DGRE : un nouveau colonel débarque

Nomination au sein de l'armée

Thu, 28 Sep 2023 Source: L'Œil du Sahel n°1851 du 27 septembre 2023

La nomination est tombée il y a des jours. Le colonel Armand Béyem Ebanga est un briscard. Il connait bien le service de renseignement, la fameuse Direction générale de la recherche extérieure (DGRE) dirigée par Léopold Maxime Eko Eko qui se trouve actuellement en prison pour l’affaire de l’assassinat du journaliste Martinez Zogo.

Béyem a été tour à tour porte-fanion du général de brigade Directeur général de la recherche extérieure (DGRE) de 1998 à 2000. En matière de renseignement, il est calé. Même en 2005, le Colonel a été rappelé à Yaoundé pour faire valoir son expérience en matière de renseignement comme chef de service renseignement de la gendarmerie nationale à Yaoundé. C’est donc tout naturellement que le journal L'Œil du Sahel écrit les phrases qui suivent.

En installant le colonel Armand Béyem Ebanga jeudi dernier dans ses nouvelles fonctions de commandant de la Légion de gendarmerie de l’Adamaoua, le général Pierre Louba Zal, commandant de la 3e région de gendarmerie, n’est pas allé du dos de la cuillère en terme de recommandations. « Eu égard aux considérations sus évoquées, le phénomène de grand banditisme urbain, rural et transfrontalier, devra être combattu permanemment. S’agissant précisément du grand banditisme rural et transfrontalier, un accent particulier devra être mis sur la lutte acharnée contre le phénomène d’enlèvement de personnes, assortis de demandes de rançons, les coupeurs de route, les vols de bétails, les trafics divers, notamment ceux liées aux armes, aux munitions, aux ossements humains », a martelé le général Pierre Louba Zal.

En réalité, ces recommandations du patron de la 3e région de gendarmerie basée à Garoua, sont liées aux maux qui minent la région « Château d’eau » du Cameroun depuis un certain temps. Des cas de trafics d’ossements humains sont devenus légion dans la région de l’Adamaoua, notamment à Méiganga dans le Mbéré, à Tibati dans le Djérem et même à Ngaoundéré, capitale de cette région. Des sources policières annoncent la profanation des tombes çà et là dans la ville de Ngaoundéré.

Malheureusement, les principaux acteurs qui sont interpelés seraient souvent libérés après des interventions de personnalités insoupçonnables de la République, ou même à fortes sommes d’argent, selon des dires. « Ces ossements humains sont utilisés comme une drogue. Les adeptes vous disent qu’elle est plus puissante que la cocaïne. Autre chose qui semble être importante, il semblerait que, si vous avez un kilogramme de poudre d’ossement humain, et vous la mélangez avec un kilogramme d’or, vous obtenez directement deux kilogrammes d’or. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’on l’appelle aussi or blanc », renseigne une source policière.

C’est dire que le nouveau commandant de la légion de gendarmerie de l’Adamaoua, devra bien retrousser ses manches pour faire face à cette situation. Aussi, Armand Béyem Ebanga qui a pris le commandement jeudi dernier au Centre d’instruction des forces armées de Ngaoundéré (Cifan), devra prendre en compte les troubles sociopolitiques dans certains pays voisins frontaliers du Cameroun, ainsi qu’à l’intérieur du pays avec les séparatistes.

« Gardez à l’esprit que vous êtes désormais appelé à exercer votre commandement dans une région sensible et dont la position hautement stratégique n’est plus à démontrer. En effet, la région de l’Adamaoua est frontalière à deux pays : la RCA à l’Est et le Nigeria à l’Ouest. Frontières poreuses et sujettes malheureusement aux incursions sporadiques de groupuscules armés venant de ces pays voisins, en quête de moyens de subsistance. La région de l’Adamaoua est un grand carrefour qui s’ouvre au Grand-Nord d’une part et au Grand-Sud d’autre part. En outre, du fait de son voisinage avec la région du Nord-Ouest, elle héberge de nombreux déplacés internes en même temps qu’elle est exposée aux diverses exactions des séparatistes », a rappelé le général Pierre Louba Zal.

Pas d’état de grâce. La région de l’Adamaoua est aujourd’hui un eldorado en matière d’or, notamment dans la localité de Mbé. Les médicaments de contrebande et le carburant frelaté communément appelé « zoua-zoua » sont vendus aujourd’hui même devant certaines administrations publiques. Et l’attention du colonel Armand Béyem Ebanga a été attirée sur tout ça, ainsi que les accidents de la route. « L’orpaillage clandestin, la contrebande, le braconnage au demeurant, le haut commandement attache une importance particulière au phénomène de l’insécurité routière, autre grande menace que vous devez prendre en compte et ne jamais perdre de vue, compte tenu de la tendance haussière des accidents de la circulation routière », a souligné le commandant de la 3e région de gendarmerie.

« Je suis très heureux ce jour au moment où je prends les commandes de la légion de gendarmerie de l’Adamaoua. Je me dois de me mettre au travail dès à présent pour confirmer cette confiance que le chef des armés, président de la République S.E Paul Biya, a bien voulu placer en ma modeste personne. Ainsi, je me dois de mettre en pratique toutes ces recommandations faites par le commandant de la 3e région de gendarmerie », rassure le colonel Armand Béyem Ebanga.

D’ailleurs, ce dernier n’aura aucun choix que de se mettre au travail, car sa hiérarchie ne lui fera pas de cadeau. « Je me dois d’attirer votre attention sur l’ampleur et les enjeux de vos nouvelles responsabilités. Il vous appartient d’appréhender rapidement toute la mesure des défis qui vous interpellent désormais. Il n’y aura pas d’état de grâce. Votre nomination intervient dans un contexte sécuritaire particulier où les forces de défense et de sécurité sont interpelés sur plusieurs fronts pour sécuriser au quotidien les populations et leurs biens », a souligné le général Pierre Louba Zal.

Toutefois, pour réussir à bien sa mission, le nouveau commandant de la légion de gendarmerie devra également composer avec la population. Une campagne de séduction de cette population doit être lancée afin de remettre celle-ci en confiance pour bénéficier en retour d’une bonne collaboration en termes de partage de la bonne information à temps. « Dès lors, vous devez maitriser au plus vite votre nouvel environnement politique, socioéconomique et sécuritaire en inscrivant la recherche du renseignement prévisionnel au cœur de vos actions. Vous devez être proche des populations mieux que par le passé, les écouter, les rassurer, les protéger, les mettre en confiance afin de susciter leur adhésion à vos actions », a souligné le général Pierre Louba Zal.

Source: L'Œil du Sahel n°1851 du 27 septembre 2023