Le Magazine Jeune Afrique vient de publier un dossier approfondi concernant la crise qui secoue actuellement l'Assemblée nationale au Cameroun.
A en croire Jeune Afrique, de nombreux analystes ne sont guère étonnés par la situation financière critique de l'Assemblée nationale, étant donné que les signes avant-coureurs se sont accumulés au fil des années. Selon l'opinion de ces experts, les premières alertes ont été observées il y a près de dix ans, alors que Victor Yene Ossomba occupait toujours le poste de secrétaire général de la chambre basse.
Lorsque Paul Biya nomme cet ancien gouverneur à ce poste délicat le 15 février 2010, rappelle Jeune Afrique, l'Assemblée nationale cherche à clore deux années marquées par des tensions entre son président Cavaye Yéguié Djibril et son secrétaire général Louis Claude Nyassa. Affaibli par la maladie après une longue carrière dans l'administration, Yene Ossomba prend rapidement la mesure de la situation. Cet ancien gouverneur choisit d'éviter tout conflit avec les personnalités influentes de l'hémicycle, notamment les membres de son bureau.
« L'Assemblée a connu un tournant sous la direction de Yene Ossomba », explique un ancien membre de l'assemblée à Jeune Afrique. « Les questeurs ont commencé à délaisser leur rôle de superviseurs des finances pour endosser celui de gestionnaires. » Alors que la tolérance de Victor Yene Ossomba permet à l'Assemblée de se préserver des luttes pour le leadership, des pratiques de corruption, de clientélisme et de favoritisme commencent à se tisser en son sein. Le cabinet du président de l'Assemblée, dirigé par son gendre Boukar Abdourahim depuis 2015, gagne en influence. Cela se fait au détriment du secrétariat général.
« Le règlement intérieur de l'Assemblée est assimilé à une loi, et il stipule que le SG est le coordonnateur du budget », ajoute notre source. « Cependant, du jour au lendemain, on a observé l'empiètement du cabinet du président sur presque toutes les décisions administratives de l'Assemblée. Associé à cela, le fait que les questeurs chargés de surveiller les finances ont commencé à donner des orientations sur les décisions de gestion, cela ne pouvait que générer des dysfonctionnements. »
Lors de l'incendie du siège de l'Assemblée en novembre 2017, des informations font état de la destruction de 200 millions de francs CFA appartenant à un député, dont l'objet demeure inconnu, pointe Jeune Afrique. En 2019, un autre événement incompréhensible survient : 300 millions sont dépensés pour financer une fonctionnaire du ministère des Finances chargée de faire du lobbying pour une augmentation du budget de l'Assemblée. Sans oublier cette masse pléthorique de personnel, comprenant environ 700 individus selon un recensement effectué en 2020, auxquels s'ajoutent environ 500 nouveaux recrutements. Cela aboutit à une masse salariale dépassant 70 % du budget annuel.
Est-ce que cette passivité dans la gestion a été le secret de la longévité du secrétaire général Victor Yene Ossomba ? Au cours des vingt dernières années, personne n'a pu occuper ce poste pendant sept ans consécutifs, sauf cet administrateur, dont les fonctions se sont achevées avec son décès en 2017. Ni son successeur Désiré Geoffroy Mbock, qui a occupé le poste entre 2018 et 2019, ni Gaston Komba, nommé en 2020 après un intérim d'un an assuré par Abdoulaye Daouda, n'ont réussi à inverser la tendance, relance Jeune Afrique