Irrecevabilité de la candidature de Kamto : ce que dit la loi

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Sun, 20 Jul 2025 Source: www.camerounweb.com

Pascal Charlemagne Messanga Nyamding, professeur de sciences politiques et droit public, docteur en droit public gradué de l’université de Paris I Panthéon Sorbonne, coordonnateur du Mouvement des Biyaïste, donne son point de vue sur l’irrecevabilité ou non de la candidature de Maurice Kamto.

« La recevabilité de la candidature du professeur Maurice Kamto, portée par le Manidem pour l’élection présidentielle du 12 octobre 2025 au Cameroun, ne souffre d’aucun obstacle juridique », dit-il.

La doctrine du biyaïsme, à la base, repose sur un ensemble de valeurs. Celle-ci repose sur cinq piliers sempiternellement bafoués par certains individus sans foi, ni loi depuis bientôt 43 ans. Pour preuve, au moment où l’élection présidentielle du 12 Octobre 2025 mobilise les esprits, la remise en cause de la recevabilité de la candidature du professeur Kamto est maladroitement mise à la une par certains juristes. Pour preuve, deux attitudes juridiquement formelles de désordre et de dérèglement nous permettent de le démontrer :

(I) Celle de l’évocation, juridiquement non fondée du rejet de la candidature du Pr Maurice Kamto, du fait de la légalisation de sa signature et celle de son mandataire dans un commissariat.

(II) Celle de l’évocation, juridiquement non fondée de sa candidature, du fait de la non-effectivité de sa démission du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC).

I/ À propos de l’évocation, juridiquement non-fondée, de la candidature du Pr Maurice Kamto du fait de la légalisation de sa signature et celle de son mandataire dans un commissariat. L’officier de police judiciaire (OPJ) jouit de la compétence absolue en matière de légalisation des signatures.

La confusion évoquée concernant la légalisation par l’autorité administrative s’impose uniquement aux candidatures indépendantes, ce qui est loin d’être le cas de la candidature du professeur Maurice Kamto, portée par le Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie (Manidem).

Du point de vue du droit, c’est la constitution (1) et le code électoral (2) qui font ici autorité.

1) De l’autorité de la prescription constitutionnelle

Dans l’article 3 de la constitution camerounaise du 18 janvier 1996 qui est sans ambiguïté, « les partis et formations politiques concourent à l’expression du suffrage. Ils doivent respecter les principes de la démocratie, de la souveraineté et de l’unité nationale. Ils se forment et exercent leurs activités conformément à la loi ».

Au regard de cette prescription, c’est la loi électorale N°2012/0120 du 21 Décembre 2012 qui fait autorité et non la loi n° 90/056 du 19 décembre 1990 portant sur la création des partis politiques.

In fine, tout juriste voulant procéder à la vacuité délibérée de cette prescription, est sévèrement blâmable pour deux raisons. Première raison de droit : la loi sur les partis politiques n’est pas en rivalité avec la loi électorale. Et même si ce fut le cas, c’est la loi supérieure, c’est- à-dire la constitution, qui prime, notamment dans l’esprit et la lettre prescriptive de l’article 3 sus-évoqués.

Deuxième raison de droit : Le code électoral prescrit la représentation, mais ne conditionne pas cela comme principe. Ce deuxième argument nous renvoie une fois de plus à l’esprit et à la lettre de la constitution.

Donc, le sous-bassement juridique implicite est le code électoral, qui prescrit le mandat par un parti politique représenté. Que viennent donc chercher ici les élucubrations juridiques qui établissent un lien entre la loi sur les partis politiques, alors qu’il existe un code électoral où le législateur a procédé à la vacuité du militantisme au profit de tout individu jouissant d’un mandat d’un parti politique représenté (cas du professeur Maurice Kamto dont la candidature ne souffre actuellement d’aucune illégalité sur ce point bien précis) ?

Pour le législateur camerounais, l’article 121 du code électoral dispose que :

« (1) Les candidats peuvent être : 1°) soit investis par un parti politique ; 2°) soit indépendants, à condition d’être présentés comme candidats à l’élection du Président de la République par au moins trois cents (300) personnalités originaires de toutes les Régions, à raison de trente (30) par Région et possédant la qualité soit de membre du Parlement ou d’une Chambre Consulaire, soit de Conseiller Régional ou de Conseiller Municipal, soit de Chef Traditionnel de premier degré.

