Guerre fratricide au RDPC : triste fin pour le président Paul Biya

La tension monte dans le sérail

Mon, 24 Oct 2022 Source: La Nouvelle N°672

Quand l’on sait que la seule ville où le président Paul Biya a fait campagne en 2018 pour les dernières élections présidentielles est Maroua, chef-lieu de la région de l’Extrême-Nord et que cette région a toujours apporté un large soutien au Rdpc et au président Biya, l’on s’interroge sur cette opération de déstabilisation du Rdpc et de ses élites attribuée au président de l’Assemblée nationale, Cavaye Yeguié Djibril et ses affidés.

S’agit-il d’une opération savamment orchestrée de début de déstabilisation du régime dans l’un de ses fiefs les plus importants au moment où l’on parle de plus en plus de transition politique ? Ou simplement des manœuvres motivées par l’ambition personnelle d’éliminer tous les potentiels rivaux au leadership politique dans cette région, face aux appétits de nouvelles générations qui aspirent à mettre fin à l’immobilisme et à l’utilisation du pouvoir pour des fins personnelles et familiales et non au service des populations ?

En effet, depuis près d’un mois, le Rdpc et ses partis alliés connaissent une forte tension à l’Extrême-Nord avec des sentiments de dépit et de désarroi au sein des responsables et militants de ces partis. A l’origine, soutient une source, 3 lettres attribuées au président de l’Assemblée nationale adressées tour à tour au président de l’Assemblée nationale de la République centrafricaine, au président de la transition du Tchad et au secrétaire général du Comité central du Rdpc dénonçant des élus et élites politiques de la région de l’Extrême-Nord appartenant au Rdpc et au Fnsc du ministre Issa Tchiroma, parti allié au Rdpc.

Si la première correspondance adressée au président de l’Assemblée nationale centrafricaine pour la haute information du président de la République dénonçant « la moralité douteuse » de l’Honorable Salmana Amadou Ali, député du Diamaré, chef-lieu de la région de l’Extrême-Nord, a plutôt suscitée la joie et l’ironie dans les milieux Rdpc, ses dirigeants se moquant du soutien que le Pan n’a eu de cesse d’apporter à ce député dans un passé récent, pour affaiblir politiquement les élites du Diamaré auprès du pouvoir de Yaoundé. Soutien financier important qui a continué après l’élection de ce dernier et qui a donné l’occasion à ce dernier de faire des nombreuses actions sociales auprès des populations du Diamaré et affaiblissant du coup le Rdpc.

Fake News

La 2ème correspondance adressée au secrétaire général du Comité central du Rdpc, Jean Nkueté, pour haute information de son président national, Paul Biya, accuse ni plus ni moins le vice-Premier ministre Ahmadou Ali (de regrettée mémoire) de laxisme tuant le Rdpc et le ministre Talba Malla, par ailleurs secrétaire à l’organisation du Rdpc, de déstabiliser le Rdpc dans la région de l’Extrême-Nord avec certains de ses alliés entre autres le Maire de Mora et le Sultan de cette localité. Dans sa lettre, le Pan va même jusqu’à prédire la mort du Rdpc et les risques de son échec aux prochaines

consultations électorales.

Une dénonciation qui ailleurs aurait fait certainement des conséquences politiques majeures au regard du statut des personnes concernées. La 3ème lettre adressée au président de la transition du Tchad accuse un membre du Bureau de l’Assemblée nationale, le questeur Kamssouloum Abba Kabir, député du Logone et Chari de n’être ni plus ni moins qu’un trafiquant d’armes, jetant une fois de plus l’opprobre sur l’Assemblée nationale qui patauge dans la mal gouvernance et des scandales à répétition.

