Une note de service confidentielle de la police nationale, datée du 28 avril 2025 et que notre rédaction s'est procurée, révèle des cas inquiétants de fraude à l'obtention de la nationalité camerounaise. Ce document officiel, signé par le commissaire Fotso Makok Narcisse Magloire, chef du Centre régional de traitement des titres identitaires pour la région du Centre, décrit un phénomène préoccupant qui pourrait compromettre l'intégrité du système d'identification national.
Selon les informations contenues dans cette note circulaire numérotée 00473/NS/DGSN/SG/DRSNC/CRTTI/S, les services de sécurité auraient intercepté plusieurs ressortissants étrangers, principalement nigérians, en possession de fausses cartes nationales d'identité camerounaises. Ces individus tentaient apparemment d'obtenir des passeports ordinaires camerounais en se prévalant de ces documents d'identité frauduleux.
"Des sources bien introduites nous informent que certains fraudeurs ont déjà été appréhendés et conduits devant les services de police judiciaire pour audition", peut-on lire dans ce document officiel qui émane de la Délégation générale à la sûreté nationale.
Le commissaire Fotso Makok exprime sa vive préoccupation face à cette situation qui, selon lui, risque de "ternir la réputation du nouveau système de délivrance des cartes nationales d'identité". Ce dispositif, mis en place récemment, était pourtant censé résoudre définitivement les problèmes chroniques d'obtention des titres identitaires au Cameroun.
Dans sa note, le haut gradé de la police insiste particulièrement sur la nécessité de renforcer les contrôles : "La carte nationale d'identité constitue le sésame pour l'obtention du passeport et de nombreux autres documents officiels. Elle peut malheureusement devenir un instrument au service de fraudeurs et d'escrocs en tout genre".
Face à cette menace, les autorités ont édicté des mesures drastiques à l'intention des chefs de poste d'identification de la région du Centre. Ces derniers sont désormais tenus de :
Vérifier scrupuleusement l'authenticité de tous les documents prouvant la nationalité camerounaise, notamment les actes de naissance et certificats de nationalité
Soumettre les demandeurs à un interrogatoire rigoureux en cas de doute sur leur identité
Rejeter systématiquement les demandes émanant de personnes âgées de plus de 30 ans sollicitant leur première carte nationale d'identité, sauf production de justificatifs incontestables prévus par le décret N°2025/059 du 28 février 2025
Des implications politiques sensibles
Ces révélations interviennent dans un contexte politique particulièrement tendu, à quelques mois de l'élection présidentielle d'octobre 2025. Elles font écho aux récentes accusations du Mouvement pour la Reconnaissance du Cameroun (MRC) qui dénonçait des cas de fabrication frauduleuse de cartes d'identité à des fins électorales.
Le commissaire Fotso Makok a nommé l'OP2 Tatsinkou Fernand pour assurer le suivi rigoureux de ces nouvelles directives. Les fonctionnaires qui feraient preuve de complaisance dans l'exercice de leurs fonctions s'exposent à des sanctions sévères, avertit la note de service.
Les autorités ont également durci les conditions d'obtention des titres identitaires pour les Camerounais résidant à l'étranger. Ces derniers doivent désormais présenter obligatoirement leur passeport ordinaire ou laissez-passer comportant les cachets d'entrée au Cameroun, ainsi que leur carte de séjour ou de résidence du pays d'accueil.
Cette affaire de fraude à l'identité nationale soulève des questions cruciales sur la sécurité des documents officiels et la protection des données personnelles au Cameroun. Elle intervient alors que le pays s'apprête à entrer dans une période électorale délicate, où la transparence du processus d'identification des électeurs sera plus que jamais sous surveillance.