(2) Le candidat investi par un parti politique non représenté à l’Assemblée Nationale, au Sénat, dans un Conseil régional ou dans un Conseil Municipal doit également remplir les conditions prévues à l’alinéa (1) ci-dessus applicables aux candidats indépendants. Lesdites personnalités doivent apposer leurs signatures légalisées par les autorités administratives territorialement compétentes sur les lettres de présentation. Une même personnalité ne peut apposer qu’une seule signature et pour un seul candidat ».

Cela demeure la base juridique référentielle en matière électorale en ce qui concerne la recevabilité des candidatures. C’est ce que prescrit la loi qui est générale et impersonnelle. C’est l’esprit du « dura lex, sed lex » (la loi est dure mais c’est la loi).

Que les juristes aliénés par des positions de pouvoir révisent leurs positions et leur mauvaise interprétation de la loi concernant l’investiture. Le texte électoral parle de partis représentés. Il n’est écrit nulle part « militants représentés ».

Le parti politique mandate la personnalité de son choix. Or dans le cas précis de l’investiture du Pr Kamto, investi par un parti, le Manidem a mandaté l’impétrant, qui n’a pas à justifier de son appartenance politique. Par conséquent, l’interprétation de certains juristes s’avère alors erronée, et non fondée. À cet effet, il est non fondé de faire dire à la loi ce qu’elle n’a pas expressément prescrite.

De ce fait, la loi sur les partis politiques est une affaire privée élaborée par la puissance publique à charge, ayant pour objectifs d’encadrer l’hérédité et les conflits éventuels entre militants d’un même parti. Que vient donc chercher cette loi sur la recevabilité de la candidature du Pr Kamto (avec ou sans démission du professeur Kamto, le mandat que lui confère le Manidem est inattaquable) ?

II/ À propos de l’évocation, juridiquement non fondée, de sa candidature, du fait de la non-effectivité de sa démission du MRC. Il s’agit d’une approche approximative de l’analyse juridique entretenue par des pourfendeurs de l’État de droit.

Les juristes qui établissent un lien mettant en exergue la loi sur l’organisation des partis politiques s’inscrivent dans une posture juridique essentiellement dolosive pour deux raisons déjà sus-évoquées à savoir : l’esprit de la loi et la lettre de la loi.

En prenant le risque de nous répéter, où est prescrite la notion de « militant politique » dans la loi électorale ou encore dans la norme supérieure qui est la constitution ? En dehors de toutes preuves juridiques qui encadrent le principe de la légalité, la casuistique, comme le font certains n’est pas le droit.

C’est l’approximation dans l’analyse, c’est l’éventualité, c’est l’imagination. Elle relève même de la manipulation. C’est de la complaisance. Il n’y a pas de lien possible à établir comme l’évoquent avec arrogance certains, entre la démission au sein d’un parti politique et l’investiture d’un candidat mandaté, conformément à la constitution et à la loi électorale camerounaises. Les illustrations jurisprudentielles sont légion au Cameroun sur ce point.

De nombreux élus connus ont procédé à des transhumances sans apporter préalablement la preuve de leur démission d’un parti à un autre. Ces transhumances formelles sont conformes à la loi électorale.

Cas de transhumances de nombreux élus : entre l’UNDP et le FSNC, entre l’UNDP et l’ANDP, entre UNIVERS et le PCRN, entre le MANIDEM et le RDPC, entre l’UPC et le PCRN, entre le PSC et le RDPC entre le RDPC et l’AFP etc… (je me réserve de citer les noms de ces élus par respect pour leurs choix).

Au regard de ces illustrations qui fondent les sources du droit, l’évocation de la démission préalable du Pr KAMTO comme militant du MRC, est juridiquement non fondée et non pertinente au vu du strict respect de la légalité des normes. De ce fait, les griefs juridiques évoqués jusque-là contre le Pr Kamto ne sont pas juridiquement justes et recevables.

La paix par le droit ne se proclame pas, elle se vit au quotidien. Cependant, tous ces écueils de droit rigoureusement évoqués devraient susciter en nous, juristes, la mise en avant de « la force du droit » en place et lieu du « droit de la force », chère au doyen Vedel. Ce n’est qu’à ce prix que la paix recherchée par le droit au Cameroun s’obtiendra.

Source: www.camerounweb.com