Les deux chambres du parlement de la République démocratique du Congo, le Sénat et Assemblée nationale, ont voté jeudi la prorogation de l'état de siège dans les provinces de l'Ituri et du Nord-Kivu.
Cette mesure constitue la douzième prorogation à avoir été adoptée.
Le président Félix Tshisekedi a décrété l'Etat de siège pour mettre fin aux violences et aux guerres dans les provinces du Nord-Kivu et de l'Ituri, situées à l'est du pays.
Dans la lettre adressée aux parlementaires, le président Tshisekedi les exhorte à adopter cette nouvelle prorogation.
''Les opérations engagées par nos forces de défense et sécurité dans le cadre de la pacification de cette partie du territoire national constituent une dynamique irréversible au regard des défis imposés à la Nation par les forces négatives et face auxquelles le pouvoir public ne peut ni abdiquer ni se résigner'', justifie le président Tshisekedi.
Cette nouvelle prorogation de 15 jours sera transmise au Sénat pour une seconde lecture. Elle prend effet le 19 novembre et prendra fin le 3 décembre prochain.
Cependant, elle est contestée aussi bien par certains acteurs politiques que d'autres membres de la société civile.
Si la mesure a été votée par la majorité des députés, plusieurs parlementaires des provinces de l'Ituri et du Nord-Kivu n'ont pas pris part à cette plénière de l'Assemblée nationale. Ils protestent contre la reconduction de cette mesure qu'ils jugent contreproductive.
Au sein de la société civile, on réclame également la levée de l'Etat de siège. Selon Espoir Ngalukiye, militant du mouvement citoyen la Lutte pour le Changement, la Lucha, ''l'état de siège n'a servi à rien pendant les six derniers mois et il y a aucun impact sur le terrain qui atteste de l'efficacité de l'état de siège. Sur le plan sécuritaire, il n'y a aucune rébellion qui est neutralisée.''
Espoir Ngalukiye dénonce également la lenteur de la justice dans les provinces sous un état de siège. La justice militaire a remplacé les tribunaux civils, ce qui est pour Ngalukiye une véritable ''catastrophe.''
''Les juridictions militaires sont insuffisantes, elles sont moins nombreuses et ça provoque une lenteur dans la justice,'' renchérit le militant de la Lucha.
Selon l'activiste, les opérations de grandes envergures déclarées en grande pompe n'ont mené à aucune action concrète sur le terrain. Il réclame tout simplement la suspension des activités de l'état de siège et de trouver de véritable solutions.
Des accusations que le général Johnny Luboya Nkashama, gouverneur militaire de la province de l'Ituri, réfute catégoriquement.
''Depuis un certain temps, l'Ituri vivait presque dans un non-Etat, mais aujourd'hui nous sommes en train de rétablir l'autorité,'' se défend énergiquement le gouverneur militaire.
''Nous sommes allés chercher les hors la loi dans leurs retranchements, ils ont perdu beaucoup de terrain et maintenant ils se constituent en petits groupes pour aller attaquer la paisible population alors en plus de ça il y a un autre problème,'' renchérit le général Johnny Luboya Nkashama.
En août dernier, l'Assemblée nationale a procédé à une évaluation de l'état de siège. Les députés ont dressé un bilan mitigé de cette mesure qui a alors été prorogé à plusieurs reprises. Ils ont pointé du doigt l'impréparation qui a précédé cette décision qui a pour conséquence une absence d'objectifs militaires et sans un chronogramme d'actions stratégiques.
Les élus ont relevé les faiblesses de ce dispositif. Ils ont par ailleurs demandé une restructuration et le renforcement de la chaîne de commandement.