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Géopolitique : la France va-t-elle perdre son influence au Maghreb après son déclin en Afrique ?

La France va-t-elle perdre son influence au Maghreb après son déclin en Afrique ?

Thu, 12 Oct 2023 Source: www.bbc.com

Après le déclin de l'influence française dans toute l'Afrique, notamment dans la région du Sahel, c'est au tour de son influence au Maghreb, selon les observateurs.

Le magazine français Le Point a constaté que les pays du Maghreb s'éloignent de plus en plus de Paris.

Le journal affirme, dans un reportage de l'écrivain Benoît Dolma publié cette semaine, que les relations avec le royaume du Maroc sont au plus bas, surtout après que Rabat a poliment rejeté l'offre de ses services de Paris, comme de nombreux pays, lorsque le séisme a frappé six régions marocaines. Le Maroc a choisi le Qatar, les Émirats Arabes Unis, l'Espagne et le Royaume-Uni, en ce qui concerne la diplomatie de l'aide.

Ni Paris ni Rabat n'ont officiellement fourni les raisons de la récente détérioration des relations entre les deux pays.

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Mais les analystes estiment que la question du programme Pegasus, un logiciel que le Maroc est accusé d'utiliser pour espionner de hautes personnalités françaises comme le président Emmanuel Macron, est l'une des principales raisons de la récente détérioration des relations entre les deux pays, même si l'Élysée n'a pas confirmé le piratage. Le Maroc a démenti.

Les analystes estiment également que le Maroc exprime toujours son agacement face à l'incapacité de la France à prendre des mesures pour soutenir la position du Royaume sur la question du Sahara occidental.

Une autre raison est celle des visas pour la France, que Paris a réduit au minimum "en réponse au manque de coopération du Maroc en matière d'immigration". La France a pris la même mesure avec l'Algérie et la Tunisie, selon les observateurs.

Les médias marocains accusent également Paris d'être à l'origine des tensions dans les relations du Maroc avec les instances européennes, dont le Parlement européen, et d'influencer ses décisions liées aux "allégations de corruption marocaines".

L'état des relations de la France avec l'Algérie n'est pas très différent de celui de ses relations avec le Maroc en termes de mauvaise qualité.

Les analystes estiment que les relations entre Paris et Alger traversent la pire étape sur fond de déclarations colériques et provocatrices faites par des responsables français, à la suite de la publication par le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, d'un décret exigeant l'exécution complète de l'hymne national algérien lors des rencontres officielles.

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Ce décret revient à confirmer l'inclusion du troisième paragraphe de l'hymne national, dans lequel l'Algérie menace la France, et que Paris rejette pour cette raison.

Même si des voix algériennes ont demandé à plusieurs reprises que ce paragraphe soit ignoré ou supprimé, car il comporte le nom de la France, Catherine Colonna, la ministre française des Affaires étrangères, a exprimé son mécontentement face au retour de ce que "le temps a passé", comme elle l'a dit.

Le troisième paragraphe avait auparavant été oublié, ou plutôt supprimé sans préavis, notamment à l'époque de Chadli Bendjedid et d'Abdelaziz Bouteflika.

La question de l'apologie de la France pour son passé colonial en Algérie (1830-1962) reste l'une des causes des tensions récurrentes entre les deux pays.

Le président Macron a déclaré dans une interview publiée au début de cette année qu'il ne demanderait pas pardon aux Algériens pour la colonisation de leur pays par la France, ce sur quoi l'Algérie insiste.

Emmanuel Macron a dit dans une longue interview avec l'écrivain algérien Kamel Daoud, publiée par le magazine Le Point : "Vous n'êtes pas obligé de demander pardon. Ce n'est pas le but. La parole coupera tous les liens".

Le président français a expliqué que "le pire qui puisse arriver, c'est qu'on présente nos excuses et que chacun suive son propre chemin". Il souligne que "le travail de mémoire et d'histoire n'est pas un inventaire de comptes, bien au contraire".

En 2020, l'Algérie a reçu avec tiédeur un rapport préparé par l'historien français Benjamin Stora à la demande de Macron, dans lequel il appelait à une série d'initiatives pour parvenir à une réconciliation entre les deux pays. Le rapport ne contient aucune recommandation d'excuses ou d'expression de remords, ce que l'Algérie réclame constamment.

Le voyage de Macron en Algérie, en août dernier, a contribué à remettre les relations bilatérales sur les rails, après la crise déclenchée par les déclarations du président français en octobre 2021, dans lesquelles il accusait le "système politique militaire" algérien de créer une "rente de mémoire" et remettait en question l'existence d'une nation algérienne avant le colonialisme.

Dans l'interview donnée au Point, Emmanuel Macron a reconnu l'erreur de ses déclarations. Il estime que "c'est peut-être une déclaration maladroite", qui "peut blesser" les Algériens.

"Ces moments de tension nous apprennent (...) Il faut savoir tendre à nouveau la main", poursuit M. Macron.

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Le magazine Le Point a déclaré dans son dernier reportage : "Nous venons de subir un nouveau coup porté au tissu des relations franco-algériennes en raison d'une décision prise cette semaine, non pas pour empêcher l'usage de la langue française à l'école, mais plutôt pour empêcher l'usage du français dans les écoles et des programmes d'enseignement des langues dans le secteur privé, notamment en vue de l'obtention du baccalauréat français…"

La visite officielle à Paris du président algérien, Abdelmadjid Tebboune, a été plusieurs fois reportée.

Lors du sommet des pays francophones organisé par l'île tunisienne de Djerba en novembre 2022, le président Macron a admis que le statut de la "langue de Molière" subissait des revers sur de nombreux fronts, notamment au Maghreb…

Même en Tunisie, le président français a ignoré le coup d'État mené par le président Kaïs Saïed en 2021… En effet, la France a fermé les yeux et a continué de citer la Tunisie comme une solution à la crise de la migration irrégulière, comme l'indique le rapport.

Mais le palais présidentiel de Carthage continue de répéter le mot "souveraineté", avec les yeux tournés vers Moscou et les autres membres des BRICS (Brésil, Inde, Chine et Afrique du Sud). La Libye n'est plus visitée après sa désintégration, et il ne semble pas que le procès des fonds libyens liés à l'ancien président français Nicolas Sarkozy va améliorer le tableau, et donc la route est barrée dans tous les sens, comme le dit le magazine.

Source: www.bbc.com