Epervier: vers la libération de Mebe Ngo'o après la cross-examination

L’accusation n’a pu établir le détournement de la somme de plus de 222 milliards

Wed, 22 Dec 2021 Source: Le Messager

Attendu pour déterminer les véritables mobiles et le sens à donner à ce procès qui semble s’éterniser, la cross-examination de l’ex ministre de la Défense a eu lieu le 16 décembre 2021, menée de bout en bout par l’un des Avocats généraux, le magistrat Omam Fils. Chose intrigante, l’accusation n’a pu établir ni le détournement de la somme de plus de 222 milliards Fcfa, ni les autres infractions à lui reprochées.

C’est peut-être l’audience la plus longue depuis le début de cette affaire. Pour la dernière de l’année 2021, il fallait s’armer de beaucoup de patience et d’attention. Tant les contours de cette Cross-examination restent déterminants pour l’avenir du principal mis en cause. Déterminé à confondre ses «bourreaux », Edgar Alain Mebe Ngo’o était donc à nouveau devant le juge jeudi dernier au Tribunal criminel spécial (Tcs), dans le cadre de cette partie du procès où la crédibilité de la partie civile est également mise en jeu.

Habitué à démonter preuves et détails à l’appui tous les arguments liés à son implication dans le détournement de deniers publics au travers des marchés des années 2012 et 2013, l’ex patron de la Défense a été méticuleusement cuisiné par le magistrat Omam Fils, commis pour les besoins de la cause.

Le moins que l’on puisse dire c’est que l’interrogatoire a permis au principal accusé, d’apporter des éclairages, des informations supplémentaires et davantage de précisions sur certains pans (encore obscurs) de la gestion du. ministère dont il avait la charge. Voici reproduit in extenso l’échange entre les 2 protagonistes :

A l’audience du 23 juin 2021, et s’agissant des déclarations du Contre-Amiral Nsola, vous affirmez : « je suis stupéfait et scandalisé que le ministère public d’une juridiction aussi prestigieuse que le Tes s’appuie sur les déclarations d’un Officier révoqué pour faute majeure, donc évincé du corps des personnels de défense ». Du fait de sa révocation de la fonction publique un agent public est-il déchu de ses droits civiques, notamment celui de témoigner en justice?

Je tiens à dire que je confirme les propos que l’Avocat Général vient de prononcer en ce qui me concerne, à cette nuance près que j’avais parlé d’une révocation au sein des Forces de Défense. En effet, la révocation des Forces de Défense emporte des obligations plus contraignantes que lorsqu’on est révoqué simplement de la fonction publique.

La révocation d’un personnel des Forces de Défense n’entraîne pas de déchéance de ses droits civiques, mais simplement je m’étais dit stupéfait et scandalisé car la justice a pris en compte le témoignage de cet homme révoqué par le Président de la République dans le cadre d’un projet très important (Convention de prêt d’Etat à Etat, Cameroun/Chine), pour lequel il n’était plus bien placé pour apporter un témoignage crédible. Je rappelle que Mr Nsola était en Chine comme Attaché de Défense, qualité qu’il a perdue en mars 2010, au même moment qu’il a été promu Contre-Amiral.

Il a été remplacé par Betangane Melone Francis. Trois ans après, il est révoqué le 26 décembre 2013 pour faute majeure, que je ne pourrais pas étaler pour des raisons liées au Secret-Défense. J’étais donc sidéré de voir qu’un ancien Officier Général en rupture avec le Chef des Armées voit son témoignage pris en compte. Comme si un magistrat était sanctionné par le Conseil Supérieur de la Magistrature et qu’il soit appelé à témoigner dans une affaire qui concerne la justice.

S’agissant des marchés fictifs ou surfacturés, vous dites que l’accusation a présenté ce grief comme si vous étiez l’unique acteur de l’exécution de ces marchés. Le choix des prestataires sur la base des factures proforma relevait-il de vous?

Effectivement j’avais soutenu que je n’étais pas le seul acteur avec la nuance près que ce n’était pas dans l’exécution des marchés, j’avais dit dans la chaîne de la commande et de la dépense publiques. Oui je n’étais pas le seul acteur. A la question posée, je dis oui c’est le Mindef qui désigne les prestataires, à une nuance près que ce n’était pas sur la base des factures proforma, mais ça se fait soit d’initiative par le Ministre, soit sur proposition de ses grands subordonnés. Une fois le prestataire désigné, qu’il soumet ses factures proforma.

