Des habitants assiègent la brigade de gendarmerie

2830 Gendarmerie Camerounaise270715750 Photo utilisée juste à titre d'illustration

Sat, 19 Dec 2015 Source: L'Oeil du Sahel

Le prénommé Jean-Paul peut s’estimer heureux. Interpellé le 12 décembre 2015 pour son rôle présumé dans les pillages qui ont suivi la proclamation des résultats des élections à la tête de la section Rdpc, il n’aura finalement passé que quelques minutes dans les locaux de la brigade de gendarmerie.

Car, ses parents, amis, camarades et voisins, sortis nombreux aussitôt après son arrestation, ont pris d’assaut la brigade territoriale de Kaï-Kaï. Armés de gourdins, de machettes et de leurs traditionnels couteaux, ils voulaient en découdre avec les gendarmes. «Comme à leur habitude, ils sont venus très nombreux. Ils ont exigé que le suspect soit libéré à l’immédiat.  Nous sommes rentrés en négociation avec eux et finalement, nous avons cédé», confie un gendarme en poste dans cette brigade. Fiers de cette «victoire» sur les forces de  l’ordre, les habitants sont retournés chez eux en compagnie de leur fils.

La brigade de gendarmerie de Kaï-Kaï et les fonctionnaires en service dans cet arrondissement sont régulièrement confrontés à la bravade des populations, qui n’ont pas beaucoup d’égard pour les agents publics. «Il ne fait pas bon vivre dans ce village. S’il me reste une chose à faire, c’est de chercher à partir d’ici. Les gens se comportent comme s’ils sont au-dessus des lois», s’indigne un fonctionnaire. Il y a presque deux semaines, des gendarmes ont essuyé une défaite similaire sur la place du marché face à certains habitants furieux.

Venus interpeller un jeune homme poursuivi pour détournement de deniers publics au préjudice des Jeunes Volontaires de l’Agence du Service Civique National de Participation au Développement (Ascnpd), des éléments des forces de l’ordre, pourtant armés de kalachnikovs, n’ont eu pour seule solution que de battre en retraite. La farouche opposition était orchestrée par des membres de la famille du présumé délinquant.

La recrudescence de l’incivisme à Kaï-Kaï ne semble pas pourtant émouvoir certains ressortissants de cet arrondissement. «Notre village n’a pas le monopole de l’incivisme au Cameroun. A Tcholliré dans le Mayo-Rey, le lamido et non moins vice-président du Sénat, se comporte en véritable dictateur sans que personne ne lève le petit doigt», soutient une élite. Le maire, Jérémie Assiemsya, lui, se désole de ces agissements «rétrogrades » des populations.

«L’Etat devrait renforcer l’effectif des gendarmes afin que l’ordre règne à Kaï-Kaï», souligne- t-il. Un avis que partagent les responsables de cette unité puisqu’«il y a moins de dix gendarmes en service pour un arrondissement aussi vaste». En attendant, le chef de l’exécutif communal dit avoir sollicité du renfort auprès des autorités du département, mais «les choses ne semblent pas bouger dans le bon sens».

Depuis les pillages du 30 novembre 2015, les habitants de Kaï-Kaï, chef-lieu de l’arrondissement du même nom, se regardent en chiens de faïence. Et la dizaine des manifestants interpellés attendent d’être déférés devant le procureur de la République près les Tribunaux de Yagoua pour être fixés sur leur sort.

Source: L'Oeil du Sahel