Des récents témoignages recueillis par Reporters sans frontières (RSF) pourraient jeter une lumière nouvelle sur l'affaire Martinez Zogo au Cameroun. Jeune Afrique a contacté Arnaud Froger, responsable du bureau investigation chez RSF, qui a confirmé ces allégations troublantes. Pourtant, malgré ces avancées, des zones d'ombre persistent et la crédibilité de l'enquête demeure sujette à des doutes.
Dans une série de témoignages rendue publique le 3 août, RSF révèle des éléments qui pourraient contribuer à éclaircir les circonstances entourant l'assassinat du journaliste camerounais Martinez Zogo, survenu le 17 janvier. Parmi les témoins se trouve l'un des treize agents de la Direction générale de la recherche extérieure (DGRE) impliqués dans cette affaire. Celui-ci rapporte : « À un moment, je suis allé lui chercher de l'eau. À mon retour, il avait l'oreille coupée ». Ces nouveaux témoignages visent à lever le voile sur une affaire qui continue de soulever de nombreuses questions.
L'énigme demeure : s'agissait-il d'un projet d'assassinat prémédité ou d'une agression qui a dégénéré en passage à tabac ? Les traces d'acides détectées sur le visage de la victime, comme mentionné dans le rapport d'autopsie, restent à expliquer. De plus, le rôle du locataire du véhicule utilisé pour la traque ainsi que celui du mystérieux commando qui a perturbé l'enlèvement demeurent des zones d'ombre à élucider. Ce commando était dirigé par le colonel Justin Danwe.
Jeune Afrique a réussi à joindre Arnaud Froger, responsable du bureau investigation chez RSF. Il a confirmé que « ces éléments nouveaux viennent du fait qu'on a eu accès à trois agents du commando emprisonné [13 au total ayant supposément participé à l'assassinat], à des sources proches du dossier ainsi qu'à des sources bien informées ». Parmi ces sources figure le propriétaire du véhicule utilisé pour l'enlèvement. Selon Froger, ce propriétaire croyait savoir à qui il prêtait sa voiture, mais était totalement ignorant de l'usage qui en serait fait.
Le déroulement de cette affaire prend un tournant encore plus sinistre lorsque l'on découvre que le véhicule en question, récupéré le 18 janvier, contenait un vêtement militaire et des traces de sang. C'est le 22 janvier, dans la précipitation, qu'il lui a été restitué. Étrangement, c'est également ce jour-là que le cadavre de Martinez Zogo a été retrouvé. Arnaud Froger confie : « C'est à ce moment-là qu'il comprend que son véhicule a servi à ce qui s'est passé dans cette affaire ».
D'autres éléments troublants émergent des témoignages d'un agent du renseignement, rencontré par RSF en prison récemment. Ce dernier relate que la filature de Martinez Zogo avant son enlèvement s'est étalée sur dix jours, avec des équipes de sept personnes se relayant pour suivre le journaliste 24 heures sur 24. Une fois enlevé, il a été emmené à Soa, une localité près de Yaoundé. C'est là que, dans l'obscurité de la nuit, les actes de torture ont commencé, selon les informations fournies par les sources de RSF.