Pour valider les factures proforma soumises par les prestataires choisis par vous, quelle annotation portiez-vous sur ces documents ?

J’annotais “Dbe Accord” ou simplement “Accord’. Je précise que la validation des proforma ne se faisait pas au niveau du Ministre.

A l’audience du 16 novembre 2021, vous avez affirmé : « je désignais tes prestataire;», soit sur proposition de mes collaborateurs, soit d’initiative. Il va sans dire que bien qu’ouvert à toutes suggestions, il n’est jamais arrivé que ma décision soit discutée. Dans cette façon de faire, je n’ai pas innové » Plus loin vous soutenez paradoxalement que votre Accord concernait le choix du prestataire et non les U. S’agissant des surfacturations y a-t-il eu un seul cas où le Contrôleur Financier a rejeté votre Accord, en exigeant de vous le cas échéant une autre facture proforma corrigée contenait les prix conformes à la réglementation ?

Il y a un détail que je voudrais repréciser pour la gouverne du tribunal, que l’Accord que je marquais ne s’adressait pas au Contrôleur Financier qui n’en avait même jamais connaissance. Mon Accord s’adressait au Dbe qui était mon collaborateur direct d’une part, et qui était surtout l’ordonnateur délégué que j’avais accrédité sur la demande du Minfi. Je reprécise que l’accréditation est l’acte par lequel l’ordonnateur principal que j’étais déléguait le DBE pour être le gestionnaire des crédits Hcca. Mon Accord pour le Dbe est un Accord de principe pour le prestataire désigné, étant entendu que le Dbe va préparer les projets de marché et c’est lui qui les soumet au Contrôleur Financier pour validation.

Au cours de son interrogatoire par la justice française le 05 mars 2020 en exécution de la Commission Rogatoire Internationale du juge d’instruction camerounais et s’épanchant sur les prix des articles Robert Franchitti affirme ce qui suit : « je proposais mon prix et ils acceptaient ou pas. Je prenais des marges normales aux alentours de 30%, mais comme (es ministères camerounais me payaient avec retard, mes marges pouvaient être plus importantes : par exemple en cas de paiement avec retard d’un an, je leur avais fait de crédit pendant un an et j’ajoutais alors 7ou 8% de marge ».

Avec la prise en compte de ces marges de 7 à 8% après coup, c’est-à-dire un an après constatation du paiement, la mercuriale des prix était-elle respectée ? Auparavant vous nous aurez dit comment qualifiez-vous ces marges supplémentaires sous le prétexte du paiement retardé ?

Je voudrais dire que sa question aurait gagné en clarté si on prenait en compte la question posée à Mr Franchetti, « quels sont les éléments qui vous ont permis de porter les prix des articles sur les factures proforma dans les marchés d’acquisition d’effets vestimentaires au ministère de la défense de 2009 à 2015 ?

Il faut comprendre que Franchitti dit qu’il y a une mercuriale et que si ses équipements ont été choisis c’est que ses prix étaient nécessairement en dessous de la mercuriale. Je ne sais pas ce que Mr Franchetti met derrière ses marges, ce que je retiens c’est que ses prix au niveau du Cameroun, après l’étape du DBE, étaient soumis au contrôle financier pour vérification.

Je précise que le Contrôleur Financier c’est le juge de la conformité de la dépense à travers une application informatique. Ce que je dis encore c’est que toutes ces opérations concernant l’exécution de la dépense publique ont été tranchées dès lors que des Lois de Règlement ont été votées et promulguées entre 2010 et 2016. La loi dit que c’est un quitus qui est donné à l’ensemble du gouvernement donc à mon département ministériel de l’époque.

En un mot, avec la prise en compte des marges, la mercuriale était-elle respectée ?

