L’influence négative de l’exécutif sur le judiciaire, la déclaration des biens inappliquée, le difficile accès aux sources d’informations, la non-déclaration des biens, sont parmi tant d'autres des griefs soulevés dans le rapport Global Integrity 2016.
Le Cameroun marque pourtant neuf points en plus dans le Rapport 2016 Africa Integrity Indicators (AII), une publication annuelle qui évalue les mécanismes et les politiques des Etats africains en matière de développement socioéconomique et de lutte contre la corruption.
Dans ce rapport disponible en anglais depuis le 1er avril et produit par le très réputé think-tank américain Global Integrity en association avec la fondation Mo Ibrahim, le pays de Paul Biya qui passe d’une note de 27 en 2015 à 36 pour l’année 2016, reste dans la zone des pays à faible niveau d’intégrité.
Un peu comme tous les autres pays de la zone Cemac à l’exception de la Guinée Equatoriale qui rangée dans la zone rouge : pays de très faible niveau d’intégrité. Et dans la liste des griefs reprochés au Cameroun figure en bonne place l’influence du pouvoir exécutif sur le fonctionnement de la justice. Pour illustrer cet état de chose, le rapport révèle que dans la pratique, « l'autonomie des juges est limitée et que pour les cas très médiatisés, le ministre de la Justice décide si une affaire doit être enrôlée ou une procédure judiciaire lancée ».
Le think-tank américain explique cette dérive par l’article 37 de la Constitution qui prévoit que le président de République (chef de l'exécutif) « préside également le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), l'organe chargé des nominations, les affectations et des sanctions des juges, et que le ministre de la Justice occupe le poste de secrétaire du CSM ».
Avec la même verve, le rapport épingle l’objectivité des présidents des tribunaux. Au Cameroun, un président du tribunal « peut décider de rejeter une affaire sans demander l'avis des juges », affirme le rapport. Surtout que selon l’indicateur 3 de l’échelle de notation, les présidents des tribunaux sont « sans mandat des juges même dans les plus hautes juridictions ».
Lutte contre corruption
En matière de lutte contre la corruption au sein de la fonction publique camerounaise, le cadre juridique pour assurer l'intégrité reste faible. C’est du moins ce que soutient Africa Integrity Indicators édition 2016. «Des mesures disciplinaires contre les fonctionnaires sont peu fréquentes, les recrutements et les nominations ne sont pas fondées sur le mérite, les évaluations de rendement inexistantes et des promotions en fonction de l'affiliation avec le RDPC parti au pouvoir ou sur fond ethnique », indique le document, publié en mai 2016.
Une réalité qui est aux antipodes du Code pénal camerounais qui prévoit pourtant une batterie de règles pour prévenir les conflits d'intérêts, le népotisme, le copinage et le favoritisme dans toutes les branches du gouvernement. Mieux, ce Code pénal criminalise les cas de discrimination dans le recrutement et la promotion des fonctionnaires.
En outre, l'indicateur 35 de l’AII signale qu'aucune loi n’exige des fonctionnaires de signaler les cas de corruption présumée. 237online.com Pis, d’après le rapport, « les fonctionnaires qui signalent les cas de corruption ne sont pas protégés contre la récrimination ou d'autres conséquences négatives ».
Et enfin, au Cameroun, il n’existe pas de loi imposant des restrictions pour les fonction naires qui entrent dans le secteur privé après avoir quitté le gouvernement.
Déclaration des biens inopérante
Au Cameroun, la déclaration des biens, consacrée dans la Constitution de 1996 et une loi de 2006, reste inappliquée. Cette situation n’a pas manqué d’interpeller les auteurs de l’AII 2016. Le décret d’application qui aurait permis à la mise en œuvre de la loi 03/2006 n'a jamais été signé. Du coup « aucun fonctionnaire, que ce soit dans la haute ou la position de bas niveau n'a jamais révélé son/ses avoirs depuis 2006 », lit-on dans le rapport.