat et du Développement urbain (Minhdu) d’un détournement « en bande savamment organisée dans le cadre du programme C2D-Urbain « capitales régionales » d’un détournement de 5 619 266 173 Fcfa (cinq milliards six cent dix-neuf millions deux cent soixante-six mille cent soixante-treize Fcfa).

La plainte-dénonciation de Conrad Dieudonné Bébé Ndi contre Célestine Ketcha Courtès, ministre de l’Habitat et du Développement urbain (Minhdu), inonde profusément depuis quelques temps plusieurs plateformes numériques. Elle prend ancrage sur les travaux de construction et de réhabilitation des infrastructures de voirie et de drainage dans la ville de Bertoua, dans le cadre du programme C2D urbain « Capitales régionales ». Selon l’auteur du pamphlet, tout part du constat de l’existence de multiples dégradations sur les routes et voiries du territoire national, et la recherche effrénée des solutions palliatives à moindre coûts, d’une durabilité d’au moins 25 ans pour la construction et la réhabilitation et l’entretien future des routes et voiries de notre pays. Ce qui aurait motivé la signature par le Premier ministre du décret N°2016/0848/Pm du 20 avril 2016, fixant les conditions d’utilisation des produits innovants dans l’entretien routier.

Dans la foulée, le ministre délégué à la présidence de la République chargé des Marchés publics va à son tour parapher des contrats à hauteur de plus de 53 milliards de Fcfa au nom du maitre d’ouvrage (le Minhdu) sur les linéaires dans 3 villes à savoir : 21,88 Km de voiries pour la ville de Bafoussam ; 15,36 Km de voiries pour la ville de Bertoua et 22,20 Km de voiries et 7,77 km de drains pour la ville de Garoua. Pour la mise en œuvre de ce projet, plusieurs techniques sont alors proposées dans le Programme C2D, pour une comparaison desdites techniques concurrentielles de réduction du prix du kilomètre de route. Seulement indique l’auteur du pamphlet, le Minhdu va obstinément soutenir la technique dite Béton compacté à rouleau (Bcr) dont le mètre carré de voirie est facturé á 110 000 Fcfa sur 7 mètres de large et 15 cm d’épaisseur. Le kilomètre de voirie revenait ainsi á un 1 100 000 000 de Fcfa pour la ville de Bertoua, réalisé par le groupement Sogea Satom/Mag Sarl, alors qu’en utilisant la technique dite de « Chaussée composée » (Tcc), le coût du mètre carré est de 16 500 Fcfa et le kilomètre revenant á 150 851 250 de Fcfa sur 7 mètres de large et 15 cm d’épaisseur.

PRIX UNITAIRES

« J’étais parmi ceux qui proposaient les techniques de réduction du prix du kilomètre de voirie au Cameroun avec une solution idoine, durable et efficace au bénéfice de nos populations », soutient mordicus Conrad Dieudonné Bébé Ndi qui prétend qu’il est de ceux qui ont d’ailleurs suivi les négociations de ce projet de bout en bout. Seulement, dans l’annexe 4 du chapitre XIII 4 contenu dans le cahier de charges, relativement au traitement de sols avec les produits innovants d’amélioration ou stabilisant de sol, le Minhdu va s’abstenir de respecter ladite clause pour les planches d’essais expérimentales qui devaient être procédées à des mesures sur le terrain, afin de déterminer avec précision les effets des produits sur la portance du sol considéré et ainsi définir les épaisseurs de chaque couche de chaussée. Ceci, sous le strict contrôle du Labogénie. Car, estime notre source, l'objectif de cette étude visait à parvenir à une typologie des ouvrages de voirie qui devrait permettre aux agents techniques travaillant sur le terrain de choisir les techniques les mieux adaptées aux conditions locales.

DEBROUSSAILLAGE

Plus grave et c’est certainement là où le bât blesse, « nous avons découvert que les prix unitaires des différentes tâches des travaux ont été surfacturés en complicité avec les hauts responsables du ministère de l’Habitat et du Développement urbain. Tous les détails sont disponibles dans un tableau comparatif des prix, soutient Conrad Dieudonné Bébé Ndi, avant de poursuivre, dans les détails quantitatifs et estimatifs du lot 2, Bertoua que j’ai pu avoir la documentation, sans toutefois avoir accès aux termes de référence qui ont permis d’élaborer le Dao ». A en croire le plaignant, sous le contrôle des ingénieurs indépendants de génie civil, première observation flagrante, le coût de l’installation du chantier (bureaux, laboratoire) varie de 1 à 5% en fonction du montant hors taxe du projet, le coût total du projet était de 11 369 396 815 Fcfa, le taux de pourcentage devait être à 2,5% du montant total du projet.

Montant surfacturé : 233 871 991 Fcfa sur 11 Km, juste pour l’installation de chantier. 2ème observation et pas des moindres. Toujours sous le contrôle des ingénieurs indépendants de génie civil, le coût du nettoyage et débroussaillage, le mètre carré varie de 50 à 100 Fcfa. Mais ils ont facturé et validé le mètre carré à 1 061 Fcfa, montant surfacturé 171 024 926 000 Fcfa. « Sous réserve des termes de référence indiquant le débroussaillage dans la ville de Bertoua pour un linéaire 177 966 mètres carré, pour ne prendre que les 2 rubriques dans les détails quantitatifs et estimatifs de ce marché, nous sommes déjà à 171 258 797 991 Fcfa de surfacturation.

Plus grave encore, estime le même auteur du pamphlet aujourd’hui sur la table du procureur général près le TCS, le Minhdu en complicité avec les entreprises qui ont gagné le marché n’a pas respecté le volet de l’utilisation des produits innovants dans les spécifications des travaux techniques de l’annexe 4 du chapitre XIII 4 dans le cahier de charges ». Pour Conrad Dieudonné Bébé Ndi, « le montant total surfacturé après négociation de ces deux entreprises que nous allons fournir les éléments dans un tableau comparatif de facturation est 5 201 081 086 Fcfa ». Du véritable grain à moudre pour les fins limiers du TCS.

Source: LA NOUVELLE N° 689