Je le dis et redis, il y a une autorité en charge de la licéité des prix à pratiquer dans les marchés publics, le Ministre du Commerce. Ces mercuriales sont appliquées dans le processus par le Contrôleur Financier et lui seul en toute indépendance. Comme les dossiers y afférents ont reçu le visa du contrôle financier, je conclus qu’ils étaient conformes. J’ajoute que le quitus de la Loi de Règlement n’aurait pas été donné car il y a un contrôle sur chiffres et sur pièces de la Chambre des Comptes pour conclure leur caractère probant, en outre il s’agit d’une loi.

Dites-nous, entre les dispositions de la loi prise dans son sens le plus large et le contenu contraire de l’avis d’un agent public (référence aux lettres du Directeur de la Protection du Consommateur qui figurent dans certains marchés), qu’est ce qui devrait prévaloir ?

Je n’en crois pas mes oreilles… (Intervention de la présidente de la collégialité Ndlr) On me pose ta question de savoir entre la loi et l’avis, sauf à me prouver le contraire, les dispositions de la loi priment sur l’avis d’un fonctionnaire.

Vous avez dit que vous ne faisiez pas partie de la commission de réception dont la liste des membres ne fait pas mention du Mindef. Le reconnaissez-vous ?

Ce qu’il vient de dire va de soi. Le Mindef ne faisait pas partie de la commission de réception.

Vous avez expliqué ici que lorsqu’il s’agissait des paiements en procédure simplifiée le PV de réception pouvait ne pas figurer dans la liasse de paiement. C’est bien cela?

Oui I La procédure de demande simplifiée est une procédure dérogatoire à la procédure normale de paiement des dépenses. Le paiement intervient à l’avance avant la livraison, mais lorsque la livraison est faite la régularisation se fait au niveau du comptable public. J’ajoute que la régularisation est l’obtention du PV de livraison, si le comptable ne l’a pas obtenu il ne peut pas envoyer son compte de gestion, à la Chambre des Comptes. Si le PV est absent dans la liasse transmise par le comptable public, il y a contentieux.

Mebe Ngo’o demande la lecture de l’audition de Mme Goni Madeleine épouse Wadefai, Payeur Général du Trésor, devant le juge d’instruction.

A la question du juge d’instruction : « en exécution de nos réquisitions tendant à obtenir ta situation des règlements au bénéfice de certains prestataires du ministère de la défense et de ta délégation générale à la sûreté nationale dans la période de 2006 à 2015, vous avez délivré des États de paiement laissant apparaître des sommes d’argent payées au profit de Magforce International, Magforce Belgique, Marek, Join China Entreprise Limited, Tmm ; Sur la base de quels documents ces paiements ont été opérés ? » Mme Goni dit : « en règle générale, tout paiement d’un marché doit comporter la liasse de pièces ci-après : le bon d’engagement signé de l’ordonnateur et du Contrôleur Financier, l’original du marché enregistré par le prestataire aux impôts, le dossier fiscal du prestataire, le procès-verbal de réception. Dans le cadre des marchés que vous venez de citer, toutes les liasses des dépenses ont été transmises à (a Chambre des Comptes. Les seules choses qu’on peut retrouver à notre niveau sont les traces de paiement de ces marchés ».

Et le principal accusé de poursuivre : « c’était pour dire que le comptable public qui a un délai de 3 mois ne peut pas adresser la liasse si toutes les pièces ne sont pas complètes. Je répète une fois de plus que toutes les questions que nous nous posons ont trouvé réponse avec la promulgation des différentes Lois de règlement.

Mebe Ngo’o demande par la suite qu’on donne également lecture de l’audition de Mr Mbassi François, ancien Payeur Général du Trésor, devant le juge d’instruction.

A la question – comment s’opéraient les réglements de ces marchés? » Mr Mbassidit: « le règlement de ces marchés s’opérait dans le cadre de la programmation des paiements du Comité Interne de Trésorerie présidé par le Directeur Général du Trésor dont les propositions sont validées par le Ministre des Finances. Aussi dans les urgences ressenties par la hiérarchie, les règlements pouvaient être instruits. Globalement les règlements de ces marchés spéciaux étaient suivis par la hiérarchie du ministère des finances.

