Gaz du Cameroun (Gdc), filiale du Britannique Victoria Oil & Gas (Vog) qui exploite le champ gazier de Logbaba, dans la région du Littoral du pays, poursuit son attitude de défiance vis-à-vis du gouvernement camerounais.
En effet, malgré la décision de bloquer la hausse de ses tarifs du gaz industriel pour non-respect de la réglementation en vigueur, décision prise par le ministre du Commerce au sortir d’une réunion de concertation organisée le 13 juillet 2023 à Yaoundé, Gdc menace désormais de suspendre l’approvisionnement des entreprises industrielles opposées à cette hausse de ses tarifs de 20%.Dans un courriel adressé le 22 août 2022 aux responsables de la trentaine d’entreprises industrielles approvisionnées au gaz naturel dans la zone industrielle de Douala-Bassa, Gdc projette cette suspension des approvisionnements pour le 1er septembre 2023.
Faute pour chacune des entreprises concernées par cette mise en garde de s’acquitter du supplément de 20% de leurs factures des mois de juin et de juillet 2023, ou alors de rédiger une requête aux fins d’ouvrir une négociation directe avec l’entreprise gazière. Le supplément de 20% réclamé par Gdc représente la proportion de l’augmentation des tarifs, puisque, apprend-on de sources proches du dossier, les entreprises industrielles continuent de payer leurs consommations au tarif initial, en vertu de la décision du gouvernement de suspendre l’augmentation des prix décidée unilatéralement par Gdc.
C’est que, selon nos sources, la discussion organisée ces dernières semaines entre Gdc et le Groupement des consommateurs du gaz à usage industriel s’est avérée vaine, l’entreprise gazière ayant montré sa fermeté à appliquer la hausse des tarifs, malgré l’injonction du gouvernement d’y surseoir.
Désunion susceptible de fragiliser le bloc des contestataires
En voulant désormais susciter des discussions directes avec chacun de ses clients, analyse un responsable d’entreprise approvisionnée au gaz naturel de Gdc, la filiale de Victoria Oil & Gas espère pouvoir créer des lignes de fracture au sein du Groupement des consommateurs du gaz à usage industriel, fermement apposé à la hausse des tarifs. Une désunion susceptible de fragiliser le bloc des contestataires. Pourtant, tout semble avoir été dit lors de la réunion de concertation du 13 juillet 2023 à Yaoundé, entre le gouvernement représenté par le ministère du Commerce et les entreprises pétro-gazières publiques, les consommateurs représentés par les entreprises industrielles approvisionnées au gaz naturel et les associations de défense des droits des consommateurs, et Gaz du Cameroun, unique producteur du gaz naturel traité dans le pays.
En effet, au cours de cette rencontre, face à l’obligation de l’homologation préalable des prix qui lui a été opposée par le gouvernement avant toute révision des tarifs, conformément aux dispositions du décret no 2023/232 du 4 mai 2023 fixant les modalités d’application de la loi no 2019/008 du 25 avril 2019 portant Code pétrolier, Gdc a soutenu que le gouvernement confond le texte applicable à son activité. Contestation de l’homologation des prix En clair, les responsables de cette entreprise gazière ont fait savoir au gouvernement que les dispositions du Code pétrolier de 2019 et son décret d’application de 2023 ne leur sont pas opposables. Et qu’ils ne sont liés qu’aux dispositions de la convention d’investissement signée en 2009 avec l’État du Cameroun.
Face à contestation de l’obligation d’homologation préalable des prix que leur imposait alors le gouvernement en invoquant le Code pétrolier de 2019, le ministre du Commerce a brandi à l’entreprise une disposition de la convention d’investissement excipée par Gdc. Celle-ci lui impose également de négocier préalablement avec l’État, notamment la Société nationale des hydrocarbures (Snh) et le ministère des Mines, avant toute augmentation des prix sur le marché domestique. C’est fort de cette disposition que le ministre Mbarga Atangana avait alors suspendu la décision de Gdc de revaloriser ses tarifs aux industriels à compter du 1er juin 2023. Ce membre du gouvernement avait ensuite invité Gdc à se conformer à la réglementation en vigueur dans le pays.
Soit en se conformant aux dispositions du Code pétrolier de 2019, qui impose la procédure d’homologation préalable des prix par le ministère du Commerce avant toute augmentation ; soit en respectant la convention d’investissement signée avec l’État en 2009, qui préconise une négociation préalable entre l’État et le producteur du gaz, avant toute revalorisation des prix. Mais, à l’observation, la filiale locale de Vog, qui détient le monopole du traitement et la fourniture aux entreprises industrielles du gaz naturel utilisé comme source d’énergie d’appoint face aux récurrentes coupures d’électricité dans le pays, semble être bien décidée à ne se conformer à aucune de ces prescriptions du gouvernement camerounais. L’on se souvient qu’en juin 2021, face à l’insistance des Cimenteries du Cameroun (Cimencam) de vouloir augmenter les prix de ses produits malgré les injonctions contraires du gouvernement, le ministre du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, avait menacé d’apposer des scellés sur les installations de cette filiale du consortium franco-suisso-marocain LafargeHolcim Maroc Afrique (Lhma).