'Kamerun ! Une guerre cachée aux origines de la Françafrique'

Thomas Deltombe Thomas Deltombe est journaliste, historien, et coauteur de "Kamerun !

Sat, 10 Oct 2015 Source: Jeune Afrique

Thomas Deltombe est journaliste, historien, et coauteur de "Kamerun ! Une guerre cachée aux origines de la Françafrique" (éd. La Découverte, 2011).

Jeune Afrique : Que peut-on attendre de l’ouverture des archives sur la répression menée au Cameroun pendant les années qui ont précédé l’indépendance ?

Thomas Deltombe : Cela provoque chez moi un espoir mitigé, car depuis le discours de François Hollande, début juillet, on n’en a plus entendu parler, ni côté français ni côté camerounais.

Il me semble aussi que le président français ne savait pas de quoi il parlait. Il ne s’est pas agi d’une répression, comme il l’a dit, mais d’une vraie guerre. Une guerre secrète, non médiatisée, mais une guerre quand même.

Et ce même si le discours des administrateurs coloniaux a été euphémisé, même si on parlait d’« interrogatoires poussés » au lieu d’actes de torture et d’« opérations de maintien de l’ordre » lorsqu’il s’agissait de véritables opérations de guerre…

Hollande s’est par ailleurs dit prêt à ouvrir les archives, mais en réalité une bonne partie de celles-ci sont déjà ouvertes. Même certains documents classés secret-défense sont déjà accessibles, sauf peut-être pour les chercheurs camerounais qui n’auront jamais le visa pour aller les consulter en France…

Mais il est évident que nous n’aurions pas écrit Kamerun ! si nous n’avions pas eu la possibilité de consulter des dizaines de milliers de documents.

De quels types de documents parlons-nous ?

De procès-verbaux, qui sont parfois très allusifs, de fiches de renseignements sur certains opposants, de notes rédigées sur des prisonniers, d’articles de presse archivés… Les agents administratifs de l’époque les découpaient méticuleusement et les commentaient : « Celui-ci dit la vérité, celui-ci ment. »

Tous ces détails sont des indices et parfois même des preuves. Le problème, c’est que ces documents sont dispersés géographiquement. Les archives coloniales sont à Aix-en-Provence, celles de l’armée sont à Vincennes et celles de la police à Fontainebleau.

Source: Jeune Afrique