En ce qui concerne les opérations de règlement, après Ta programmation ou les instructions, les ordres de virement étaient préparés pour les prestataires locaux, les ordres de transfert pour les prestataires étrangers. Ces différents ordres de virement ou de transfert sont cosignés par le Chef Service de la Comptabilité, le Payeur Général du Trésor, envoyé à l’Agent Comptable Central du Trésor qui les signe à l’effet de-donner ordre au système de paiement Beac de positionner l’argent dans les comptes des bénéficiaires »

Vers quelles destinations sont archivées les liasses des marchés réglés ?

Mr Mbassi dit : « après l’apurement des comptabilités par la Pairie Générale, un compte de gestion sur pièces et sur chiffres est déposé à (a Chambre des Comptes de la Cour Suprême pour jugement » .

Mebe Ngo’o : Il vous souvient que nous avions relevé les graves incongruités arithmétiques dans les détournements allégués ce qui jette te discrédit sur les accusations contre moi. J’ai été fasciné par le sérieux avec lequel le rapport sur la gestion des fonds Covid-19 a été mené, il faut ainsi conclure au sérieux du travail de la Chambre des Comptes.

A l’audience du 27 août 2021 vous dites : « j’ai pris la décision de solliciter Limousine Prestige Services car je pouvais me porter garant de la sécurité à 100% de ces matériels ». Est-ce exact que vous l’avez dit ?

Oui je l’ai dit.

Cette confiance absolue à Limousine Prestige Services tenait elle à votre lien matrimonial avec Dame Minla’a Nkoulou votre épouse, ou alors c’est parce que cette entreprise vous appartenait indirectement ?

Durant la période pendant laquelle j’assumais les fonctions de Ministre délégué à la Présidence chargé de la Défense, j’avais effectivement pris le parti de faire louer certains matériels d’appoint (chapiteaux, tentes, chaises) et confection des repas auprès de la Sari Limousine Prestige Services dont mon épouse est effectivement la promotrice depuis 1997.

Ces matériels devaient servir pour les besoins de l’organisation des cérémonies militaires dont certaines étaient présidées personnellement par le Chef de l’Etat. C’est le cas de la fête nationale du 20 mai, des triomphes de l’Emia, du Cinquantenaire des Armées à Bamenda en 2010. Les autres cérémonies étaient présidées par mes soins au nom du Chef de l’Etat.

Contrairement à la motivation du ministère public cette exclusivité que j’avais réservée à Limousine Prestige Services était justifiée par des considérations d’ordre sécuritaire et non dans le but d’assouvir un dessein familial d’ordre financier. Dans le contexte sécuritaire qui a prévalu de 2009 à 2015 et qui était marqué par des menaces asymétriques concomitantes et les menées terroristes du groupe Boko Haram, les matériels devant servir à l’organisation desdites cérémonies militaires exposaient ces cérémonies à un risque majeur, celui que ces matériels puissent servir de support à la pose d’engins explosifs improvisés.

Avec toutes les conséquences au plan de la sécurité et de la stabilité des institutions dont la probabilité d’occurrence de la menace était très élevée. De par la connaissance que j’avais de la situation sécuritaire, de par la récurrence des attentats dans l’Extrême Nord que j’avais personnellement vécu et de par les menées terroristes de Boko Haram dans les pays voisins, je me devais par conséquent de n’utiliser que du matériel dont je pouvais garantir à 100% les conditions de sécurité pour lesquelles j’avais fait recruter un ancien militaire malheureusement décédé. Si c’était à refaire, je le referai.

S’il y avait eu un cas et si j’avais survécu, ma responsabilité aurait été lourdement engagée. C’est vrai, c’est la société dont mon épouse était promotrice, mais c’était pour des considérations purement sécuritaires. C’était la même chose en ce qui concerne les repas. J’étais Préfet et même Secrétaire général de province, lorsqu’on recevait le président de la République, l’intendance incombait à votre épouse.

Vous avez dit que ces prestations de Limousine Prestige Services étaient payées sur fonds spéciaux. Est-ce vrai ?

Oui c’est vrai.

C’est quoi les fonds spéciaux par rapport aux fonds qu’on peut qualifier d’ordinaire ?

