Malgré les assurances données par le ministre de l’Enseignement supérieur (Minesup) et son homologue des Enseignements secondaires (Minesec) au cours du week-end, les cours n’ont pas repris à l’Université de Bamenda et dans les établissements secondaires de cette ville. « C?est l?opération pieds morts. Tout est sec », a indiqué au téléphone hier, lundi 23 janvier 2017 à 13h, un chef de service de cette institution.
Il affirmait parler de son bureau où il a pu se rendre le matin, à partir de Bamenda soit près de 10km, sans être inquiété. « Les étudiants ne sont pas venus à l’école. Quelques enseignants sont passés », a-t-il confié avant que la communication ne se brouille. Bamenda, hier, a connu le débrayage comme le lundi de la semaine d’avant. Quelques élèves ont été aperçus dans les rues tôt le matin. A bonne source, certains ont pu atteindre leur lieu de fréquentation dissimulés dans des tenues de ville. Mais il n’y a pas eu cours. Conformément aux injonctions de leur ministre, les lycées et collèges étaient ouverts, et le personnel administratif présent.
En mijournée, on ne signalait aucun établissement secondaire ni public ni privé où les cours ont effectivement repris. Plusieurs sous-préfets de la région ont pu se rendre à l’évidence que l’appel au retour en classe des membres du gouvernement n’a pas été entendu, au terme des visites qu’ils ont effectuées dans ces structures. Les enseignants présents ne s’occupaient pas des élèves. Excédés par deux mois de séjour à la maison, de nombreux parents souhaitent que l’école recommence.
La politique du gros bâton
Le 19 janvier 2017, Jean Ernest Ngalle Bibehe, le Minesec s’est fendu d’un communiqué largement relayé par la Crtv, la radio d’Etat, dans lequel il donnait des assurances sur les mesures de sécurité prises par les autorités administratives pour protéger ceux qui voulaient se rendre à l’école. Et en filigrane, l’on sentait poindre à l’horizon des sanctions contre les enseignants-fonctionnaires notamment, qui ne reprendraient pas le travail ainsi que les proviseurs et autres qui se rendraient complices de blocages.
Un « rapport quotidien » des bonnes mesures prises est attendu. Le Délégué régional des Enseignements secondaires du Nord Ouest et ses inspecteurs avaient déjà réfléchi à des mesures devant permettre de rattraper les cours : extension de la journée de cours de 7h30 à 17h, cours de rattrapage les samedis de 7h30 à 13h, occupation des congés de pâques, etc. Quid du coût de ces aménagements ? Jacques Fame Ndongo à son tour sommait les responsables des universités de prendre des dispositions pour faire marcher leurs institutions.
Le Secrétaire Général du comité central du Rdpc, Jean Nkuete est entré dans leur suite pour susciter la création dans les sections du parti au pouvoir des « groupes de soutien » à ceux qui veulent travailler. Peine perdue. La mayonnaise du lundi n’a pas pris. Dans les rangs des enseignants cependant, une ligne de fracture se fait sentir entre les fonctionnaires et les agents du privé qui connaissent des problèmes pécuniers depuis le début du débrayage. Hors des campus, la ville de Bamenda était morte.
Les commerces sont restés fermés. Seuls des véhicules des particuliers et des forces de l’ordre circulent. Les activités sont du reste très perturbées par la rupture de la connexion Internet. Les banques ainsi que tous ceux qui utilisent cette technologie pour fonctionner connaissent de sérieux blocages. Durant le week-end et malgré l’interdiction du Consortium des associations de la société civile du Cameroun anglophone par un arrêté du ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation (Minatd) des messages téléphoniques et des tracts ont encore circulé, mettant en garde les populations contre une quelconque précipitation vers les salles de classe.
L’un d’eux, signé de Marcellus Nfecho, fixe la priorité à la libération des enseignants et des élèves. Un ultime texte de Me Félix Nkongho, le président du consortium dissout qui est incarcéré nomme Tapang Ivo et Mark Bara, des « leaders » vivant aux Etats Unis, comme nouveaux dirigeants. De deux jours (lundi et mardi), les « journées de désobéissance civile » passent à trois (lundi, mardi et mercredi) à compter du 23 janvier et ce, durant un mois.