Du jamais vu dans l'Extrême-Nord. Le candidat à la présidentielle Issa Tchiroma Bakary a été accueilli par une foule immense à son retour à Kousseri, quelques heures après avoir été bloqué aux frontières camerounaises. Un bain de foule historique qui transforme un incident diplomatique en triomphe politique.
Ce qui devait être un incident embarrassant s'est transformé en démonstration de force politique. Issa Tchiroma Bakary, candidat à l'élection présidentielle du 12 octobre 2025, a été accueilli par une foule des grands jours à son arrivée à Kousseri, dans l'Extrême-Nord, après avoir finalement pu regagner le territoire camerounais dans la nuit de mardi à mercredi.
Selon les informations relayées par l'activiste Patrick Mba'lla sur les réseaux sociaux, l'ancien ministre de la Communication aurait quitté le territoire camerounais ces dernières heures pour se rendre au Tchad, à Ndjamena, avant de tenter de rentrer par la frontière de Kousseri. À son arrivée aux postes-frontières camerounais, les forces de sécurité auraient initialement bloqué son passage, créant une situation de tension en pleine nuit.
"Alors qu'il s'était rendu à Ndjamena au Tchad pour récupérer de l'argent (origine douteuse), Issa Tchiroma se trouve en ce moment bloqué en pleine nuit au Tchad juste à l'entrée de la frontière camerounaise", avait publié Patrick Mba'lla, ajoutant qu'il était "interdit à un homme politique en campagne de passer par un pays étranger pour rentrer clandestinement dans son pays d'origine".
L'activiste proche du pouvoir avait même demandé aux services de police aux frontières d'ouvrir une enquête et de fouiller "de fond en comble" le véhicule du candidat.
Mais c'est finalement un tout autre scénario qui s'est déroulé. Après plusieurs heures de négociations et de tractations, Issa Tchiroma Bakary a pu franchir la frontière et pénétrer sur le territoire camerounais. Et c'est là que le spectacle a commencé.
Des milliers de sympathisants, informés du blocage de leur candidat, s'étaient massés dans les rues de Kousseri pour l'accueillir. Des scènes de liesse populaire rarement vues dans cette ville frontalière ont marqué son arrivée. Drapeaux aux couleurs de sa campagne, chants, danses traditionnelles : l'accueil réservé à l'ancien ministre a pris des allures de victoire anticipée.
"C'est du jamais vu à Kousseri ! Le peuple a montré qu'il ne se laissera pas intimider. Plus on essaie de nous bloquer, plus nous sommes déterminés", s'est exclamé un militant présent sur place, préférant garder l'anonymat.
Cet incident n'est pas le premier du genre pour Issa Tchiroma Bakary. Il y a quelques mois, le candidat avait tenté de se rendre au Sénégal où il prévoyait d'aller se recueillir sur la tombe de l'ancien président du Cameroun, Ahmadou Ahidjo. Mais il avait été empêché de prendre son vol et finalement interdit de sortir du territoire camerounais, sans explications officielles.
"Ils m'ont interdit de sortir, maintenant, je suis interdit de sortir du pays carrément… Encore 70 jours, le compte à rebours de leur fin est enclenché...", avait déclaré Tchiroma lors d'une rencontre avec des jeunes, faisant référence à l'échéance électorale.
Pour les observateurs de la scène politique camerounaise, ces incidents à répétition pourraient paradoxalement servir la campagne de l'ancien ministre. En se présentant comme victime d'un système qui tente de l'empêcher de mener sa campagne, Issa Tchiroma Bakary renforce son image de candidat anti-système, celui qui dérange le pouvoir en place.
Le bain de foule de Kousseri, dans l'un des bastions du septentrion camerounais, envoie un message fort : les tentatives de restriction de ses mouvements ne font qu'accroître sa popularité sur le terrain. Chaque blocage se transforme en opportunité de mobilisation, chaque obstacle en argument de campagne.