Le débat sur les fonds spéciaux relève du Secret de la défense nationale. Néanmoins, pour la bonne gouverne du tribunal et la bonne information du ministère public, les fonds spéciaux ne font pas partie du budget du ministère de la défense, mais je ne répondrai jamais aux modalités d’allocations. Ils sont destinés à financer les opérations spéciales à l’instar des cérémonies militaires à risques très élevés dans leur organisation.

Intéressons-nous au blanchiment des capitaux. Au terme de l’information judiciaire il a été dénombré à votre actif entre autres 53 immeubles, 24 comptes bancaires en France fonctionnant ou ayant été fermés, 21 comptes bancaires au Cameroun, 39 véhicules et engins lourds vous appartenant directement ou indirectement. Parmi ces biens identifiés et saisis, y en a-t-il qui ne vous appartiennent pas entièrement ou partiellement ?

Dans la liste communiquée, il y a des biens qui m’appartiennent et il y en a qui ne m’appartiennent pas. On parle de 39 véhicules, il y a dedans des véhicules de Limousine Prestige Services qui avait une petite unité de location de véhicules d’occasion. S’agissant de Limousine Prestige Services, il y a confusion entre la personne physique de mon épouse et la Sari Limousine Prestige Services dont elle est promotrice depuis 1997. Naturellement en tant que Sari, Limousine’ Prestige Services est une personne morale distincte de la personne physique de mon épouse.

Je dénonce les décisions inégales prises en l’encontre de Limousine Prestige Services par le juge d’instruction et le Parquet sur la base d’un rapport mensonger de l’Anif, sur le principe de la non rétroactivité de la loi et ce qui a entraîné la cessation d’activités de cette entreprise qui employait 75 personnes. Quand on dit que j’ai 53 immeubles, dans l’imagerie populaire ça veut dire 53 maisons à étages. La plupart de ces immeubles sont des terrains non bâtis dans mon village. J’ai sécurisé les terres ancestrales parmi lesquelles les tombes de mes parents qui ont été saisies.

S’agissant des comptes, ce n’est pas le fait d’avoir un compte qui est un problème, mais ce qui s’y passe et là vous avez toutes les transactions opérées dans ces comptes. Par ailleurs, la plupart de ces comptes ont été ouverts bien avant la période de saisine de cette juridiction, il en est de .même des terrains et des véhicules, dont celui de ma feue mère et celui de ma belle-fille qui ont été saisis.

Dans le report de la justice française en exécution de la Commission Rogatoire Internationale du juge d’instruction camerounais, votre compte à la banque Indosuez a enregistré 3 opérations bancaires en 2013 vers votre compte à Attijariwafa Bank Europe d’un montant de 510 millions Fcfa, opérations réalisées du 26 novembre 2013 au 03 janvier 2014, en l’espace de 40 jours. Il est relevé à partir du même compte un transfert à l’étranger de 100.000 euros avec motif « transfert de parts de société ». D’où provenaient ces fonds? Si ces fonds provenaient du Cameroun, pouvez-vous produire des documents permettant de les tracer de manière comptable ? S’agissant de l’opération de 100.000 euros, de quelle société s’agit-il, étant donné que la justice française affirme que vous n’avez aucun tien avec une société française ?

Les deux comptes à Indosuez ont été ouverts en 2006. Déjà en 2006, nous sommes bien en deçà de la période de poursuite. Le solde avec lequel ce compte avait été ouvert en 2006 provenait d’un précédent compte Crédit Lyonnais, boulevard des italiens, ouvert entre 1998 et 2002. Alois qu’on a ce compte au Crédit Lyonnais, e.n 2004, 2005, le Crédit Lyonnais est racheté par le Crédit Agricole et après le rachat, on nous a fait la proposition de nous délocaliser à la banque Indosuez, filiale du Crédit Agricole. Nous sommes donc à Indosuez depuis 2006.

En 2013, Indosuez décide de réaménager sa politique de clientèle, la banque a demandé à un certain nombre de clients majoritairement africains de clôturer leurs comptes. Nous décidons donc de partir d’Indosuez pour Attijariwafa Europe où nous ouvrons un compte joint (Mr et Mme Mebe Ngo’o) ce sont les mouvements de ce transfert qui ont été relevés par les autorités françaises. En aucun moment il n’a été démontré des mouvements de fonds suspects, seulement des mouvements d’Indosuez et de ceux de mon épouse et moi.