C’est un autre pilier du Rdpc dans cette région donc la réputation est ternie à jamais que ces accusations soient fondées ou non, même si cette correspondance a été vite marquée du sceau du fake news. Pourtant, il a été un allié du président de l’Assemblée nationale dans l’ancrage des mauvaises pratiques qui ont pris racine à l’Assemblée nationale depuis près d’une dizaine d’années et qui ont donné un visage peu reluisant à cette institution.

Arrêtons-nous un instant pour questionner la véracité de ces correspondances. Ne sont-elles pas l’œuvre des détracteurs du Pan qui veulent démontrer à l’opinion que Cavaye Yeguié Djibril, du fait de son extrême fragilité affichée ces derniers temps, n’est plus l’homme de la situation ? N’est-ce pas l’œuvre de ses détracteurs de plus en plus nombreux qui lorgnent son fauteuil ? Des questions et des questions qui remettent au goût du jour le retour de ces batailles au sein du parti de la flamme dans cette partie du pays où beaucoup d’élites et responsables politiques crient leur ras le bol, notamment cette jeunesse qui estime que le président de l’Assemblée nationale n’aide que ses membres de la famille restreinte et qu’il est temps que les choses changent.

Le spectacle désolant de ces jours renforcent cette défiance vis-à-vis de l’élite et du Rdpc et leur penchant pour l’opposition. Ce d’autant plus que le démenti publié par le directeur de Cabinet du Pan ne semble pas convaincre grand

monde.

Pour certains analystes, il ne remet pas en cause explicitement l’authenticité des 3 lettres, l’intéressé s’étant contenté de parler d’informations qui circu-

lent dans les réseaux sociaux. Une chose est constante, c’est que dans l’Extrême-Nord, les batailles rangées vont aller en s’amplifiant au fur et à mesure qu’approcheront les prochaines échéances électorales. Face à une jeune garde qui piaffe d’impatience, la vieille garde apparemment à court de sympathie devra franchement mouiller le maillot pour conserver ce fief du président Biya dans le giron du Rdpc. Guerre géopolitique

En réalité, les raisons profondes de ce conflit intercommunautaire qui met à mal toute la région de l’Extrême Nord et particulièrement le département du Logone et Chari font état d’une guerre géopolitique que se livrent certaines élites. La zone serait sur un gisement important de pétrole et d’uranium, d’après une étude prospective et environnementale d’experts qataris, clandestinement dépêchée au Cameroun par une grande élite. Les récents événements (conflit intercommunautaire Mousgoums -Arabes Choa) font état d’une organisation binaire des assaillants Mousgoums. Lorsque les uns venaient, à bord de pirogues, de Blangoua et du Tchad, les autres ont gagné Kousseri par la route en passant par Logone Birni.

Le bilan des dégâts et autres atrocités perpétrés par ces milices d’un autre genre lourdement armés est attristant. Visiblement, ces attaques ciblées visaient à briser la colonne vertébrale de la richesse et de l’influence des Arabes Choa dans le département, selon une source. Les hostilités ainsi déclenchées ne pouvaient déboucher que sur le spectacle macabre et désolant auquel le monde a eu droit. Il fallait semer le chaos pour poser les bases d’une exploitation minière et ainsi renverser la donne sur tous les domaines. Suite à ces événements, l’Honorable Kamsouloum Abba Kabir est accusé à tort ou à raison d’avoir fait venir nuitamment de centaines de déplacés internes du Nigéria et du Tchad voisins avec en arrière-pensée que ces derniers pourraient être des potentiels soldats en cas de guerre. De l’autre côté, estiment quelques mauvaises langues, cette manœuvre de pompier pyromane, a eu pour but de tromper la vigilance de l’Etat, de se faire passer pour un bienfaiteur et de se remplir les poches.

Vrai ou faux ?

Une autre question s’impose : la lettre attribuée au Pan s’agissant du député Kamsouloum ne trouve-t-elle pas son origine dans cette bataille à fleurets mouchetés, sous fond de manœuvre politicienne qui n’arrange pas la si- tuation du Rdpc dans cette région ? Wait and

see

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