Se voyant floué dans une histoire de vente de terrain au quartier dit Bonapriso à Douala, l’international camerounais a profité du dernier regroupement des Lions Indomptables au pays, pour faire le tour des milieux influents de Yaoundé et poser son problème. Le ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières (Mindcaf) à qui le pactole de la mafia aurait été remis, ne voulant absolument pas que son nom soit mêlé dans un scandale en cette veille d’un éventuel remaniement ministériel, a tout de suite opté pour un arrangement à l’amiable. Et en catimini, la totalité du sou a récemment été restitué au footballeur dans un hôtel de la capitale économique.
L’affaire remonte à novembre de l’année dernière. Le footballeur international est à la recherche d’un terrain pour ériger un immeuble à Douala. Des amis le conduisent auprès d’un démarcheur, qui prétend disposer d’un espace de 2185 mètres carrés au quartier Bonapriso, vers l’aéroport international et en face du complexe commercial Grand Mall. Le terrain et son emplacement intéressent fort bien le sociétaire de Lyon, en France.
Selon l’agent immobilier, les 2185 mètres carrés proposés reviendront au total à 150 millions de francs.
Avant tout engagement, le footballeur prendra quelques précautions. Il s’entoure, à cet effet, de conseils parmi lesquels, apprend-on, une importante autorité administrative du Wouri et un officier de gendarmerie – dont votre quotidien gardera secrètes les identités – et un magistrat, dont le patronyme n’est pas révélé, mais dont tout porte à croire qu’il officierait comme procureur de la République auprès d’un tribunal de Douala, à savoir Ndokoti, Bonanjo ou Bonabéri.
Ces autorités, et notamment le magistrat, par amour pour lui, décident d’accompagner volontairement et bénévolement la star du foot dans cette noble entreprise, question de l’encourager à investir dans son pays, mieux dans sa ville natale.
Sauf que, au moment de débourser la première tranche pour l’acquisition de la parcelle, soit 70 millions de francs, d’autres acteurs feront leur apparition dans le dossier. Ils conseillent au footballeur de traiter directement avec les autorités de Yaoundé, où selon eux, tout se décide.
L’attaquant les suit aveuglement, et débloque les 70 millions de francs. L’enveloppe est rapidement acheminée vers la capitale où des hommes de confiance du Mindcaf, Henri Eyebe Ayissi, attendent impatiemment.
Ces nouveaux acteurs, amis de Toko Ekambi, remettront immédiatement le précieux colis à leur associé dans la mafia, particulièrement Bertrand Eyebe Ayissi, le secrétaire particulier (Sp) du membre du gouvernement.
Lequel, à son tour se charge, sans tarder, d’acheminer le paquet à son illustre destinataire et aîné. Entre- temps, c'est-à-dire de février 2022, date à laquelle la première tranche est libérée par le footballeur à juin dernier, rien ne semble avancer.
L’acquéreur, qui n’a pratiquement plus de nouvelles de la suite de l’affaire, s’inquiète. Ses entremetteurs, conduits par un de ses amis personnels, Djouonhou Nemdze Germain Fabrice, ayant convoyé le pactole auprès du Sp du Mindcaf, le rassurent quant aux diligences effectuées en direction du ministre.
Pour mieux entourlouper leur interlocuteur, ils indiquent que des autorités administrative, militaire et judiciaire de Douala, avec lesquelles ils travaillent en toute synergie veillent, de près à l’aboutissement heureux de l’affaire. Karl Toko Ekambi, apparemment rassuré, renoue alors le contact avec ces responsables qui apprendront, surprises que 70 millions de francs avaient déjà été débloqués. Et, comme si elles s’étaient passé le mot, elles décident de dégager leur responsabilité dans l’affaire. Le footballeur se convainc de ce que le terrain se trouvant à Douala, il est possible que ces derniers (ces trois hauts responsables de la ville) soient complices de la forfaiture qui se dessine.
Arrivé à Yaoundé quelques jours plus tôt, dans le cadre de la préparation de la deuxième journée des éliminatoires de la Coupe d’Afrique des nations (Can) 2023, pour le match opposant le Burundi au Cameroun, le 9 juin dernier, à Dar es Salam, en Tanzanie, l’international camerounais va en profiter pour rencontrer les hautes personnalités de la capitale. Il se rendra, dit-on, ainsi au ministère de l’Administration territoriale (Minat) pour se plaindre contre l'autorité administrative, à la Défense (Mindef) pour accuser l’officier militaire, non sans avoir préalablement pris le soin de joindre, par téléphone, de hauts responsables de la présidence de la République et des services du Premier ministre. Il est également conseillé au footballeur de saisir la chancellerie. Karl Toko Ekambi prend immédiatement attache avec le cabinet de Laurent Esso. Le rendez-vous est pris. Le garde des Sceaux reçoit le footballeur. Et la photo du joueur, offrant un maillot de Lyon au garde des Sceaux, fait le tour de la toile. Le ministre d’État, ministre en charge de la Justice étant désormais saisi, appuie sur l’accélérateur, à fond. Du coup, ce qui paraissait fastidieux, difficile et compliqué finira par connaître une impressionnante avancée. Le Mindcaf Henri Eyebe Ayissi, se sentant, à l’observation, concerné et impliqué, pieds et mains liés, dans cette mafia, décide de régler très rapidement l’affaire à l’amiable et loin des caméras. C’est ainsi que le footballeur, du retour de Dar es Salam, rencontrera à Douala des émissaires du Mindcaf avec à leur tête, un de ses hommes de main, Pierre Simon Nkoa. C’est ce dernier qui remet les 70 millions à l’attaquant des Lions indomptables. La restitution du sou a lieu, le dimanche 12 juin, à l’Hôtel Star Line. En retour, apprend-on, le footballeur entreprendra depuis Lyon, en France, le 14 juin dernier, de saisir par écrit pour les remercier le Minat et le Mindef.
Il joindra ensuite par téléphone les autorités de la présidence et de la primature, pour leur manifester sa gratitude. S’agissant du garde des Sceaux, notre source indique que le footballeur écrira, enfin, le même 14 juin, à Laurent Esso pour lui dire merci, et surtout pour désister de la dénonciation faite contre le magistrat.
Alors, question à zéro franc: dès lors que Karl Toko Ekambi est en possession de ses 70 millions, aura- t-il le courage et l'humilité nécessaires de présenter des excuses aux différentes autorités administrative, militaire et judiciaire de la ville qu'il avait, gratuitement, vilipendées?