Les transactions bancaires dans le monde font l’objet d’une surveillance sans précédent et ce depuis 2001 afin de traquer les opérations de blanchiment et de financement du terrorisme, donc vous ne pouvez rien déposer dans une banque sans justificatifs. Les accusations mensongères contenues dans la correspondance de l’Anif n’ont pu être établies dans les transactions bancaires. S’agissant du mouvement du 07 avril 2016, il est hors période et Je ne saurais en parler ici. Le rapport de la justice française mentionne bien que « te couple Mebe Ngo’o ne faisait pas l’objet de recherches par nos services ».

Si ces fonds venaient du Cameroun, on l’aurait vu dans les documents bancaires. Le rapport de l’Anif est un document tronqué et fabriqué qui n’avait qu’un but : me mettre en prison en choisissant quelques victimes collatérales à savoir mon épouse, Mr Menye et le. Lieutenant-Colonel Mboutou.

La conclusion de la Commission Rogatoire Internationale dit : « Edgard et Bernadette Mebe Ngo’o détenaient en France un bien immeuble, acquis en 2004, estimé à 251.1006 soit 164.710.803 Fcfa. Le couple était également titulaire de comptes bancaires, ouverts en France entre 1998 et 2017, dont le cumul des soldes au 14 février 2020 était de 176.0006 (115.450.192 Fcfa). Le patrimoine cumulé en France du couple Mebe Ngo’o était évalué à 781.2006, soit 512.441.420 Fcfa.”

Vous avez dit que ces fonds ne provenaient pas du Cameroun, ils provenaient d’où ?

J’ai dit que cet argent provenait d’un compte ouvert au départ entre 1998 et 2002, date à laquelle j’avais déjà été Préfet avant et Directeur du Cabinet civil à cette date. Sur la base de quelle loi je suis interrogé sur l’origine de mes biens, biens qui d’ailleurs sont acquis en dehors de la période de poursuite ? Auquel cas les magistrats également sont astreints à la déclaration de leurs biens.

A l’audience du 25 août 2021, vous dites que vous avez ouvert votre compte à la banque Attijariwafa Europe sans demander l’avis de Mr Menye. Est-ce vrai ?

L’ouverture d’un compte ne présente aucune difficulté particulière dès lors que la banque estime que votre dossier ne pose aucun problème. J’ai demandé l’adresse à Mr Menye et je suis allé ouvrir le compte.

Vous êtes allés à Attijariwafa, d’initiative après avoir reçu l’adresse chez Mr Menye. Mais celui-ci dit ceci : « vous étiez parmi les personnes politiquement exposées et lorsque les banques françaises ont commencé à fermer les portes à ce type de personnes, vous étiez parmi celles qu’il a orientées vers Attijariwafa Bank Europe à Paris situé à Rue Chauchat auprès de la directrice d’agence Maria El Mouissi ». Qu’en dites-vous ?

J’ai dit que Mr Menye m’avait communiqué l’adresse de l’agence, je ne vois pas où est le problème.

Les questions du ministère public vidées, le juge a suspendu l’audience et a renvoyé la cause pour le 22 janvier 2022 pour la reexamination de l’accusé principal Mebe Ngo’o, à la demande de ses avocats. Rappelons que l’ex Mindef est accusé de détournement allégué de 222 milliards 980.276.714 Fcfa, dont 196 800.000.000 Fcfa représentant le montant intégral de la Convention de prêt signée avec l’Etat chinois dont le remboursement s’achèvera en 2022. Et d’autre part 26.180.276.714 Fcfa de marchés d’effets d’habillement militaires régulièrement passés par la chaîne de la commande publique et transmis à la Chambre des Comptes pour jugement.

« Si le détournement n’est pas établi, le blanchiment ne saurait prospérer, s’agissant d’une infraction de conséquence et non autonome. Ce qui fait croire que nous sommes en face d’un dossier particulièrement scandaleux », s’insurge une source à la Cour suprême. Pourquoi avoir donc ouvert un procès au ministère de la Défense au lieu d’engager des poursuites contre Mebe Ngo’o sur la base de ses avoirs tout simplement ? just wait !

Source: Le Messager