Moskota a vécu un moment difficile dans la nuit de vendredi à samedi. Les assaillants ont pillé, kidnappés et tué.
Vers 1h40 samedi, une dizaine d'hommes armés de fusils à répétition ont fait irruption à Moskota, un village situé à 6km de Mozogo, chef-lieu de l'arrondissement de Mayo Moskota. Ils se sont annoncés par un tir nourri. Les villageois apeurés se sont terrés chez eux. Visiblement, les assaillants ne leur en voulaient pas directement. Ils se sont dirigés droit vers la maison d’Adamou Ngouda.
Ils y ont tué ce dernier, égorgé une vache, pillé ses biens, enlevé ses six enfants dont trois garçons et trois filles. Pour couvrir leur fuite, ils ont incendié 13 cases. Ils ont aussi emporté une moto, des porte-tout. Fait curieux, les assaillants qui sont repartis en direction des repaires de Boko Haram dans les confins des monts Mandara, ont laissé derrière eux de nombreuses munitions non percutées. Peut-être estce un message. La secte, sous un blocus imposé par des armées depuis trois ans, veut elle démontrer qu'elle n’est guère affectée par ces restrictions ?
En attendant de mieux comprendre, les services chargés de l'enquête ont décelé des indices sur l'attaque terroriste de samedi matin. Une rétrospective dans la personnalité de la principale victime révèle des faits troublants. Adamou Ngouda serait aussi connu sous le nom Mahatma Baldavi. C'est ainsi qu'il se faisait appeler au village Mouldougoua situé sur la frontière avec le Nigeria.
Son père serait un ancien membre de Boko Haram. Adamou Ngouda ou Mahatma Baldavi était un déplacé venu s'installer à Moskota pour se protéger des exactions de Bobo Haram. L'on pense que l'expédition terroriste serait un règlement de compte. «Il se peut que la victime s'est désolidarisée de la secte et s'est mise à collaborer avec les forces de défense.
Peut-être en savait il beaucoup trop sur la structure et l'organisation de la nébuleuse qui a décidé de le faire taire définitivement », pense un observateur. Il poursuit que ce type d'actions est imparable. «Même si on positionne une brigade de 2000 hommes, tant que la plus petite unité de Boko Haram est active, elle peut faire très mal. Il suffit d'un homme caché quelque part avec un fusil pour facilement tuer huit hommes au nez et à la barbe de la dite brigade».
Pour notre interlocuteur, Boko Haram ne commet pas de telles attaques pour gagner une quelconque guerre. La secte veut plutôt assurer son existence en instaurant la terreur dans les populations. Une peur et une insécurité contre lesquelles les moyens militaires ne peuvent rien. Les idéologues de la secte profitent de cette occurrence pour diffuser que les armées sont impuissantes à réprimer la force immanente que Boko Haram incarnerait. Ils font surtout croire à ces populations terrifiées que les pouvoirs des Républiques et leurs armées sont illégitimes à les combattre.
Or, jusqu'ici, les États ont engagé des moyens colossaux pour détruire les moyens de Boko Haram. Les djihadistes n'ont plus l'infrastructure militaire qu'ils avaient en 2014. Mais, l'on observe que la solution militaire est arrivée à saturation. Le centre de gravité de Boko Haram n'étant pas son matériel mais les populations qui vivent dans des conditions que les experts des Nations unies décrivent comme une catastrophe humanitaire.
C'est à cette détresse pense-t-on que se trouve le terreau qui permet à Boko Haram de survivre et d'installer une lutte sur la durée. Les djihadistes rêvent d'instaurer une situation similaire à celle de l'Afghanistan où les Usa et l’Otan, arrivés pour combattre les talibans après les attentats du 11 septembre 2001 aux Usa, sont après 16 ans dans une impasse. L'option militaire avait été privilégiée.
Des milliers de militaires tués et des centaines de milliards de dollars dépensés plus tard, les puissances n'ont toujours pas pacifié l'Afghanistan.