Ferdinand Ngoh Ngoh, l'homme qui inquiète Paul Biya : Entre sacrifice politique et maintien risqué

Paul Biya Et Son Entourage Image illustrative

Tue, 25 Nov 2025 Source: www.camerounweb.com

YAOUNDÉ, 25 novembre 2025 - Alors que Paul Biya s'apprête à composer son nouveau gouvernement après une réélection contestée, un nom cristallise toutes les tensions : Ferdinand Ngoh Ngoh. Le secrétaire général de la présidence de la République (SGPR), en poste depuis 2009, est devenu le symbole même de la confiscation du pouvoir aux yeux de nombreux Camerounais. Jeune Afrique révèle dans son enquête exclusive que le sort de cet homme tout-puissant pourrait bien déterminer la capacité de Paul Biya à pacifier son neuvième mandat.

"L'homme qui confisque le pouvoir"

Jeune Afrique ne mâche pas ses mots : "Depuis plusieurs années, Ferdinand Ngoh Ngoh, le secrétaire général de la présidence, est accusé par nombre de Camerounais de confisquer le pouvoir." Cette formulation brutale reflète le sentiment d'une large partie de l'opinion publique, qui voit dans le SGPR le véritable décideur, reléguant Paul Biya au rôle de figure symbolique.

Le magazine pose la question explosive qui agite les couloirs du pouvoir : "Biya irait-il jusqu'à le sacrifier pour pacifier son mandat ?" Cette interrogation intervient dans un contexte où le président nonagénaire cherche désespérément à apaiser les tensions nées de la présidentielle du 12 octobre, marquée par l'émergence d'Issa Tchiroma Bakary et un rejet sans précédent du régime dans plusieurs régions.

Jeune Afrique souligne l'ampleur que représenterait une telle décision : "Compte tenu de l'influence de l'intéressé, cela serait un coup de tonnerre." Cette formulation suggère que Ferdinand Ngoh Ngoh n'est pas un ministre comme les autres, mais bien une pièce maîtresse de l'édifice du pouvoir camerounais.

Le magazine révèle un détail crucial : "Ngoh Ngoh ne manque pas d'ennemis, lui-même en est conscient." Cette information exclusive indique que le SGPR sait qu'il est dans le viseur de nombreux acteurs politiques, peut-être même au sein du régime. Sa position, aussi puissante soit-elle, n'est donc pas inattaquable, surtout dans un contexte post-électoral tendu où Paul Biya cherche des boucs émissaires pour apaiser l'opinion.

Jeune Afrique va plus loin en évoquant le "poste officieux de vice-président" qu'occuperait Ferdinand Ngoh Ngoh. Cette qualification n'est pas anodine : elle reconnaît officiellement ce que tout le monde sait au Cameroun, à savoir que le SGPR est le numéro deux effectif du régime, bien au-delà de son titre officiel.

Le magazine note que "le maintenir à son poste officieux de vice-président reviendrait à le conforter dans les ambitions qu'on lui prête". Cette formulation prudente mais claire suggère que Ferdinand Ngoh Ngoh nourrirait des ambitions présidentielles. Dans le contexte camerounais où la question de la succession de Paul Biya n'est plus taboue, cette révélation prend une dimension explosive.

Si Jeune Afrique ne l'évoque pas directement dans son article sur les défis de Paul Biya, l'affaire Martinez Zogo plane comme une menace sur l'avenir de Ferdinand Ngoh Ngoh. Comme le magazine l'avait révélé en avril 2024 dans son enquête sur l'analyse des téléphones, Martin Savom, le maire de Bibey accusé d'être l'auteur principal de l'assassinat du journaliste selon le témoignage du 24 novembre 2025, "est réputé être un proche du secrétaire général de la présidence, Ferdinand Ngoh Ngoh".

Cette proximité, jusqu'ici considérée comme un détail dans une affaire focalisée sur Jean-Pierre Amougou Belinga, pourrait devenir centrale si la justice établissait que Savom a agi sur instruction d'un commanditaire. La question brûle toutes les lèvres à Yaoundé : l'étau se resserre-t-il autour du SGPR ?

Le fait que "Ngoh Ngoh ne manque pas d'ennemis, lui-même en est conscient", comme le révèle Jeune Afrique, prend une résonance particulière à la lumière des récents développements de l'affaire Martinez Zogo. Le SGPR sait-il que son nom pourrait être cité dans le cadre de cette enquête ? Est-ce cette conscience de sa vulnérabilité qui pousse le magazine à noter qu'il est "conscient" d'avoir des ennemis ?

Dans le système Biya, où les équilibres entre clans sont fragiles et où chaque acteur puissant accumule des adversaires, Ferdinand Ngoh Ngoh représente une cible de choix. Son éviction pourrait satisfaire plusieurs cercles du pouvoir tout en donnant à Paul Biya l'image d'un président capable de sacrifier même ses plus proches collaborateurs pour répondre aux attentes populaires.

Paul Biya se trouve face à un dilemme cornélien concernant Ferdinand Ngoh Ngoh. D'un côté, le maintenir à son poste reviendrait à ignorer le sentiment d'une large partie de l'opinion publique qui voit en lui le symbole de la confiscation du pouvoir. Dans un contexte où le président cherche à apaiser les tensions et à donner l'illusion du renouveau, garder Ngoh Ngoh enverrait un signal catastrophique.

