Ceux qui sont incarcérés dans le cadre de l’opération Epervier espèrent une potentielle grâce présidentielle.
«Ils m’ont condamné à quinze ans, soit deux septennats. A présent il peut me rendre ma liberté.» C’est en ces termes que Titus Edzoa s’exprimait sur les colonnes de Jeune Afrique en 2011 alors qu’il purgeait encore sa peine au Secrétariat d’Etat à la Défense (Sed) à Yaoundé.
A l’époque, l’ancien secrétaire général à la présidence de la République affirmait que ses déboires judiciaires étaient dénués de toute objectivité. Tout simplement parce que le chef de l’Etat était «mal entouré», et qu’il «conduit les Camerounais à leur perte.» Un discours qui cadrait certainement avec l’ambition présidentielle qu’il avait affichée en avril 1997, année de sa démission du gouvernement et de son incarcération.
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Le chirurgien pensait alors que son rêve présidentiel est une «démarche intellectuelle à laquelle Paul Biya, aveuglé par un entourage incompétent, n’a rien compris.» Février 2014, Titus Edzoa et Michel Thierry Atangana, tous deux incarcérés en coaction de détournements de deniers publics, sont libérés.
Le 1er mars de la même année, quelques jours après sa libération, l’ancien collaborateur de Paul Biya donne une conférence de presse à Yaoundé. Sur ses ambitions politiques, il demande du recul en louant les vertus du silence. L’ancien SGPR laisse entendre qu’il a démissionné du gouvernement, sans que cela n’entraîne sa démission du RDPC. Une affirmation qui tranche le débat sur ses présumées ambitions présidentielles.
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Depuis ce jour, Titus Edzoa suit tranquillement sa cure de silence. On l’a vu au côté de Ni John Fru Ndi lors du congrès du SDF à Bamenda, fin février 2018. Espère-t-il un retour en grâce à 73 ans révolus ? Tout espoir est possible. Comme Titus Edzoa, nombre d’anciens gestionnaires incarcérés dans le cadre de l’opération de lutte contre la corruption et les détournements se présentent comme des prisonniers politiques.
Ils se croient être victimes d’épuration politique. Mais rares sont ceux qui s’en prennent frontalement à Paul Biya. L’entourage du chef de l’Etat et les autorités en charge des questions juridiques sont incriminés pour leur manque d’objectivité dans le pilotage de l’opération Epervier. La plupart des proies de l’Epervier n’ont donc pas changé de pas de danse avec le changement de cadence.
Elles sont dans l’espérance d’une hypothétique libération. C’est cet espoir qui était l’idée principale du prêche de l’archevêque métropolitain de Yaoundé, Jean Mbarga. Il y a quelques semaines, disant la messe pascale en la prison centrale de Yaoundé, le célébrant affirmait : «Jésus est capable, même après la mort, de vous faire sortir du tombeau. A plus forte raison, après votre incarcération, il vous sortira d’ici.»
Paroles d’espoir pour Jean Baptiste Nguini Effa. «Quand on la foi en Christ, la prison n’est pas une tombe, on ressuscite avec le Christ et on sera libre et comme le disait l’archevêque Jean Mbarga, on n’a été jamais libre que quand on est en prison. J’ai été condamné à 30 ans de prison, le 12 octobre 2012. Le 20 juillet 2017, la Cour suprême a déclaré que cette condamnation était complètement annulée et cassée. Il s’agit bien d’une résurrection», affirmait l’ancien directeur général de la SCDP.
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Mais la plupart d’entre eux attendent une potentielle sollicitude du chef de l’Etat, espérant qu’après Titus Edzoa, le feuilleton des libérations enchaîne les épisodes.