Des ministres se rebellent contre la Conac

Le Président De La CONAC, Dieudonné Massi Gams Minrex, Minsep, Minfi, Mincom, Minas...la liste est longue

Fri, 6 Jan 2017 Source: fr.allafrica.com

Malgré leur présence aux deux ateliers organisés par la Commission nationale anti-corruption (Conac) en vue de la rédaction finale du Rapport 2015 rendu public le 29 décembre dernier à Yaoundé, les patrons de ces départements ministériels de souveraineté, n'ont pas cru devoir faire parvenir à la Commission, leurs contributions, en dépit de multiples relances téléphoniques.

Bras de fer, excès de zèle, prudence, bouderie, désaveu, méprise ou abus de pouvoir ? Cela doit être tout ça à la fois. Certains membres du gouvernement Yang, interpellés par la Conac, se renferment comme des huîtres dans leur coquille. Leur absence à la cérémonie solennelle de présentation du Rapport sur l'état de la lutte contre la corruption, démontre à suffire qu'ils ne se reconnaissent pas dans la batterie d'actions engagées par l'organisme que dirige Dieudonné Massi Gams depuis 10 ans.

«Malgré la participation de leurs représentants aux ateliers organisés par la Conac, certaines administrations n'ont pas cru devoir faire parvenir à la Conac leurs contributions, en dépit de multiples relances téléphoniques», a tenu à dénoncer le Pr Anoukaha François, vice-président de la Conac, en présentant sommairement ledit Rapport devant une salle noire de monde.

Ces ministères rebelles dont les représentants ont pourtant pris part aux deux ateliers organisés par la Conac en vue de la rédaction finale dudit Rapport, en l'occurrence l'atelier de renforcement de la collaboration entre la Conac et les cellules de lutte contre la corruption existantes et celui avec les représentants des communautés religieuses et des organisations de la société civile, avaient jusqu'au 5 septembre pour réagir. Un délai de rigueur qu'ils ont choisi d'ignorer royalement, ouvrant la porte à une pléthore d'interprétations à tout le moins légitimes.

En parcourant le volumineux document dense de 379 pages, structuré en cinq parties, l'on apprend que ces grands ministères qui se recrutent parmi les plus importants de la vie de la nation se considèrent certainement comme des intouchables.

Ce sont entre autres, les ministères de l'Administration territoriale et de la décentralisation, de la Défense, des Relations extérieures, des Finances, des Domaines, du cadastre et affaires foncières, de l'Eau et de l'énergie, de l'Agriculture et du développement rural, des Transports, des Sports et de l'éducation physique, des Affaires sociales, et de la Communication.

Faut-il donc en conclure que ces rebelles veulent rayer la Conac de la liste des gardiens de la fortune publique ? Au moment même où des sources autorisées laissent entendre que certains lobbies aux desseins inavoués tentent de freiner l'action de cet organisme avec pour intention de décréter sa mort pour continuer sereinement leur sale besogne.

6 milliards de FCFA recouvrés en 10 ans

Malgré cette réticence, les fins limiers de la Conac qui ont travaillé d'arrache-pied, en collaboration avec 57 structures (dont 17 organisations de la société civile et deux communautés religieuses) contre 38 pour le rapport 2014 dont quatre organisations de la société civile, ont produit ce Rapport qui illustre les efforts de la Conac et souligne l'action des juridictions de fond, à l'instar de la Cour suprême et du Tribunal criminel spécial (Tcs). On y apprend, par exemple, que le Tcs a, au cours de l'année 2015, rendu 46 décisions dans le cadre des détournements des deniers publics (établi ou tentative).

Dans le cadre du recouvrement des fonds, en 10 ans d'existence, près de six milliards de Fcfa ont été recouvrés et versés dans les caisses du Trésor public. «Ces fonds sont issus du recouvrement fiscal sur Mtn Cameroun, Broadband Communication Ltd et des grossistes des industries brassicoles du Littoral, des faux virements de salaire et pensions, de la gestion des fonds Ppte, entre autres», indique le rapport.

Fonctionnaires véreux

Autre révélation, 10,2 milliards sont en cours de recouvrement, à la suite des dénonciations et enquêtes de la Conac. Cette institution ayant découvert, dans le cadre de la construction du Complexe industrialo-portuaire de Kribi, une dépense injustifiée de près de 19,2 milliards de Fcfa, créée par des fonctionnaires véreux et mise à la charge du contribuable. Tout comme ledit Rapport indique que les sociétés de téléphonie mobile doivent 170, 5 milliards de Fcfa à l'État et à l'Agence de régulations des télécommunications, au titre d'impôts et taxes.

Ces résultats sont complétés par d'importantes actions menées en 2015. Selon Dieudonné Massi Gams, «le nombre de dénonciations enregistrées par la Conac, est passé de 164 en 2008 à 3268 en 2015, soit un cumul de 13149 sur les sept ans». A bon entendeur...

Cameroun, un pays pourri

Le combat continue mais la gangrène ne cesse de ronger. Autant l'avouer, la situation empire. Pas moins de 21 dossiers ont été transmis aux autorités compétentes, en l'occurrence les tribunaux. Il s'agit d'affaires ayant abouti à des convictions d'infractions, notamment des faux et usage de faux, des détournements de deniers publics, des flagrants délits d'escroquerie, des usurpations de titres, des faux poids de mesure, d'achat illégal de cacao, d'abus de fonction et d'exploitation illégale d'une profession.

Les secteurs concernés étant les établissements scolaires, les exploitations forestières, les ports, des entreprises publiques et parapubliques, les sociétés de téléphonie, les hôpitaux de référence,... les délits d'initié, la prise d'emploi prohibée, la corruption dans les concours administratifs et examens, le blanchiment d'argent au moyen de jeux et loteries, la corruption des agents du secteur privé, la non-déclaration du conflit d'intérêt, les défauts comptables, la tenue irrégulière ou l'absence de compatibilité.

Les acteurs en étant les fonctionnaires ou agents publics étrangers ou internationaux, les employeurs et les personnes morales. Et la Conac évalue à 171 milliards 843 millions 239 mille 983 FCFA le préjudice subi par l'Etat et consécutif aux imputations formulées sur la base des conclusions des enquêtes faites par la Conac en 2015. Shame !

Source: fr.allafrica.com