D'un autre côté, sacrifier son SGPR comporterait des risques considérables. Jeune Afrique souligne que cela serait "un coup de tonnerre", suggérant que les conséquences d'une telle décision seraient imprévisibles. Ferdinand Ngoh Ngoh contrôle l'accès au président, coordonne l'action gouvernementale, et dispose de réseaux étendus au sein de l'appareil d'État. Le limoger pourrait déstabiliser l'ensemble du système.

Le sort de Ferdinand Ngoh Ngoh est intimement lié à la question de la succession de Paul Biya. Si le SGPR nourrit effectivement des ambitions présidentielles, comme le suggère Jeune Afrique, le maintenir à son poste reviendrait à le positionner comme le successeur naturel du président nonagénaire.

Cependant, cette perspective pose problème. Jeune Afrique rappelle dans son enquête qu'"il y a un équilibre entre les clans, à Yaoundé, et Biya a peur de le rompre", selon un opposant. Désigner implicitement Ngoh Ngoh comme dauphin en le maintenant à son poste pourrait déclencher une guerre ouverte entre les différentes factions qui se disputent la succession.

À l'inverse, l'écarter maintenant reviendrait à éliminer l'un des principaux prétendants à la succession, ce qui modifierait profondément l'équation politique. Mais qui Paul Biya placerait-il à ce poste stratégique ? Et comment s'assurer que le remplaçant ne développe pas à son tour des ambitions présidentielles ?

Le cas de Ferdinand Ngoh Ngoh rappelle celui de Philémon Yang, ancien Premier ministre qui avait occupé la fonction de 2009 à 2019, soit pendant dix ans. Yang, originaire des régions anglophones, avait été perçu à un moment comme un possible successeur de Paul Biya. Son maintien prolongé à la primature avait alimenté les spéculations sur son avenir.

Finalement, Paul Biya l'avait remplacé en janvier 2019 par Joseph Dion Ngute, sans que Yang ne soit pour autant totalement écarté du pouvoir - il avait été nommé vice-Premier ministre chargé des relations avec les assemblées. Ce précédent montre que Biya sait gérer les barons de son régime en les maintenant dans le système tout en les éloignant des postes les plus stratégiques.

Ferdinand Ngoh Ngoh pourrait-il connaître un sort similaire ? Être écarté de la présidence tout en recevant un poste honorifique qui préserverait son influence sans lui donner le contrôle effectif de l'appareil d'État ?

Le sort de Ferdinand Ngoh Ngoh dépasse largement la simple question d'un remaniement ministériel. Il engage l'avenir du régime Biya et la capacité du président à répondre aux attentes de changement exprimées lors de la présidentielle.

Si Paul Biya choisit de maintenir son SGPR, il enverra un message clair : malgré la contestation, malgré le rejet dont il a fait l'objet, il n'est pas prêt à sacrifier ses fidèles. Ce serait un signe de force, mais aussi d'obstination qui pourrait alimenter davantage la colère populaire.

S'il choisit de l'écarter, ce serait un signal fort de renouveau, montrant que personne n'est intouchable, même pas l'homme le plus puissant après le président. Mais ce serait aussi un aveu de faiblesse, reconnaissant implicitement que Ferdinand Ngoh Ngoh était effectivement responsable d'une partie des maux reprochés au régime.

Jeune Afrique révèle que "comme après chaque élection présidentielle, un remaniement était en préparation" au moment de la publication de son enquête. Le suspense sur le sort de Ferdinand Ngoh Ngoh ne devrait donc plus durer très longtemps. La décision de Paul Biya sur ce dossier sera scrutée comme un indicateur majeur de sa stratégie pour les années à venir.

Dans les chancelleries occidentales, dans les capitales africaines, mais surtout dans les salons de Yaoundé où se joue la guerre des clans, tous les regards sont tournés vers le président nonagénaire. Va-t-il sacrifier son bras droit pour tenter d'apaiser l'opinion ? Ou va-t-il le maintenir, envoyant ainsi un message de continuité qui risque d'alimenter davantage la contestation ?

Pour Ferdinand Ngoh Ngoh lui-même, ces dernières semaines doivent être éprouvantes. Conscient qu'il "ne manque pas d'ennemis", comme le révèle Jeune Afrique, il doit également mesurer que son sort est entre les mains d'un président de 92 ans qui pourrait décider de le sacrifier sur l'autel de la pacification politique.

L'affaire Martinez Zogo, avec les accusations portées contre son "proche" Martin Savom, ajoute une pression supplémentaire. Même si aucun élément ne lie directement le SGPR à cet assassinat, la simple évocation de son nom dans ce contexte pourrait donner à Paul Biya une justification pour l'écarter sans paraître céder uniquement à la pression populaire.

Au-delà du sort individuel de Ferdinand Ngoh Ngoh, cette décision sera un test majeur pour Paul Biya. Le président va-t-il privilégier la loyauté envers un collaborateur fidèle qui l'a servi pendant seize ans, ou va-t-il faire primer la raison d'État et tenter de donner un nouveau souffle à son régime ?

Mais comme le note le magazine, Paul Biya a 92 ans et "n'a jusqu'ici jamais cédé à ces sirènes" quand il s'agit de changements structurels. Le SGPR sera-t-il l'exception qui confirme la règle, ou une fois de plus, le président choisira-t-il la continuité plutôt que le changement ?

La réponse à cette question, attendue dans les prochains jours avec l'annonce du nouveau gouvernement, dira beaucoup sur la capacité de Paul Biya à évoluer face à une contestation sans précédent de son pouvoir. Ferdinand Ngoh Ngoh, l'homme qui incarne le mieux la continuité du système, pourrait paradoxalement devenir le symbole du changement si Paul Biya décide de s'en séparer.

Source: www.camerounweb.com