Don d'ordinateurs: une promesse électoraliste?

Marche Des étudiants à Yaoundé Les étudiants soupçonnent une promesse électoraliste

Mon, 31 Jul 2017 Source: 237online.com

Campus de l’université de Yaoundé II-Soa. Il est 13h 30minutes, ce vendredi 27 juillet 2017. Quelques va-et-vient seulement des étudiants sur les artères de l’établissement public qui, contrairement à l’accoutumée, grouillent de la marée universitaire. La raison de cette accalmie est liée, apprend-t-on, au fait que les cours sont terminés, et la plupart des étudiants préparent les concours administratifs. Si certains sont encore là, c’est bel et bien pour compléter leurs crédits d’examens en participant aux épreuves de rattrapage. Toutefois, sur le site ensoleillé, le cœur des conversations bat de nouveau sur « la réception du premier lot d’ordinateurs attendu au Cameroun en fin décembre 2017 », telle qu’annoncé par Jacques Fame Ndongo, ministre de l’Enseignement supérieur (Minesup), dans un communiqué rendu public vendredi 21 juillet. Environ un an après le début de la mise en œuvre du projet dénommé « un étudiant, un ordinateur », signé entre le Minesup et la société chinoise Sichuan Telecom construction and engineering Co Ltd, les étudiants soupçonnent que les ordinateurs garantis par le pouvoir de Yaoundé aient pris implicitement une coloration politique. «J’avais foi d’en bénéficier pendant l’année académique qui s’est écroulée. Mais dire maintenant qu’ils seront disponibles en fin 2017, c’est-à-dire 2018, j’ose croire qu’ils n’avaient qu’une finalité politique. On aurait tout simplement dû nous dire qu’ils seront disponibles en 2018, au lieu de nous faire attendre depuis longtemps», admet Oumarou, étudiant en sciences politiques.

« Pleine année électorale, 2018 »

Même son de cloche du côté des établissements universitaires privés. Notamment l’institut universitaire Siantou et l’université catholique d’Afrique centrale. Pantalon jeans, chemise noire, Kees Cornelis, étudiant en journalisme, déclare que les ordinateurs promis aux « étudiants réguliers et éligibles dûment inscrits au fichier national des étudiants de l’année académique 2016-2017» font partie de la campagne électorale du président en vue de l’élection présidentielle de 2018. Pour lui, le chef de l’Etat aurait bien pu distribuer ces machines depuis l’année dernière. Un point de vue partagé par Emmanuel Nsangou, historien des relations internationales pour qui, « la réception du premier lot d’ordinateurs attendu au Cameroun en fin décembre 2017 » est une façon de battre campagne pour chercher à attirer les jeunes qui constituent le gros des électeurs. « C’est un scénario bien programmé », glisse-t-il. « Sinon, pourquoi attendre un an après l’annonce du don des ordinateurs pour les distribuer? Pourquoi attendre que nous soyons en pleine année électorale 2018 pour pourvoir octroyé ce don aux étudiants », s’interroge pour sa part Stéphane Tiomene, étudiant en histoire. Il admet que le geste « android » de Paul Biya à la jeunesse n’est pas a priori dénué de tout intérêt. « Quand M. Biya, dont on connaît la sagesse, décide d’octroyer des ordinateurs aux étudiants, c’est parce qu’il voudrait en quelque sorte les mettre dans son escarcelle politique. Demain, c’est cela qui fera partie de ce qu’il appellera son bilan universitaire », martèle-il, tenant entre ses bras un ouvrage intitulé « Le code Biya ».

Par ailleurs, pense Berlin Mola, étudiant en physique à l’université de Ngoa-Ekellé, les ordinateurs ne sont pas répondre des besoins « prioritaires » des étudiants. « La majorité des étudiants ont déjà des ordinateurs. Les étudiants ont d’autres problèmes plus importants pour leur formation académique. Par exemple, le laboratoire de physique n’est pas équipé. Il n’y a pas de matériels pour les travaux pratiques. Les cours qui devraient être pratiques sont théoriques », regrette-il. Concernant les précisions sur le don d’ordinateurs, le Minesup a fait savoir que chaque institution devrait publier la liste des étudiants de l’année académique 2016-2017 éligibles au programme par établissement, cycle et niveau. S’il arrive que certains étudiants soient déclarés non éligibles au programme, leurs institutions devront signaler les différentes raisons. De plus, après épuisement des requêtes et délivrances des cartes d’étudiants, chaque institution est appelée à transmettre au Minesup le fichier biométrique des étudiants éligibles au programme en vue de la confection du « fichier national biométrique » des étudiants de l’année académique 2016-2017. Ce qui montre que la distribution des ordinateurs sera sans doute par identification biométrique des bénéficiaires dans les centres de distribution qui seront installés par le Minesup, fait-on savoir. Ce processus vise à construire une base de données biométrique afin d’identifier de façon fiable les étudiants, de maîtriser les effectifs réels et de garantir l’unicité de l’étudiant, quel que soit le nombre d’institutions où il est inscrit. Si plusieurs étudiants interrogés pensent que le processus d’enrôlement biométrique complexifie le don présidentiel lié notamment à l’année académique 2016-2017 écoulée, une source proche du dossier au Minesup, indique que les étudiants peuvent encore s’enrôler auprès de leurs établissements respectifs en mettant à jour leurs coordonnées (numéro de la CNI, adresse émail, numéro de téléphone, etc.,) à partir, par exemple, d’une plateforme. Ceci avant la transmission finale au Minesup. La date limite de l’enrôlement est fixée en septembre 2017. En cas d’un quelconque blocage, les étudiants doivent s’approcher de la salle multimédia de l’établissement pour soumettre le problème.

Source: 237online.com